Toujours très peu d’accusations de haine depuis l’attaque du Hamas
Des experts soulignent que ces enquêtes sont particulièrement difficiles à faire aboutir Le Journal.
Bien que le nombre de crimes haineux ait explosé à Montréal à la suite du déclenchement de la guerre Israël-Hamas le 7 octobre dernier, seulement une poignée a jusqu’à récemment mené à des accusations, selon des données obtenues par
En date du 2 avril, 108 crimes à caractère haineux ciblant les communautés juives (80) et les communautés arabo-musulmanes (28) ont été rapportés au Service de police de la Ville de Montréal (SPVM)
Celui-ci collige ces données depuis le 7 octobre, lorsque les attaques du Hamas, puis les bombardements d’Israël sur la bande de Gaza qui ont suivi ont provoqué une escalade de tensions dans la métropole.
Le SPVM a transmis 26 de ces dossiers au Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP), qui a indiqué au Journal que des accusations avaient été portées dans 8 d’entre eux.
Le reste des dossiers entre les mains du DPCP est généralement soumis au délai de prescription, c’est-à-dire la période d’un an qu’ont les procureurs pour demander des compléments de preuve et décider ou non de porter des accusations, fait savoir Me Lucas Bastien, porte-parole du DPCP.
ÇA N’ARRÊTE PAS
Depuis les démarches effectuées par Le Journal ,le nombre de crimes haineux a de nouveau augmenté et se situait à 124 en date du 30 avril, ce qui pourrait mener à d’autres accusations dans les prochains mois. Il est impossible de le savoir pour le moment.
Le conflit Israël-Hamas a fait exploser les crimes et incidents haineux à Montréal. La police a enregistré plus d’événements liés uniquement à ce conflit en moyenne par mois (29) depuis le 7 octobre qu’elle en recensait pour toutes catégories confondues au cours des dernières années (23 en 2022 et 24 en 2021).
EN ATTENTE DE RÉSULTATS
Les chefs d’accusation portés par le DPCP sont pour la plupart liés à des menaces, des voies de fait et des propos haineux.
Par exemple, Samy Shaat a été accusé en novembre dernier d’avoir fomenté la haine et l’antisémitisme. L’homme de 25 ans a subi son enquête préliminaire et les procédures judiciaires se poursuivent. Or, dans plusieurs autres cas de crimes haineux largement médiatisés, les autorités n’ont pour le moment pas traduit un quelconque suspect en justice.
Par exemple, des coups de feu ont été tirés sur deux écoles juives en novembre 2023. Le même mois, un cocktail Molotov a été lancé sur les locaux d’un organisme juif.
« Ça reste que nous sommes en mai et on n’a pas encore les résultats de certaines investigations qu’on aimerait avoir », s’impatiente Eta Yudin, vice-présidente du Centre consultatif des relations juives et israéliennes (CIJA).
De son côté, le Forum musulman canadien exhorte les autorités à en arriver à des conclusions dans ses enquêtes.
« Je crois que le SPVM fait de son mieux », précise tout de même son président, Samer Majzoub.
ENQUÊTES COMPLEXES
Le SPVM a refusé notre demande d’entrevue dans le cadre de ce reportage.
Selon l’avocat criminaliste Antonio Cabral, les enquêteurs font souvent face à un défi de taille lorsque vient le temps de bâtir la preuve dans les dossiers de crimes haineux.
« C’est l’un des crimes qui prennent le plus de temps à prouver, parce qu’il faut prouver non seulement le crime, mais l’intention [haineuse] derrière », dit-il.
Cette analyse est partagée par l’exenquêteur au SPVM André Gélinas. Il souligne que les individus commettant ce type de crime peuvent être « des loups solitaires » difficiles à identifier.