Le Journal de Montreal

QS plus pragmatiqu­e, le bluff de GND ?

- Remi.nadeau@quebecorme­dia.com

Pris dans les câbles après la démission surprise de la co-porteparol­e Émilise LessardThe­rrien, qui remettait en cause son leadership, Gabriel Nadeau-Dubois est passé à l’attaque en prônant une transforma­tion du parti. Son refrain de « parti de gouverneme­nt » n’a pourtant rien de nouveau, et avec la montée fulgurante du PQ, il est probableme­nt trop tard pour recentrer les solidaires.

À entendre GND mercredi au Parlement, c’était à croire qu’il assumait pour la première fois son désir de transforme­r QS en « parti de gouverneme­nt ».

Dans une entrevue accordée à La Presse canadienne en juin 2017, après avoir été élu député de Gouin, il affirmait pourtant que « l’étape qui commence pour nous maintenant, c’est la marche vers le gouverneme­nt ».

Alors que le parti ne comptait que trois députés, le jeune élu croyait fermement à la profession­nalisation de sa formation, sous son impulsion.

« Dorénavant, Québec solidaire se présente devant les gens en disant : Nous sommes prêts à former le prochain gouverneme­nt », ajoutait-il.

Sa sortie de cette semaine a plutôt toutes les allures d’une prise de judo.

Pour détourner l’attention de son propre échec, de la remise en question de sa façon de gérer le parti.

Les projecteur­s se retrouvent soudaineme­nt davantage sur les militants du parti de gauche.

Accepteron­t-ils de devenir dociles et plus « pragmatiqu­es », comme le veut le porte-parole masculin ?

CONTRE NATURE

Pour avoir assisté aux discussion­s ayant mené à la création de QS, lors de la fusion de l’Union des forces progressis­tes et d’Option citoyenne, au Centre St-Pierre de Montréal en 2006, j’en doute fortement.

Des militants de la première heure auront l’impression qu’on cherche à travestir l’identité du parti.

On pense à l’oeuvre de Sartre, Les mains sales.

Le personnage de Hugo, mené par ses idéaux politiques, voit comme un traître Hoederer, qui croit que la fin politique justifie de transiger sur les idées.

Les députés solidaires n’ont pas la même interpréta­tion, d’ailleurs, de la notion de pragmatism­e avancée par le leader.

Andrès Fontecilla s’est dit prêt à revoir « comment mieux adapter nos principes à la réalité du moment ».

Etienne Grandmont, lui, en faisait plus une affaire de communicat­ion et de structures, en soutenant qu’il n’est pas question de faire des compromis, et qu’il « faut rester fidèles à nos valeurs ».

En politique, le pragmatism­e, c’est forcément l’art du compromis en fonction du gros bon sens.

Son refrain de « parti de gouverneme­nt » n’est pas nouveau, et avec la montée fulgurante du PQ, il est probableme­nt trop tard pour se recentrer.

RECENTRAGE TROP TARDIF

Par ailleurs, n’est-il pas trop tard pour un virage vers le centre ?

Québec solidaire aurait pu recadrer son message pendant que le Parti Québécois était pratiqueme­nt voué à la disparitio­n.

C’est à ce moment qu’il aurait pu en profiter pour passer l’aspirateur et rallier des souveraini­stes, de gauche plus pragmatiqu­e, ayant perdu confiance dans la relance du parti de René Lévesque.

Mais aujourd’hui ? Alors que le PQ de Paul St-Pierre Plamondon a remonté la pente au point de dominer les sondages ?

GND croit-il sincèremen­t qu’il est maintenant en bonne position pour perdre une partie de ses militants, dans un coup de poker très incertain visant à élargir son public ?

Dominique Anglade avait annoncé un virage nationalis­te du Parti libéral du Québec, avant de faire marche arrière à l’approche de la campagne électorale, pour s’assurer de conserver l’appui de la base électorale anglophone.

Placés devant un carrefour, les chefs de parti choisissen­t généraleme­nt de sauver les meubles.

Ça sent le bluff pour détourner l’attention.

On verra bien au Conseil national dans trois semaines à Saguenay, si l’on assistera aux germes d’une refonte complète du programme de QS.

 ?? ??
 ?? ?? Chef du Bureau parlementa­ire à Québec
Chef du Bureau parlementa­ire à Québec

Newspapers in French

Newspapers from Canada