Le Journal de Montreal

Investisse­ment Québec n’aura bientôt plus d’employé en Chine

Beaucoup d’entreprise­s québécoise­s ont récemment quitté l’empire du Milieu

- SYLVAIN LAROCQUE

« C’EST SÛR QUE LE MARCHÉ CHINOIS N’EST PLUS UNE PRIORITÉ POUR LE GOUVERNEME­NT DU QUÉBEC »

–Jean-François Lépine, ancien directeur des représenta­tions du gouverneme­nt du Québec en Chine

Investisse­ment Québec (IQ) a fini par se rendre à l’évidence : devant la détériorat­ion des relations du Canada avec la Chine, la société d’État va bientôt cesser ses activités dans ce pays, a appris Le Journal.

À partir de la fin juin, IQ n’aura plus aucun employé en Chine, a indiqué un de ses porte-parole Mathieu Rouy.

Deux d’entre eux étaient basés à Pékin et travaillai­ent à « favoriser les investisse­ments » chinois au Québec tandis qu’un troisième, établi à Shanghai, s’occupait de « l’accompagne­ment des entreprise­s québécoise­s qui exportent dans ce pays », a précisé M. Rouy.

L’ACCOMPAGNE­MENT VA CONTINUER

« Bien que le volume d’exportatio­ns québécoise­s en Chine demeure stable d’un point de vue monétaire, les secteurs dans lesquels Investisse­ment Québec accompagna­it davantage les entreprise­s québécoise­s ont connu dernièreme­nt une baisse importante, notamment le secteur de l’aérospatia­le », a expliqué le porte-parole.

« Investisse­ment Québec continuera d’accompagne­r les entreprise­s québécoise­s qui souhaitent exporter en Chine, mais le fera depuis le Québec à compter du 30 juin », a-t-il ajouté.

L’ancien journalist­e Jean-François Lépine, qui a été représenta­nt du Québec en Chine de 2015 à 2021, n’est pas surpris de la décision d’IQ.

« C’est sûr que le marché chinois n’est plus une priorité pour le gouverneme­nt du Québec », a-t-il souligné.

À l’époque des premiers ministres Jean Charest et Philippe Couillard, le Québec a beaucoup mis l’accent sur l’attraction d’investisse­ments dans le secteur minier. Des entreprise­s chinoises ont notamment mis la main sur une mine de nickel (Canadian Royalties au Nunavik) et de lithium (North American Lithium en Abitibi).

« L’histoire de ces investisse­ments-là a été plus ou moins catastroph­ique, a affirmé M. Lépine. Après M. Charest, on s’est mis à dire aux Chinois : “Oui, vous pouvez investir dans les mines, mais vous allez transforme­r le minerai au Québec.” Et les Chinois ne voulaient pas s’embarquer là-dedans. Il y a eu beaucoup d’échecs. »

C’est sans compter que les relations entre le Canada et la Chine souffrent toujours du bras de fer que se sont livré les deux pays de 2018 à 2021 avec la détention, à Vancouver, d’une haute dirigeante de Huawei (Meng Wanzhou) et l’emprisonne­ment de deux Canadiens en Chine (les deux Michael).

TENSIONS POLITIQUES

À cela se sont ajoutées, au cours des derniers mois, les tentatives d’interféren­ce politique de la Chine au Canada.

« Tout cela fait en sorte que nos relations avec la Chine sont, probableme­nt, pires qu’elles ne l’ont jamais été », a estimé Jean-François Lépine.

Résultat, « beaucoup d’entreprise­s québécoise­s ont retiré leurs billes de la Chine et sont plutôt réparties ailleurs en Asie », a-t-il dit.

Le dernier investisse­ment d’importance de la Chine au Québec est celui annoncé l’an dernier par le géant des jeux vidéo NetEase.

Rappelons que la Caisse de dépôt a fermé son bureau à Shanghai il y a quelques mois.

Les investisse­ments de la Chine au Canada et du Canada en Chine stagnent depuis au moins 2021, selon des données de Statistiqu­e Canada. Quant aux échanges commerciau­x entre la Chine et le Québec, ils n’ont connu qu’une croissance modérée au cours des dernières années.

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PHOTO D’ARCHIVES, PIERRE-PAUL POULIN Le siège social d’Investisse­ment Québec, à Montréal.

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