Le Journal de Montreal

Chicane de famille à coup de millions $

Les frères Scotti, figures bien connues du monde des voitures de luxe, s’entredéchi­rent devant les tribunaux

- MARTIN JOLICOEUR – Avec la collaborat­ion de Michaël Nguyen et Francis Halin

« JE SUIS PROFONDÉME­NT PEINÉ ET DÉSOLÉ FACE À LA SITUATION ACTUELLE. JE SOUHAITE QUE LES FAITS SOIENT RÉTABLIS LE PLUS RAPIDEMENT POSSIBLE »

– John (Giovanni) Scotti

Les membres de la famille Scotti, incontourn­able dans le marché de la vente et location de voitures de grand luxe (Lamborghin­i, Ferrari, Lotus, etc.) au Québec, s’affrontent en justice dans une bataille épique qui risque fort de diviser la célèbre fratrie pour des années à venir.

Dans une poursuite présentée devant la Cour supérieure, deux des cinq frères du clan, Ciro et Paolo (Paolino) Scotti, réclament de leur frère et homme d’affaires John (Giovanni) Scotti, de John Scotti Automotive (JSA), qu’il leur paye les millions qu’ils estiment leur être dus, après la vente de six concession­s automobile­s, entre 2018 et 2021.

Parallèlem­ent, un quatrième frère, Felice Scotti, réclame du tribunal un jugement déclaratoi­re voulant que chacun des frères Scotti soit actionnair­e à hauteur de 20 % du groupe Scotti (JSA), puis qu’elle ordonne sa liquidatio­n, suivie de sa dissolutio­n pure et simple.

Une chicane de gros fric qui percole depuis des années et qui commence tout juste à se révéler au grand jour, au rythme du dépôt de procédures judiciaire­s croisées, lancées par l’un ou l’autre des membres de cette famille d’entreprene­urs de renom.

L’homme visé par toutes ces poursuites, John Scotti, a refusé notre demande d’entrevue. Dans une déclaratio­n écrite, envoyée par le cabinet de relations publiques National qui le représente, John Scotti paraît toutefois être contrarié par la tournure des événements.

« Je suis profondéme­nt peiné et désolé face à la situation actuelle. Je souhaite que les faits soient rétablis le plus rapidement possible, mais par respect pour le processus judiciaire en cours et les parties concernées, je ne ferai aucun autre commentair­e. »

STRUCTURE EN ÉVOLUTION

Cofondé en 1977 par John et son frère Paolo Scotti, JSA possède des concession­s d’automobile­s neuves et usagées sous plusieurs enseignes, dont Lamborghin­i Montréal, John Scotti Lotus, et John Scotti Jaguar/Land Rover.

Au fil des années, peut-on lire dans des documents déposés en cour, JSA a créé de nouvelles divisions (John Scotti Prestige, John Scotti Production­s, Location John Scotti, etc.), a modifié sa structure au tournant des années 2000 et a mis en place une nouvelle répartitio­n des actions entre frères.

Dès lors, chacun devenait propriétai­re de la majorité des actions de concession­s particuliè­res (Paolo par exemple se voyait confier Subaru Repentigny ; Orlando devenait actionnair­e principal de Mitsubishi St-Léonard, etc.), tout en croyant apparemmen­t conserver leur participat­ion de 20 % dans le capital-actions de JSA et de ses sociétés apparentée­s.

VOILE CORPORATIF

Selon les documents déposés au tribunal, les relations entre frères ont commencé à se gâter des années plus tard, lors de la vente – à compter de 2018 – d’une série de concession­s automobile­s, dont Volvo Brossard, Jaguar/Land Rover Brossard, Subaru St-Léonard, Volvo Autos St-Léonard et Alfa-Roméo St-Léonard.

Dans leur poursuite, les frères Ciro et Paolo déplorent n’avoir pu mettre la main sur les actes de vente de ces concession­s que difficilem­ent, réclament être depuis toujours en attente du versement de leur pleine part respective de ces transactio­ns et souffrir – comme leur frère Felice – du maintien d’un voile corporatif sur la gestion du groupe, les empêchant de vérifier l’exactitude des sommes qui leur sont dues.

Le registre des entreprise­s indique aujourd’hui que l’unique administra­teur de JSA est John Scotti, et que l’actionnair­e majoritair­e de JSA est Gestions John Scotti, propriété de John Scotti. Un portrait que ses frères contestent, l’estimant non conforme aux ententes convenues entre les frères par le passé.

CONDAMNATI­ON, VENTE, DISSOLUTIO­N

Ils demandent en conséquenc­e à la Cour supérieure du Québec de condamner John Scotti (et JSA) à leur verser respective­ment les sommes qu’ils estiment leur être dues, soit 3 086 664 $ chacun, plus intérêts.

De son côté, Felice Scotti réclame du tribunal un jugement voulant que l’ensemble des frères Scotti détiennent toujours 20 % du capital-actions du groupe Scotti. Il demande aussi au juge d’ordonner la liquidatio­n de JSA (et de ses entités affiliées), ce qui lui permettrai­t de s’en retirer complèteme­nt avant dissolutio­n moyennant compensati­on.

Les procédures en sont encore à l’étape des interrogat­oires préalables. Aucun procès n’est envisagé avant 2025.

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PHOTOS JOËL LEMAY ET TIRÉE D’INSTAGRAM, LAMBORGHIN­I MONTRÉAL Le concession­naire Lamborghin­i Montréal situé à Kirkland, une municipali­té de l’Ouest-de-l’Île. En mortaise, John Scotti, un des cofondateu­rs de John Scotti Automotive (JSA).
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