Deux députés avocats dans une situation délicate, la suite
Affirmer qu’une personne se trouve dans une « situation délicate » ne revient nullement à la qualifier de malhonnête.
« Délicate » : « Qui présente des aspects difficiles à apprécier, embarrassants à exécuter ; complexe, malaisé, dangereux. » (Larousse)
Parce que j’ai écrit dans ma chronique de samedi que deux députés se retrouvaient dans une situation de ce type, on m’a reproché d’attaquer à leur intégrité.
J’ai pourtant exposé des faits. Seule l’épithète « délicate », dans mon texte, s’apparente à un jugement de valeur.
J’ai pourtant exposé des faits. Seule l’épithète « délicate », dans mon texte, s’apparente à un jugement de valeur.
PME
Samedi, sur X, Guillaume ClicheRivard (GCR) de QS, un des deux députés en cause, a souligné avoir à plusieurs reprises sollicité l’avis de la commissaire à l’éthique pour encadrer son cas. Cette insistance à elle seule démontre que lui-même trouvait sa situation « délicate » !
Et il a raison : GCR est député, porte-parole QS en matière d’Immigration ET en même temps en affaires dans ce même domaine : il est l’unique actionnaire d’un cabinet spécialisé dans le droit en immigration comptant de 5 à 10 employés salariés.
Depuis son élection, il jure n’avoir facturé « aucune heure et représenté aucun client devant les tribunaux ». Au plus « quelques suivis par courriel dans des dossiers en traitement seulement ».
Mais les avocats à son emploi, eux, facturent, évidemment. Et quand le cabinet fait des profits, M. Cliche-Rivard en est l’unique bénéficiaire. Depuis son élection, les affaires sont-elles meilleures ou moins bonnes ? La facturation, c’est « confidentiel », m’a-t-on répondu à QS.
MARQUE DE COMMERCE
Quand son parti ou les médias soulignent sa spécialisation en droit de l’immigration, il y a sûrement plusieurs clients potentiels, dans l’auditoire, qui le notent.
S’ils veulent faire appel à ses services, ils peuvent, dans n’importe quel moteur de recherche par exemple, trouver le cabinet portant précisément le nom du député : « Cliche-Rivard avocats. » Un juriste me le souligne : « C’est une marque de commerce. »
Dans son avis à Marie-Claude Nichols, la commissaire à l’éthique a interdit à cette autre députée avocate d’agir comme si elle voulait se « bâtir une clientèle ». Qu’il le veuille ou non, M. Cliche-Rivard, parce qu’il est encore l’unique propriétaire de son cabinet, a l’air de faire précisément cela, dès qu’il parle publiquement de sa profession et de sa spécialisation.
PRUDENCE DE MISE
Devant l’ensemble des limites et règles imposées par la commissaire à Mme Nichols, cette dernière a, par prudence, renoncé à sa profession. Pour que sa situation cesse d’être « délicate », M. Cliche-Rivard n’aurait-il pas dû changer le nom de son cabinet et vendre carrément ses actions ?
Peut-être est-ce une des propositions que la commissaire lui a faites ? Impossible de le savoir, puisque GCR refuse de publier ses avis (à part une conclusion).
Enfin, il y a un an, on nous a seriné que les députés méritaient 30 % d’augmentation, car leurs heures de travail étaient presque infinies. Cela me semblait mérité d’ailleurs. Mais apprendre ainsi que des élus ont un tel travail (et revenu) d’appoint me semble… surprenant. Au risque de paraître indélicat.