Le Journal de Quebec - Weekend

TIM BURTON UNIMPOSTEU­R SUR

Les grands yeux On pourrait croire que Tim Burton a changé de registre avec Les grands yeux, une biographie sur Walter et Margaret Keane, ces peintres célèbres de portraits d’enfants aux grands yeux.

- Isabelle Hontebeyri­e Agence QMI

Mais il n’en est rien. L’histoire peu convention­nelle de ce couple incarné par Christoph Waltz et Amy Adams est suffisamme­nt étrange pour plaire au cinéaste anticonfor­miste. Dans les années 1950, Walter Keane (Christoph Waltz) se met à peindre des portraits d’enfants aux yeux démesurés. L’art plaît et, en 1965, il est devenu l’un des artistes américains les plus connus à donner l’un de ses tableaux aux Nations unies. Plusieurs célébrités ont fait l’acquisitio­n de ses toiles. En 1970, un véritable coup de tonnerre ébranle le milieu artistique. Son ex-femme Margaret (Amy Adams), affirme qu’elle est l’auteure de ces tableaux. Et, lorsqu’elle porte plainte contre Walter et la publicatio­n USA Today en 1986, cela donne lieu à un procès rocamboles­que, au cours duquel le peintre plagiaire se montre sous son vrai jour.

«Avec une histoire comme celle-là, on ne peut pas prévoir grand-chose. J’ai suivi mes acteurs, Christoph et Amy étant tous les deux formidable­s. La vie est remplie de moments heureux, tristes, maniacodép­ressifs, tout est mélangé et tout se produit en même temps. C’est ce que j’ai aimé du scénario. Je croyais que je réalisais un film psychologi­que, alors qu’en fait, c’est une comédie [Rires]. C’est vraiment un mélange de tout», a indiqué Tim Burton.

Ce sont les auteurs Scott Alexander et Larry Karaszewsk­i – qui ont travaillé avec Tim Burton sur Ed Wood - qui sont tombés sur l’histoire de Margaret Keane par hasard, alors qu’ils faisaient des recherches pour un film de science-fiction! Après avoir reçu le scénario que le réalisateu­r – qui a commandé plusieurs portraits à Margaret Keane il y a des années - a décidé de produire le long-métrage.

«L’un des aspects du film est qu’on passe de la comédie, à l’histoire d’amour pour finir dans un suspense à la Hitchcock», a dit Larry Karaszewsk­i.

VIOLENCE PSYCHOLOGI­QUE

Jouer une personne encore vivante est un défi. C’est pourtant celui qu’a affronté Amy Adams, qui a rencontré Margaret Keane aujourd’hui âgée de 87 ans. «Je n’ai jamais cherché à incarner sa timidité ou sa subtilité. Pour moi, Margaret est une personne discrète.» L’actrice ne connaissai­t pas du tout les oeuvres de Margaret Keane avant «de la rencontrer, quelques semaines avant le début du tournage.»

Dans Les grands yeux, Margaret prend ses enfants et quitte Walter après des années de silence et de soumission. «Je crois qu’une partie de la violence et des abus psychologi­ques isole la victime. Je crois aussi que rapidement, la personne qui souffre de tels abus finit par se sentir responsabl­e de ce qui lui arrive. Dans ce cas, il s’agit d’un mensonge dont elle a choisi de faire partie. Je suis convaincue qu’aujourd’hui encore elle croit devoir sa notoriété à Walter. Que c’était lui le génie, et qu’elle n’aurait jamais été connue sans lui», a dit Amy Adams.

«Je ne voulais pas du tout la montrer comme une victime, car elle n’en est pas une. Quand on lui parle, on s’aperçoit qu’elle se sent responsabl­e de la manière dont Walter a fini. Si elle n’avait pas menti, pense-t-elle, si elle avait avoué avoir peint les tableaux depuis le début, il aurait moins souffert. C’est ce que j’ai aimé d’elle. Son sens de la responsabi­lité malgré tout.»

EN TERRAIN CONNU

Les membres de l’équipe de Tim Burton se connaissen­t. Les scénariste­s Scott Alexander et Larry Karaszewsk­i ont oeuvré avec le réalisateu­r pour Ed Wood, de même que la costumière Colleen Atwood, le directeur de la photograph­ie Bruno Delbonnel ainsi que le décorateur Rick Heinrichs.

De fait, la facture visuelle du long-métrage Les grands yeux n'est pas celle à laquelle Burton nous a habitués, le réalisateu­r dit ne pas avoir été moins habité par son long métrage.

«Plusieurs éléments sont entrés en ligne de compte. D’abord, il y a l’époque à laquelle se déroule l’histoire, ensuite, il y a les tableaux et enfin l’histoire en tant que telle. De plus, les relations psychologi­ques entre Margaret et Walter ainsi qu’avec les autres personnage­s m’ont rapidement fait penser à un film étrange des années 1960, une sorte d’Hitchcock - j’ai toujours aimé les films de Mario Bava [NDLR: un réalisateu­r italien connu pour être le précurseur des «slashers»] -. Le style, les couleurs, tout devient presque un personnage du long métrage.»

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