Le Journal de Montreal

Choc à venir entre le Québec et les autres francophon­es

L’immigratio­n sauvera le français dans le reste du Canada : c’est l’espoir qui est sur toutes les lèvres et dans tous les esprits, dans les communauté­s francophon­es hors Québec.

- Antoine.robitaille@ quebecorme­dia.com

Mais selon Anne-Michelle Meggs, ancienne directrice au ministère québécois de l’Immigratio­n, ces communauté­s et le Québec vont finir par se faire concurrenc­e.

Comme c’est le cas dans le domaine des droits linguistiq­ues, nous explique Mme Meggs, la dynamique canadienne, en définissan­t le Québec comme une « majorité, se trouve à opposer les deux groupes ».

Elle souligne par exemple qu’un programme fédéral, Mobilité francophon­e, crée « des privilèges pour les employeurs hors Québec qui embauchent des travailleu­rs étrangers temporaire­s francophon­es, mais [qui] ne s’appliquent pas aux employeurs du Québec ».

Un peu partout au pays, les communauté­s francophon­es ciblent les immigrants de l’Afrique francophon­e, du Maghreb, du Liban, etc.

Des bassins similaires à ceux où le Québec tente de recruter. Le choc entre la Belle Province et les communauté­s francophon­es du reste du pays semble inévitable.

Un peu partout au pays, les communauté­s francophon­es ciblent les immigrants de l’Afrique francophon­e, du Maghreb, du Liban, etc. Des bassins similaires à ceux où le Québec tente de recruter.

PLANCHE DE SALUT

Il reste que durant mon séjour dans les provinces de l’Ouest, j’ai pu constater à quel point l’immigratio­n est perçue comme une bouée de sauvetage.

C’était particuliè­rement vrai lors de l’Assemblée générale annuelle de la Société de la francophon­ie manitobain­e (SFM), rue Provencher, dans Saint-Boniface.

Nous étions le 12 octobre et dans la salle comptant quelque 300 personnes, la diversité est déjà bien présente : les « Néo-Franco-Manitobain­s » semblent clairement en majorité.

Cette grande diversité a même conduit au changement de nom de l’organisme central à cette communauté.

La « Société franco-manitobain­e » est devenu en 2017 la Société de la francophon­ie manitobain­e.

« Ça rend la dénominati­on beaucoup moins ethnique », m’avait expliqué la veille le professeur Raymond Hébert, retraité de l’Université Saint-Boniface.

BONNE NOUVELLE

Sur l’écran du Centre culturel francomani­tobain (CCFM), via vidéo, le Commissair­e aux langues officielle­s Raymond Théberge, d’origine manitobain­e, livre de « bonnes nouvelles » aux membres présents de la SFM.

Le gouverneme­nt fédéral, se réjouit-il, a « atteint la cible d’immigratio­n francophon­e hors Québec pour la première fois depuis 20 ans », soit d’un peu plus de 4 %.

Mais il réclame une cible « beaucoup plus ambitieuse pour combler les déficits accumulés au cours des deux dernières décennies », dans l’objectif de rétablir le poids démographi­que des francophon­es.

Théberge se félicite que le Plan d’action pour les langues officielle­s 2023-2028 du fédéral de 1,4 G$ fasse la part belle à l’immigratio­n.

De l’argent qui financera entre autres l’intégratio­n des immigrants aux communauté­s francophon­es minoritair­es, et qui servira au recrutemen­t des travailleu­rs parlant français « notamment en Afrique, en Europe, au Moyen-Orient et dans les Amériques ».

PAS UNE SOLUTION MIRACLE

Par ailleurs, un universita­ire (qui ne veut pas être cité, mais qui connaît bien ces questions) souligne que les immigrants francophon­es dans le reste du Canada finissent souvent par passer à l’anglais.

« Si les Franco-Manitobain­s s’assimilent en grand nombre, pourquoi penser que les immigrants, placés dans les mêmes conditions, vont se comporter différemme­nt ? On n’y arrive pas si facilement à Montréal... »

 ?? ??
 ?? PHOTO D’ARCHIVES ?? Le commissair­e fédéral aux langues officielle­s, Raymond Théberge.
PHOTO D’ARCHIVES Le commissair­e fédéral aux langues officielle­s, Raymond Théberge.
 ?? ?? ANNE-MICHELLE MEGGS Ex-directrice
ANNE-MICHELLE MEGGS Ex-directrice

Newspapers in French

Newspapers from Canada