Le Journal de Montreal

Des refus qui crèvent le coeur

Ensevelis sous les dossiers de locataires, les avocats en droit du logement ne peuvent pas aider tout le monde

- CLARA LOISEAU

Les avocats en droit du logement, submergés par un raz-de-marée de demandes de locataires à la veille de perdre leur toit, se voient forcés de refuser des centaines de dossiers chaque mois.

« La poignée d’avocats en droit du logement, les comités logement et les militants pour les droits du logement, nous sommes comme des sauveteurs sur une plage frappée par un tsunami, et on peut sauver quelques individus, mais on ne peut pas arrêter la vague », illustre Me Manuel Johnson, un avocat en droit social.

L’avocate en droit du logement Me Kimmyanne Brown est tellement à bout de ressources qu’elle doit refuser au minimum cinq dossiers quotidienn­ement.

« C’est crève-coeur […] On sent qu’il faut sauver les gens qui nous appellent et nous supplient de prendre leur dossier, parce que ça fait six ou sept avocats qu’ils contactent et qui ne peuvent pas les prendre », déplore-t-elle.

DIZAINES DE REFUS PAR SEMAINE

Dans les bureaux d’avocats qui représente­nt les locataires, les téléphones n’arrêtent plus de sonner et les courriels de s’accumuler.

À contrecoeu­r, les refus de prise en charge sont devenus monnaie courante, déplore Me Ré Poulin Ladouceur.

Ce sont particuliè­rement les reprises de logement, les évictions pour changement d’affectatio­n et agrandisse­ment, ainsi que les « rénovictio­ns » qui reviennent énormément.

« Je suis malheureus­ement habitué à dire non, parce que c’est impossible de prendre en charge tous [les locataires] », admet

Me Poulin Ladouceur.

« C’est très difficile, parce qu’on sait que dans beaucoup de cas, les gens peuvent perdre leur logement », explique

Me Johnson, qui affirme n’avoir jamais eu autant de demandes dans sa vingtaine d’années de carrière.

« Ce sont des dossiers qui sont difficiles, compliqués et qui peuvent prendre tout notre temps », ajoute-t-il.

LE GOUVERNEME­NT DOIT PARTICIPER

Pour Me Johnson, il faut que le gouverneme­nt intervienn­e pour rétablir le rapport de force entre les locataires et les locateurs, tout en mettant plus de financemen­t pour bonifier les tarifs de l’aide juridique pour les dossiers de logement.

Et la demande qui explose montre bien qu’on est dans une crise du logement, estime Me Brown.

« Un nombre élevé de demandes, ça montre que le gouverneme­nt doit agir rapidement pour mettre en place un cadre législatif qui va protéger adéquateme­nt des locataires face aux évictions », conclut-elle.

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PHOTOS DOMINIQUE LELIÈVRE ET CLARA LOISEAU Véronique Villeneuve, locataire, explique que la contestati­on de la demande de reprise de logement par son propriétai­re est une grande source de stress.
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KIMMYANNE BROWN Avocate
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MANUEL JOHNSON Avocat

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