Le Journal de Quebec - Weekend
UN NOUVEAU TOURNANT
pour Christian Duguay
Après avoir beaucoup tourné aux États-Unis au début de sa carrière, puis en Europe depuis une quinzaine d’années, le cinéaste québécois Christian Duguay signe avec Jappeloup: l’étoffe d’un champion son tout premier film en français, qu’il considère aussi comme son oeuvre la plus personnelle à ce jour.
Quand le producteur français Pascal Judelewicz a approché Christian Duguay pour lui présenter le scénario de Jappe
loup, le cinéaste québécois s’est immédiatement reconnu dans cette histoire. Comme le personnage principal du film, Duguay, un ancien cavalier, a passé une partie de son adolescence à courir les compétitions d’équitation avec son père.
«Ce qui est spécial, c’est que j’ai toujours voulu faire un film sur ma jeunesse, sur mes compétitions équestres avec mon père et les conflits familiaux que cela a engendrés», explique le cinéaste en entrevue au Journal.
«Alors, quand Pascal Judelewicz est venu me voir avec le scénario de Jappe
loup, je lui ai dit: est-ce que tu te rends compte que si je réalise ce film, je vais devoir faire une croix sur le film que j’ai toujours rêvé de faire sur cette période de ma vie? Finalement, je trouve ça beau que cette histoire qui me touche spécialement devienne mon premier film tourné dans ma langue.»
Présenté jeudi passé en compétition officielle au Festival des films du monde, Jap
peloup: l’étoffe d’un champion s’inspire de l’histoire du cavalier français Pierre Durand et de son petit cheval caractériel Jappeloup, qui ont réussi à défier les pronostics en remportant un titre olympique en 1988, aux Jeux de Séoul.
GUILLAUME CANET
C’est l’acteur français Guillaume Canet, également un ancien cavalier, qui a scénarisé le film et qui prête ses traits au personnage de Pierre Durand.
Daniel Auteuil, Marina Hands et Tchéky Karyo complètent la distribution de cette ambitieuse production tournée en France avec un budget d’environ 40 millions de dollars. Sorti en France plus tôt cette année, Jap
peloup a remporté un beau succès populaire, attirant près de 2 millions de spectateurs dans les salles.
«C’est un film qui me plaît beaucoup, souligne Duguay. Je suis toujours très exigeant avec mes films et celui-ci est un de ceux sur lequel je ne changerais pas grand-chose si j’avais à le refaire.»
«Ce que j’aime particulièrement dans le film, c’est la complicité qu’on voit entre Pierre Durand et son père (joué par Daniel Auteuil). Cette complicité, je l’ai vécue avec mon père et Guillaume aussi l’a vécu avec ses parents. Les mêmes remises en question, les mêmes doutes, les mêmes appréhensions. J’ai vécu à cette époque de ma vie des moments fabuleux avec mon père et ç’a été ce qui m’a nourri tout au long du tournage du film.»
«C’est la raison pour laquelle les scènes de père et fils dans le film sont si fortes. Le réalisateur et l’acteur du film avaient déjà vécu des choses semblables avec leurs pères respectifs.»
COMPLICES QUÉBÉCOIS
Comme il le fait souvent, Christian Duguay a tenu à amener avec lui dans l’aventure Jappeloup quelques complices québécois, dont la productrice Lyse Lafontaine (qui a coproduit le film) et le directeur photo Ronald Plante.
«Ronald a un grand talent. Il a dans son éclairage une simplicité et une belle subtilité. Et en plus, il a, en lui, une grande humanité. La complicité qu’il y avait entre lui et moi a eu un effet domino sur le reste de l’équipe. Il a amené un côté familial à l’aventure. Je dois dire d’ailleurs que je me suis senti chez moi sur ce plateau de tournage. Je n’ai jamais senti que j’étais le réalisateur québécois qui allait faire un film en France.»
Si le tournage a eu lieu en France, les effets spéciaux du film ont été conçus au Québec par la société Hybride.
«Un des grands défis techniques du film était de sentir l’authenticité des Jeux olympiques et des grandes foules, explique Duguay. Je voulais qu’on vive ce que c’est d’aller aux Jeux olympiques.»
Après avoir tourné à Hollywood au début de sa carrière ( The Art of War, The Assign
ment), Christian Duguay a souvent mis son expertise au service de grandes séries historiques tournées en Europe ces dernières années ( Hitler, Jeanne d’Arc, Coco Chanel).
«Je vais là où les beaux projets m’amènent, dit-il. J’aime les films historiques et je crois que je me débrouille bien avec ce genre de productions. Ça tombe que mes opportunités viennent plus d’ailleurs que d’ici. Mais ça ne change rien au fait que je suis entêté. J’écris depuis plus de six ans un film sur l’histoire du travailleur humanitaire québécois Marc Vachon et je sais que le film va se faire un jour et que ce sera le film de ma carrière. Les films qui nous passionnent sont souvent longs à monter. Alors je suis patient.»
√ Jappeloup prend l’affiche le vendredi 6 septembre.