Le massacre des milieux humides se poursuit
Québec avait en plus promis d’investir pour créer de nouveaux écosystèmes
Le ministère de l’Environnement continue d’autoriser presque systématiquement la destruction de milieux humides en échange d’argent, mais n’a pas dépensé un sou de ces sommes pour créer de nouveaux écosystèmes depuis juillet dernier.
Depuis 2017, Québec dit avoir accumulé une cagnotte de 170 M$ versés par les promoteurs et les organisations publiques qui détruisent des milieux humides et hydriques.
Ces sommes doivent notamment servir à la création ou la restauration d’autres milieux humides. Mais au cours des neuf derniers mois, aucun projet n’a été financé.
« Ce qu’on voit, c’est que le programme ne fonctionne pas. Les chiffres sont là pour en témoigner. Les résultats ne sont pas au rendez-vous », constate Alain Branchaud, biologiste et directeur général à la Société pour la nature et les parcs, division Québec.
En juillet 2023, le ministre de l’Environnement Benoit Charette disait avoir « corrigé des lacunes rapportées par différents promoteurs et municipalités qui n’arrivaient pas à bénéficier de ces sommes ».
Si Québec n’agit pas, ce n’est certainement pas faute d’argent. Au cours des deux dernières années, plus de 80 millions $ se sont ajoutés à ce fonds devant servir à des initiatives de création de ces écosystèmes vitaux.
« PATHÉTIQUE ET DÉPLORABLE »
Pendant que la création de milieux humides est au point mort, la destruction, elle, bat son plein. Durant l’année 2023, 294 projets détruisant un milieu humide ou hydrique ont été autorisés par le Ministère, comme le controversé projet d’usine de batteries Northvolt, à Saint-Basile-le-Grand et McMasterville.
Ce projet a d’ailleurs été fortement critiqué lors de manifestations à l’occasion du Jour de la Terre, ce week-end.
Pendant ce temps, seulement 11 projets ont été refusés pour des raisons environnementales, a-t-on appris.
« C’est pathétique et déplorable. On est loin d’atteindre l’objectif d’aucune perte nette et on continue d’autoriser la destruction », s’inquiète Stéphanie Pellerin, experte des milieux humides à l’Université de Montréal.
DERNIER RECOURS
La Loi concernant la conservation des milieux humides et hydriques prévoit que la compensation financière devrait être la solution de dernier recours, et qu’il faille toujours tenter d’éviter les projets en milieux humides. Or, la compensation financière est choisie dans plus de 96 % des cas.
Pour sa part, le Ministère précise que de nouvelles sommes – quelques centaines de milliers de dollars – doivent être versées au cours de trois prochaines années.
Quant aux 294 projets autorisés en échange d’une compensation financière, le Ministère indique que certains d’entre eux ont pu faire l’objet d’une minimisation des impacts avant leur acceptation ultime.
Hier, le cabinet du ministre Charette n’avait pas donné suite à nos questions.