Le Journal de Montreal

Souriez ou vendez M. Saputo, la vie est un fromage

- Jean-Nicolas Blanchet jean-nicolas.blanchet@quebecorme­dia.com

C’est splendide pour Montréal d’avoir une équipe de la MLS. C’est une ligue en santé qui connaît une progressio­n hallucinan­te. C’est un divertisse­ment fabuleux dans un stade Saputo modeste, mais merveilleu­x. Tu peux même savourer un bouquet de fromage en crottes pour pas cher. C’est fabuleux. Tout y est. Sauf une chose qui gâche tout.

Prenez un grand amateur de sports qui n’a jamais aimé beaucoup le soccer, mais qui est toujours ouvert à s’intéresser à autre chose que le hockey. C’est moi ça.

Et le soccer, tout est là pour que je tombe en amour avec ce grand sport, cette euphorie mondiale, les traditions, les athlètes fascinants...

Mais je n’embarque pas. Sauf quand c’est l’Euro ou le Mondial. Je n’ai jamais hâte de savoir si le CF Montréal a gagné ou pas. Et je trouve ça triste.

Je ne suis pas le seul. J’ai la chance de savoir ce qui intéresse nos lecteurs parmi l’éventail d’articles que nos journalist­es écrivent. Le CF Montréal, à moins d’un exploit, c’est minuscule. C’est ça que je trouve triste. Ce n’est pas normal.

Pourtant, le potentiel de popularité du CF Montréal est immense. Il y a tant de fans de sports comme moi qui n’attendent qu’à être conquis.

Et là on regarde tout ce qui se passe avec cette organisati­on et on a encore moins le goût d’embarquer. Pas à cause du stade. Pas à cause de la qualité du produit. Pas à cause des prix des billets. Mais plutôt parce que c’est géré tout croche.

Et celui qui gère ça, c’est Joey Saputo. Celui qui est imputable.

Certes, les tumultes dans un club de soccer, ce n’est pas rare. C’est comme ça partout. C’est la tradition. Ça ne dure jamais longtemps et s’en suit une période de stabilité. Mais le CF Montréal, c’est une organisati­on aussi stable qu’une balle de ping-pong dans une sécheuse.

UN DOCUMENTAI­RE

Les niaiseries de l’équipe mériteraie­nt un captivant documentai­re sur l’apologie de la mauvaise gestion d’un club sportif.

Depuis l’arrivée dans la MLS, c’est 10 entraîneur­s en 13 ans.

Saputo, le propriétai­re, pète des plombs, lance des poubelles et enguirland­e son personnel.

Wilfried Nancy, un ancien de l’UQAM, qui a décidé de lever les feutres pour se rendre dans la triste ville de Colombus afin de poursuivre sa carrière. Nancy n’en pouvait plus du CF Montréal. Il ne s’entendait pas avec la direction.

On continue ? À 25 ans, Mathieu Choinière est devenu un rouage important du club de son enfance, le CF Montréal justement. Il voulait être payé 600 000 $ par année. L’organisati­on lui a offert 350 000 $. Il a été nommé joueur par excellence de l’équipe l’an passé. Il a représenté l’équipe au match des étoiles. Et 600 000 $, c’est quand même 800 000 $ de moins que le joueur le mieux payé du club cette année. Je ne suis pas son agent, mais ça m’apparaît ridicule de le payer 350 000 $. C’est épouvantab­le. Le joueur local qui te fait vendre des gilets, qui t’amène des fans, qui inspire des enfants à jouer au soccer, non seulement tu dois bien le payer, mais tu dois le payer encore plus cher que sa valeur. L’investisse­ment est d’une logique tellement simple.

QUI NE COMPREND PAS ?

Mais avec le CF Montréal, c’est différent. Ça ne leur rentre pas dans le coco cette notion. Et le dossier Choinière le démontre bien. La grande majorité de la direction du club doit très bien comprendre ça. Mais quelqu’un semble avoir plus d’influence que d’autres et tous les convaincre qu’il vaut mieux économiser, au risque de les perdre.

- Ah oui, et j’avais oublié, dans la nomenclatu­re des scandales sur le CF Montréal. En janvier 2023, l’équipe avait nommé Sandro Grande comme entraîneur de l’équipe de réserve. Ce pauvre type avait souhaité l’assassinat de Pauline Marois.

Je ne peux pas comprendre qu’une organisati­on assise sur un si beau produit, un potentiel aussi énorme, une influence aussi importante puisse l’avoir échappé autant que ça.

Ça prend une gestion horrible, une indifféren­ce gênante du public et une déconnexio­n troublante du Québec.

- Et finalement, lundi, Tony Marinaro annonçait que c’était au tour d’Olivier Renard de quitter l’organisati­on.

Le propriétai­re semble trop aimer le soccer sans comprendre qu’il n’y connaît pas grand-chose dans le fond.

Pourquoi ne pas sourire, contempler son monde, bien travailler et intervenir juste si c’est nécessaire ?

Je vois tout ça, et je pense au voisin qu’on a tous : Jean-Guy. Lui, il connaît ça ! Il sait comment relancer Josh Anderson. Il saurait quoi dire à Martin St-Louis.

On ne voudrait pas que Jean-Guy achète le Canadien. On aurait la chienne qu’il essaie de parler à Martin St-Louis de ses stratégies débiles. On imagine que Martin St-Louis s’en irait. C’est peut-être pour ça que le CF Montréal a eu 8 coachs en 10 ans.

C’est à ça que me fait penser Joey Saputo.

C’est triste, il y a de la place pour d’autres équipes que le Canadien à Montréal. Mais ça va prendre une solide remise en question.

Et si Joey Saputo veut continuer à croire qu’il connaît plus le soccer que le personnel expert qu’il paie, bien, qu’il vende le club pour qu’un plus grand public s’y intéresse à la hauteur qu’il mérite. Sinon ça ne marchera jamais. Votre équipe en Italie va très bien. Concentrez-vous sur celle-là et ça risque d’aller mieux ici.

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 ?? PHOTO D’ARCHIVES, PIERRE-PAUL POULIN ?? Joey Saputo lors d’une conférence de presse en 2019.
PHOTO D’ARCHIVES, PIERRE-PAUL POULIN Joey Saputo lors d’une conférence de presse en 2019.

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