Pluie et boue s’invitent au campement
Les manifestants du campus de McGill se préparent à affronter les policiers qui pourraient intervenir
Le campement propalestinien du campus de l’Université McGill a été transformé en bain de boue par la pluie hier, ce qui n’empêchera pas ses militants d’affronter un démantèlement imminent par la police.
Dame Nature est venue compliquer la vie dans le campement où environ 80 tentes étaient toujours installées sur un terrain gazonné du campus de l’université montréalaise.
Selon Environnement Canada, au moins une vingtaine de millimètres de pluie s’est abattue sur la métropole hier.
« Ça pose un défi pour nous. Il y a beaucoup de flaques d’eau et de boue », a fait savoir un organisateur, Ali Salman.
Un appel « d’urgence » pour fournir divers équipements a été lancé par une association étudiante sur les réseaux sociaux pour aider le campement à passer à travers la pluie. Sur place, des militants ont installé tant bien que mal des bâches et quelques abris portatifs pour s’agglutiner en dessous, tout en enfilant des ponchos.
Le sol à l’intérieur du camp est toutefois devenu un véritable bain de boue, si bien que les organisateurs tentaient de le recouvrir avec des planches de bois et des tapis de caoutchouc pour continuer de s’y déplacer.
PAS COMPARABLE À LA PALESTINE
M. Salman se disait toutefois en confiance que les campeurs étaient prêts à rester et à passer la nuit, peu importe la météo.
« Les conditions dans lesquelles on vit, c’est très minime [sic] par rapport à ce qui se passe en Palestine », a résumé une étudiante qui a passé les trois nuits précédentes au campement. Elle a refusé de donner son nom, comme la grande majorité des participants du campement.
Les manifestants semblaient avoir triomphé face à la mauvaise météo en fin de soirée, alors que la pluie avait cessé.
De petites tranchées pour drainer l’eau entre les tentes ont été creusées et la vie avait repris à l’intérieur de la zone barricadée où des dizaines de personnes étaient visibles.
DEMANDE D’INJONCTION
Les militants avaient passé le début de la journée à se préparer à un tout autre défi : celui de résister à une intervention imminente des forces policières.
La décision concernant une demande d’injonction déposée par deux étudiants visant le campement de l’Université McGill, déposée hier à la Cour supérieure, devrait être rendue ce matin.
Celle-ci vise à interdire à des regroupements propalestiniens qu’ils accusent d’avoir créé un climat « dangereux, hostile et violent » de manifester à moins de 100 mètres des bâtiments universitaires de McGill.
Hier, l’administration de l’université montréalaise a informé ses étudiants qu’elle avait fait appel au Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) pour démanteler le campement qui est érigé depuis quatre jours.
DIALOGUE IMPOSSIBLE
L’administration a dit avoir tout tenté, incluant le dialogue avec les manifestants, mais a constaté l’« absence d’une résolution ». « Le but, c’est qu’on protège, qu’on garde nos barricades et qu’on ne laisse pas les policiers entrer », a réagi Ari Naham, porte-parole de Voix juives indépendantes Concordia, un des organismes qui ont érigé le campement.
Or, les heures ont passé sans qu’un seul policier soit visible dans le secteur.
Hier, le SPVM indiquait toujours évaluer ses options, en « préconisant un dénouement pacifique ».
NEW YORK | (AFP) La police de New York est intervenue hier soir sur le campus de l’Université Columbia pour y déloger des étudiants et militants propalestiniens barricadés depuis la nuit précédente dans un bâtiment.
Un camion de police avec une échelle s’est approché du bâtiment occupé et la presse a pu voir des dizaines de policiers en tenue antiémeute grimper pour atteindre une fenêtre afin de pénétrer dans le Hamilton Hall, où sont retranchées des dizaines de personnes depuis la nuit de lundi à hier.
Les forces de l’ordre sont entrées vers 21 h 30 sur l’immense campus de cette grande université du nord de Manhattan, épicentre d’un mouvement national aux États-Unis en soutien à la cause palestinienne et contre la guerre que mène Israël dans la bande de Gaza contre le Hamas.
Sur leur compte Instagram, les manifestants du groupe propalestinien Columbia University Apartheid Divest ont dénoncé une « invasion » du campus par les forces de l’ordre afin de les déloger du Hamilton Hall qu’ils ont renommé « Hind’s Hall » en hommage à une fillette de six ans tuée à Gaza.
PLUSIEURS ARRESTATIONS
Dénonçant hier une « escalade », le porte-parole de Columbia Ben Chang avait menacé d’expulser et de « renvoyer » de l’université ces étudiants en les accusant de « vandaliser, casser et bloquer les accès » du bâtiment.
Des images de télévision montraient des dizaines de personnes interpellées et des journalistes de l’AFP ont vu aussi des manifestants à l’extérieur de l’immense campus être arrêtés pendant que la foule criait « Palestine libre ! ».
La présidente de l’Université Columbia a demandé dans une lettre à la police de New York, rendue publique mardi, de maintenir sa présence sur le campus « au moins jusqu’au 17 mai 2024 ». Cette présence a pour but « de maintenir l’ordre et de s’assurer qu’aucun campement ne soit établi », a écrit la présidente Minouche Shafik.
La colère étudiante américaine se propage depuis deux semaines, des grandes universités de la côte est à celles de la Californie en passant par le sud et le centre, rappelant les manifestations contre la guerre du Vietnam à la fin des années 1960.
ACCORD
Un autre campus d’élite du nord-est, Brown University à Providence dans le Rhode Island, a annoncé un accord avec les étudiants : démantèlement du campement contre un vote de l’université en octobre sur d’éventuels « désinvestissements de “sociétés qui rendent possible et profitent du génocide à Gaza” ».
L’étudiant Leo Corzo-Clark a sauté de joie pour cette « énorme victoire pour ce mouvement international et le peuple de Palestine ».