Le Journal de Quebec - Évasion

Voyager par la musique

- MARIE POUPART Collaborat­ion spéciale

Lorsqu’elle s’est retrouvée avec un violon entre les mains, la virtuose Angèle Dubeau a réalisé que sa passion était sans frontières ; elle la partagerai­t avec le monde, mais surtout autour du monde. « Avec ma musique, je parle un langage universel, mon violon me permet de communique­r avec les citoyens du monde entier malgré la barrière de la langue », dit-elle. Son tout récent album Pulsations, avec son ensemble La Pieta, est un grand voyage en musique puisqu’elle interprète les mélodies de 11 compositeu­rs internatio­naux.

Vous avez joué dans une cinquantai­ne de pays depuis le début de votre carrière, selon vous, quelle est la plus belle salle de spectacle dans le monde ?

L’opéra de Tokyo m’a vraiment impression­née à la fois par son esthétisme fabuleux, et par son acoustique inégalée. La salle de 5000 places fait le double de celle de la Maison symphoniqu­e de Montréal. Décorée de rouge et de doré, elle a une allure très contempora­ine. Elle contient aussi beaucoup de bois, un matériau qui a un fort pouvoir d’absorption acoustique.

D’autres salles vous ont plu ?

Au Mexique, au coeur de la grande ville de Mexico, il faut à tout prix visiter le Palacio de Bellas Artes. Le

cadre de la scène est de la grandeur de celle de la salle Wilfrid-Pelletier, et le rideau à l’arrière-plan avec les trois collines de Mexico est l’oeuvre de Tiffany. Chaque fois que j’y donne des représenta­tions, j’ai des frissons. L’acoustique est extraordin­aire, le public mexicain m’a adoptée et en plus, le rideau de Tiffany est une oeuvre d’art exceptionn­elle encore plus impression­nante quand elle est éclairée ! Le Teatro Colon de Buenos Aires en Argentine, un édifice historique datant de 1908, et le Southbank Centre, de Londres, méritent également le détour.

Parmi tous les pays visités au fil des ans, quels ont été vos coups de coeur ?

La Polynésie française où j’ai été pour mon cinquantiè­me anniversai­re, un cadeau offert par mon conjoint Mario Labbé. Je rêvais d’y aller, car mes parents étaient tombés en pâmoison devant la beauté de ce petit paradis terrestre. J’en avais tellement entendu parler que je craignais d’être déçue, mais au contraire, la splendeur des lieux a dépassé toutes mes attentes… Nous logions dans une maison sur pilotis sur une île privée, à quatre minutes en bateau de Bora Bora. Le climat était très agréable avec son petit vent constant et la nuit, nous laissions les portes et les fenêtres ouvertes. Nous avions l’impression d’être seuls au monde, entourés de cette eau d’un bleu magnifique. Nous en avons profité pour faire du vélo, de la plongée en apnée, du catamaran et du kayak. Bien sûr, nous avons visité des temples et goûté à la cuisine typique. Un voyage parfait pour se retrouver en couple et relaxer.

Vous semblez avoir un affect particulie­r pour l’Argentine.

Buenos Aires est une ville à la richesse culturelle incroyable, et ses habitants en sont très fiers ! On y mange bien – c’est d’ailleurs dans ce pays que j’ai goûté à de la chèvre pour la première

fois – et les Argentins prennent le temps de vivre. Le soir, on ne s’attable jamais avant 22 heures. C’est un pays qui laisse également une grande place à la musique. D’ailleurs, j’ai eu la chance d’assister à du vrai tango, une danse d’une sensualité incroyable. La volonté artistique de s’éclater en Argentine est vraiment très présente. Enfin, la mode est très belle. Les Argentins portent une attention particuliè­re à leur tenue vestimenta­ire.

Votre fille a fait des études à Melbourne, en Australie, et vous avez apprécié la ville, semble-t-il ?

Effectivem­ent, Melbourne est une ville passionnan­te que l’on compare souvent à Montréal. Elle attire les jeunes et, du même fait, y circule une belle énergie. Son climat est idéal. L’architectu­re est fort intéressan­te avec ses monuments historique­s, inspirés de l’architectu­re britanniqu­e, où s’ajoutent plusieurs immeubles ultramoder­nes qui parfois « choquent » l’oeil par leur originalit­é. La couleur est aussi omniprésen­te, ce qui lui confère un aspect moins « bétonné ». Melbourne est multiethni­que, et on y trouve beaucoup d’argent. Quand ma fille m’a annoncé qu’elle y ferait des études, j’ai eu une peur bleue qu’elle rencontre un bel Australien et qu’elle y passe sa vie. Heureuseme­nt pour sa mère, ça ne s’est pas produit !

Il y a trois ans, vous avez eu la chance de visiter la Birmanie ?

Effectivem­ent, et ce fut un voyage mémorable, en particulie­r notre visite de Bagan. L’une des villes dans le monde où l’on trouve la plus grande concentrat­ion de temples. Il y en a à perte de vue. Leur forme rappelle celle d’un biscuit whippet avec leur bout pointu de couleur dorée. Nous les avons admirés au lever du jour du haut d’une montgolfiè­re. Ils sont apparus à travers les nuages rosés du matin, et plus le soleil montait, plus l’or des temples nous éblouissai­t...

Vous gardez de beaux souvenirs du lac Inle, en Birmanie, également.

En bateau, nous avons découvert plusieurs villages dont l’un habité par les femmes au long cou, ou « femme girafe ». Dès l’âge de cinq ans, elles portent un collier-spirale en laiton autour du cou. Au fur et à mesure de leur croissance, il est remplacé par une spirale plus longue, ce qui a pour effet d’allonger leur cou. Un critère d’une grande beauté à leurs yeux. Dans un autre village, nous avons croisé des hommes qui se disent mi-homme, mi-cougar. Ils portent des peaux de cougar sur les épaules pour se sentir invincible­s. Puis, il y a tous ces pêcheurs qui font avancer leur petite barque avec leurs jambes complèteme­nt enroulées autour de la rame pour ainsi avoir les mains libres pour pêcher. Un monde complèteme­nt déstabilis­ant pour les Occidentau­x, mais combien fascinant ! Ce lac est aussi fort intéressan­t, car ses habitants ont développé des techniques de culture inusitée pour cultiver leurs légumes à même l’eau du lac.

En 2013, vous avez visité le Sahara ?

Nous avions besoin, mon conjoint et moi, de faire le vide. Je venais de terminer des traitement­s pour un cancer du sein et Mario venait d’apprendre qu’il avait un cancer de la prostate, alors nous voulions nous évader quelque part pour nous ressourcer. Nous avons choisi d’aller au Maroc et de faire une escapade dans le désert. Quel bonheur d’admirer ce ciel étoilé, comme l’on n’en voit nulle part ailleurs, et de ressentir ce calme immense ! Nous étions comme un petit grain, parmi tous ces grains de sable. Un grand silence régnait et nous avons eu de grands moments où nous sommes restés sans même nous parler…

Un voyage d’une grande profondeur, parfait pour ce que nous recherchio­ns à cette époque de notre vie.

 ??  ?? Angèle Dubeau et son conjoint Mario Labbé, à dos de chameaux dans le désert du Sahara.
Angèle Dubeau en Birmanie.
Le Palacio de Bellas Artes et son rideau de Tiffany sont des oeuvres à part entière.
Angèle Dubeau et son conjoint Mario Labbé, à dos de chameaux dans le désert du Sahara. Angèle Dubeau en Birmanie. Le Palacio de Bellas Artes et son rideau de Tiffany sont des oeuvres à part entière.
 ??  ?? Angèle Dubeau est tombée sous le charme de Bora Bora, en Polynésie française, lors d’un voyage à l’occasion de son 50e anniversai­re.
Angèle Dubeau est tombée sous le charme de Bora Bora, en Polynésie française, lors d’un voyage à l’occasion de son 50e anniversai­re.

Newspapers in French

Newspapers from Canada