Le Journal de Quebec - Weekend
ICI COMME AILLEURS?
Certaines téléséries sont indissociables du lieu où elles se déroulent. Lance et compte est intrinsèquement liée à Québec, par exemple. Les Bougon? Le quartier Ville-Émard à Montréal. La vie, la vie? Le Plateau-Mont-Royal, bien entendu! Et quiconque pense
Certes, l’action de plusieurs séries québécoises se situe à Montréal, mais chacune des 17 régions administratives du Québec peut se vanter d’avoir été représentée au petit écran.
Après avoir localisé les péripéties des séries des 50 dernières années, force est d’admettre que certains coins du Québec ont inspiré moins de scénaristes que d’autres, à commencer par le Saguenay-Lac-Saint-Jean. Rares, très rares sont les auteurs qui – au fil du temps – ont choisi de camper leur histoire au royaume du maire Jean Tremblay. Alma a obtenu les faveurs des créateurs de Série noire, mais c’est à peu près tout.
Et si les Chick’n Swell n’avaient jamais signé de série humoristique basée à Victoriaville, le Centre-du-Québec se sentirait plutôt délaissé. «On parle de ce qu’on connaît bien, indique Anne Boyer, coauteure avec Michel D’Astous de Yamaska, 2 frères, Les poupées russes, Le gentleman, Nos étés et Tabou. Pour Yamaska, on a choisi Granby parce qu’on habite dans le coin. On connaît les enjeux, les gens… Je me verrais mal parler de l’Abitibi!» Autre bel exemple d’auteur ayant dépeint sa région à l’écran: Victor Lévy-Beaulieu. Avec des téléromans comme L’héritage et Bouscotte, l’écrivain et dramaturge originaire du Bas-Saint-Laurent a «beaucoup fait pour sa région», souligne le directeur des dramatiques de Radio-Canada, André Béraud.
LES DIFFICULTÉS DE FILMER EN RÉGION
Rejoindre les téléspectateurs partout au Québec demeure une priorité, mais pour choisir une série à mettre en ondes, les réseaux examinent en premier lieu le scénario. «C’est l’histoire qui prime», déclare André Béraud.
Les diffuseurs cherchent bien évidemment à présenter des grilles horaires équilibrées, au sein desquelles les régions sont bien représentées, mais en raison du fléchissement des budgets accordés aux dramatiques, il est de plus en plus difficile de tourner des fictions loin de Montréal et ses environs. Car filmer en région engendre des coûts supplémentaires.
Il existe toutefois des solutions pour contourner certains problèmes de budget. Yamaska, par exemple, est tournée en grande partie en studio à TVA, mais Anne Boyer et Michel D’Astous prévoient quelques blocs de tournage sur place, à Granby.
Même les Américains, dont les productions sont dotées de budgets beaucoup plus élevés qu’au Québec, fonctionnent ainsi. La plupart des séries sont filmées à Los Angeles, New York et Vancouver, mais on prévoit quelques journées de tournage prévues en location pour ajouter une touche de réalisme.
C’est de cette façon que fonctionnent les producteurs de The Good Wife, une série judiciaire dont chacune des intrigues est étroitement liée à Chicago, mais qui est majoritairement filmée à New York. Seules quelques scènes clés sont tournées sur place, dans «la ville des vents».
House of Cards, dont l’histoire se passe à Washington, utilise aussi ce procédé.
VILLES FICTIVES
Parfois, les auteurs de feuilletons inventent carrément des noms de villes pour situer leurs intrigues. C’est la recette suivie par Danielle Trottier dans Unité 9. La municipalité de Lietteville a beau être un personnage central du populaire drame carcéral, elle n’a jamais existé. On pourrait toutefois la situer dans Lanaudière, puisque la prison dans laquelle Marie et compagnie passent leurs journées est fortement inspirée du pénitencier pour femmes de Joliette. Pour sa part, François Avard ( Les Bougon, c’est aussi ça la vie!) avait situé l’action de Bob Gratton, ma vie, my life à Lachenoeil.
«C’était un amalgame de Longueuil et Lachenaie, révèle l’auteur. C’était un endroit imaginaire qui était 450, mais qui ne prenait pas parti entre la Rive-Sud et la Rive-Nord de Montréal.»
Chez nos voisins américains, les créateurs de Buffy the Vampire Slayer et Gilmore Girls ont employé la même méthode. La tueuse de vampires résidait à Sunnydale, une ville fictive en Californie, tandis que Lorelai et Rory Gilmore habitaient à Stars Hollow, un charmant petit village du Connecticut fabriqué de toutes pièces.
SÉRIES IMPOSSIBLES À SITUER
Enfin, il existe des séries sans position précise. L’automne dernier, c’était entre autres le cas de Pour Sarah, mentionne Ginette Viens, vice-présidente marques et contenus de Québecor contenu.
«On sentait que c’était en banlieue, mais ça aurait pu être n’importe où, indique Mme Viens. On avait choisi un endroit neutre pour toucher le maximum de gens.»