Idée de grandeur au centre-ville
Avec la pandémie de COVID-19 qui reprend de la force et le télétravail qui est plus prisé que jamais, les édifices de bureaux de plusieurs grandes villes nord-américaines sont désertés. En raison des mesures de distanciation physique, le taux d’occupation des tours de bureaux du centre-ville de Montréal est actuellement de 25 %. Plus surprenant encore, de nombreux promoteurs immobiliers et constructeurs continuent de bâtir des édifices commerciaux au centre-ville. Mais qui donc occupera ces gratte-ciel ?
Outre le fait de les transformer en habitations, une formidable idée pourrait permettre aux immeubles inoccupés de gagner une nouvelle vocation : convertir ces édifices de bureaux en fermes urbaines ! À la lecture de cette proposition, vous êtes étonné, voire incrédule ? Voici quelques arguments qui sauront vous convaincre de la pertinence et de la faisabilité d’un tel projet.
LA CULTURE INTÉRIEURE PLUS PRODUCTIVE QUE LA CULTURE EN SERRE
La culture de légumes ne doit pas obligatoirement se faire à l’extérieur, en pleine terre, ou sous des serres. Il est tout à fait possible de pratiquer l’agriculture urbaine à grande échelle à l’intérieur de bâtiments, sans même qu’il y ait de fenêtres pour laisser pénétrer les rayons du soleil. Bien évidemment, il faut modifier l’enveloppe intérieure des édifices afin de l’imperméabiliser et la rendre inattaquable par les moisissures, et également porter une attention particulière à la ventilation. De plus, il est nécessaire d’équiper les salles de culture de systèmes d’éclairage DEL spécialement conçus pour la culture des végétaux.
Toutefois, bien qu’il faille effectuer des aménagements importants à l’intérieur des bâtiments dans lesquels on souhaite construire des fermes urbaines, il n’en demeure pas moins que leur productivité est nettement supérieure à celle des cultures sous serres. À l’intérieur d’un bâtiment, il est possible d’étager les cultures et de multiplier la surface cultivable, ce qui n’est pas possible dans une serre sans empêcher les plantes du dessous de recevoir les rayons du soleil. On estime qu’une ferme urbaine intérieure peut produire jusqu’à 8 fois plus de nourriture au mètre carré qu’une serre. De plus, s’il est bien isolé, un bâtiment existant est nettement moins onéreux à chauffer
qu’une serre en verre à parois doubles.
DES FERMES URBAINES INTÉRIEURES RÉCEMMENT OUVERTES
La plus grande ferme urbaine intérieure d’Amérique du Nord est située à Newark, au New Jersey. AeroFarms est installée dans un édifice qui abritait une ancienne aciérie transformée en une ferme urbaine. Cette ferme utilise 95 % moins d’eau qu’une ferme conventionnelle et permet d’obtenir une trentaine de récoltes de légumes-feuilles par année pour chaque mètre carré de culture.
Un autre projet de ferme urbaine appelé Pasona Urban Farm a vu le jour il y a quelques années dans la ville de Tokyo, au Japon. Il s’agit en fait d’un édifice de 9 étages appartenant à l’entreprise Pasona Group dans lequel sont cultivées des plantes comestibles. L’enveloppe et la superstructure existantes du bâtiment, âgé de 50 ans, ont été conservées lors des rénovations.
Ce projet de rénovation d’envergure comprend une façade verte, des bureaux, un auditorium, des cafétérias, un jardin sur le toit et surtout, des installations agricoles urbaines intégrées à l’intérieur du bâtiment.
L’espace consacré aux cultures totalise plus de 43 000 pieds carrés avec 200 espèces cultivées, dont des fruits, des légumes et du riz, qui sont récoltés, préparés et servis dans les cafétérias du bâtiment. Pasona Urban Farm est le projet d’agriculture urbaine de la ferme à la table le plus important jamais réalisé dans un immeuble de bureaux au Japon.
D’autre part, plusieurs dizaines de jeunes entreprises en agriculture urbaine intérieure ont été fondées ces dernières années. C’est le cas notamment de la jeune entreprise allemande Infarm, une firme promise à un brillant avenir, spécialisée dans la conversion d’immeubles désaffectés en fermes urbaines.
Mentionnons aussi la firme d’agriculture urbaine Plenty, basée en Californie, qui vient récemment de lever un financement de plus de 200 millions en partie fourni par Jeff Bezos, président d’Amazon.