« JE VIENS D’INSTALLER 4 CAMÉRAS DISCRÈTES : DOIS-JE PRÉVENIR LES VOISINS ? »
« J’ai fait installer quatre caméras résidentielles extérieures il y a quelque temps dans un but précis, pour notre sécurité », écrit M. François T.
« Je me demande ceci : est-ce préférable d’aviser le voisin, puisqu’il y a enregistrement dans sa cour ?
« Dans la mesure du possible, je songe à limiter l’enregistrement dans ma cour seulement, dans quelques jours, avec l’aide du technicien.
« Alors, si tel est le cas, dois-je aviser ou non les voisins de chaque côté que nous possédons quatre caméras ?
« Bien entendu, nous avons une excellente relation avec nos voisins et je tiens à garder cela. »
IMPORTANCE DES BONNES RELATIONS
Il y a lieu de répondre à M. François T. que les bonnes relations entre voisins valent leur pesant d’or. Tout propriétaire d’immeuble cherche en général à vivre en paix avec son entourage et à éviter toute initiative susceptible de modifier l’ordre des choses.
C’est pourquoi il est fortement recommandé à M. T. de mettre ses voisins au courant de ses intentions et de ses démarches. En s’abstenant de les informer, il pourrait susciter leur méfiance.
La jurisprudence fournit plusieurs exemples d’utilisation de caméras dans le cadre de campagnes de harcèlement unilatérales ou réciproques à propos de tout ou de rien : clôture, corde à linge, stationnement, droit de passage, etc.
TROIS CAMÉRAS BRAQUÉES SUR LES VOISINS
Dans une cause récente, par exemple, il était question de trois caméras qui « filmaient en continu ce qui se passait chez le voisin. Le juge a déterminé qu’il s’agissait d’une intrusion dans la vie privée ».
Dans cette affaire, ce sont les demandeurs eux-mêmes qui avaient pris l’initiative d’installer des caméras, « notamment pour surveiller et documenter le comportement agressif des défendeurs » en vue de procédures judiciaires éventuelles. Pour leur part, les défendeurs se sont défendus en prenant des photos des demandeurs.
CONDUITES FAUTIVES
Les hostilités avaient duré de nombreux mois avant que le tribunal n’y mette un terme.
À la lumière de la preuve produite au procès, le tribunal n’avait pas hésité à conclure que chaque partie était fautive à l’égard de l’autre.
Les défendeurs ont notamment été condamnés à verser 6000 $ en dommages aux demandeurs, et ceux-ci ont été condamnés à payer 3500 $ aux défendeurs.
Pour ce qui est des caméras, leur champ de vision avait été réduit dès avant le procès, de sorte que le tribunal n’a pas eu à prononcer d’injonction pour en ordonner l’enlèvement.
JETS DE DÉCHETS ET CAMÉRAS AUX QUATRE COINS
Dans une autre cause, les parties habitaient des bungalows voisins en banlieue. L’un des propriétaires s’était mis à harceler et intimider ses voisins de mille et une façons. Par exemple en jetant des déchets ou d’autres objets dans leur cour et en installant des caméras de surveillance dirigées vers leur maison pour capter leurs moindres faits et gestes.
La situation était devenue intenable pour ces voisins, les demandeurs, à tel point qu’ils avaient peur de sortir de leur maison, particulièrement le soir, et de se rendre dans l’entrée de leur cour la nuit, terrorisés qu’ils étaient par les caméras.
Le tribunal a estimé que leur installation avait pour but d’intimider les demandeurs et qu’elles les privaient de la pleine jouissance de leur propriété et brimaient leur vie privée et leur intimité.
En plus d’ordonner l’enlèvement de toutes les caméras dans les 48 heures suivant le jugement, le tribunal a condamné le défendeur à verser aux demandeurs une compensation de 18 000 $ pour dommages moraux, atteinte à la vie privée et violation de leur intimité.
TROUBLES EXCESSIFS
Enfin, selon les faits relatés dans une décision récente portant sur un litige analogue, la partie défenderesse, qui avait installé six caméras autour de sa propriété, a été condamnée à verser 1250 $ à ses voisins pour leur avoir fait subir des inconvénients excessifs et anormaux.