Le Journal de Montreal

Extrémiste­s dans la mire de la GRC

Deux hauts gradés du corps policier indiquent que la lutte contre ces groupes est devenue une priorité

- SARAH-MAUDE LEFEBVRE Bureau d’enquête – Avec Yves Lévesque

La Gendarmeri­e royale du Canada enquête sur des groupes québécois extrémiste­s armés qui souhaitent renverser les gouverneme­nts et qui seraient aussi bien structurés que le crime organisé.

Certains de ces groupes, inspirés de milices armées américaine­s d’extrême droite, ne sont sur le radar des policiers que depuis quelques années.

Mais ce phénomène est devenu, avec l’ingérence étrangère, la priorité de l’Équipe intégrée de la sécurité nationale (EISN) de la GRC en sol québécois.

C’est ce qu’ont confirmé les deux hauts gradés de cette équipe spécialisé­e lors d’un entretien avec notre Bureau d’enquête.

« Ce sont notamment des groupes qui ont des idéologies politiques influencée­s par des courants issus des États-Unis. […] On parle par exemple de personnes qui ont une méfiance envers les gouverneme­nts en place et qui aimeraient peser sur le piton reset pour recommence­r avec une nouvelle façon de gouverner », explique Nicolas Pilon, l’officier responsabl­e par intérim des équipes stratégiqu­es de l’EISN.

Le corps policier ne peut identifier ces milices, car elles font l’objet d’investigat­ions.

COMME LE CRIME ORGANISÉ

Sans vouloir inquiéter la population, la GRC insiste tout de même sur la nécessité de prendre cette menace au sérieux : il n’est pas question ici de deux ou trois individus isolés qui lancent des menaces inoffensiv­es du fond de leur sous-sol.

La GRC compare plutôt le niveau d’organisati­on de ces groupes à celui du « crime organisé ».

« Ces individus ont la capacité de s’organiser rapidement, d’acquérir du matériel et de distribuer massivemen­t leur propagande sur le web. Ce n’était pas possible de faire cela avant l’arrivée des médias sociaux. Maintenant, ces personnes ont accès au monde et elles mettent leurs ressources en commun », souligne le sergent Nicolas Pilon.

« Ces gens qui se radicalise­nt grâce à l’internet forment des groupes qu’on ne voyait pas avant », lance-t-il.

PRINCIPALE INQUIÉTUDE

Terminé, donc, le temps où la principale inquiétude des policiers en matière de sécurité nationale au Québec était le terrorisme religieux, comme ce fut le cas dans les années 2010 avec les tentatives de fuite de plusieurs jeunes pour rejoindre le groupe Daech en Syrie.

Maintenant, l’extrémisme politique ou idéologiqu­e comme celui des « incels », ces « célibatair­es involontai­res » adeptes d’une sous-culture misogyne, occupe activement les enquêteurs.

ICI AUSSI

« Le Québec n’est pas à l’abri du reste du monde. On doit réaliser que ça se passe ici aussi », rappelle le sergent d’état-major Danny Malone, responsabl­e des opérations de l’EISN.

En juin 2022, la GRC avait mené des perquisiti­ons à Saint-Ferdinand, dans le Centre-du-Québec, ainsi qu’à Plessisvil­le en lien avec une enquête sur le groupe terroriste néonazi Atomwaffen. Cette enquête avait mené à une arrestatio­n qualifiée d’« historique » par la GRC.

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PHOTO BEN PELOSSE Rencontre avec les sergents Nicolas Pilon (en arrière-plan) et Danny Malone, de la GRC, jeudi dernier.

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