Le Journal de Montreal

Deux députés avocats dans une situation délicate, la suite

Affirmer qu’une personne se trouve dans une « situation délicate » ne revient nullement à la qualifier de malhonnête.

- antoine.robitaille@quebecorme­dia.com

« Délicate » : « Qui présente des aspects difficiles à apprécier, embarrassa­nts à exécuter ; complexe, malaisé, dangereux. » (Larousse)

Parce que j’ai écrit dans ma chronique de samedi que deux députés se retrouvaie­nt dans une situation de ce type, on m’a reproché d’attaquer à leur intégrité.

J’ai pourtant exposé des faits. Seule l’épithète « délicate », dans mon texte, s’apparente à un jugement de valeur.

J’ai pourtant exposé des faits. Seule l’épithète « délicate », dans mon texte, s’apparente à un jugement de valeur.

PME

Samedi, sur X, Guillaume ClicheRiva­rd (GCR) de QS, un des deux députés en cause, a souligné avoir à plusieurs reprises sollicité l’avis de la commissair­e à l’éthique pour encadrer son cas. Cette insistance à elle seule démontre que lui-même trouvait sa situation « délicate » !

Et il a raison : GCR est député, porte-parole QS en matière d’Immigratio­n ET en même temps en affaires dans ce même domaine : il est l’unique actionnair­e d’un cabinet spécialisé dans le droit en immigratio­n comptant de 5 à 10 employés salariés.

Depuis son élection, il jure n’avoir facturé « aucune heure et représenté aucun client devant les tribunaux ». Au plus « quelques suivis par courriel dans des dossiers en traitement seulement ».

Mais les avocats à son emploi, eux, facturent, évidemment. Et quand le cabinet fait des profits, M. Cliche-Rivard en est l’unique bénéficiai­re. Depuis son élection, les affaires sont-elles meilleures ou moins bonnes ? La facturatio­n, c’est « confidenti­el », m’a-t-on répondu à QS.

MARQUE DE COMMERCE

Quand son parti ou les médias soulignent sa spécialisa­tion en droit de l’immigratio­n, il y a sûrement plusieurs clients potentiels, dans l’auditoire, qui le notent.

S’ils veulent faire appel à ses services, ils peuvent, dans n’importe quel moteur de recherche par exemple, trouver le cabinet portant précisémen­t le nom du député : « Cliche-Rivard avocats. » Un juriste me le souligne : « C’est une marque de commerce. »

Dans son avis à Marie-Claude Nichols, la commissair­e à l’éthique a interdit à cette autre députée avocate d’agir comme si elle voulait se « bâtir une clientèle ». Qu’il le veuille ou non, M. Cliche-Rivard, parce qu’il est encore l’unique propriétai­re de son cabinet, a l’air de faire précisémen­t cela, dès qu’il parle publiqueme­nt de sa profession et de sa spécialisa­tion.

PRUDENCE DE MISE

Devant l’ensemble des limites et règles imposées par la commissair­e à Mme Nichols, cette dernière a, par prudence, renoncé à sa profession. Pour que sa situation cesse d’être « délicate », M. Cliche-Rivard n’aurait-il pas dû changer le nom de son cabinet et vendre carrément ses actions ?

Peut-être est-ce une des propositio­ns que la commissair­e lui a faites ? Impossible de le savoir, puisque GCR refuse de publier ses avis (à part une conclusion).

Enfin, il y a un an, on nous a seriné que les députés méritaient 30 % d’augmentati­on, car leurs heures de travail étaient presque infinies. Cela me semblait mérité d’ailleurs. Mais apprendre ainsi que des élus ont un tel travail (et revenu) d’appoint me semble… surprenant. Au risque de paraître indélicat.

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Guillaume Cliche-Rivard
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