Le Journal de Quebec - Weekend
HAÏTI EN «TOUT COMPRIS»?
CÔTE-DES-ARCADINS, Haïti | Les lève-tôt flânent sous les parasols, les gourmands se resservent au buffet, le soleil fait scintiller la mer… La scène vous rappelle un matin à Cayo Coco, Punta Cana ou Cancún? Surprise! Vous êtes à Haïti.
Le premier hôtel tout-inclus du pays, le Royal Decameron Indigo Beach Resort and Spa, a ouvert ses portes en décembre 2015, sur la côte des Arcadins, à environ 70 km de la capitale Port-au-Prince.
Le nouvel hôtel est installé dans l’ancien Club Indigo, qui avait luimême pris la place du Club Med, une destination vacances populaire auprès des Québécois dans les années 1980.
Pour lui donner un coup de jeune et le hisser au niveau des standards internationaux, la chaîne Decameron y a investi 15 millions $ US. Nouvelle réception décorée avec des oeuvres d’art haïtiennes, petits balcons flambant neufs et salles de bain revampées pour chacune des 438 chambres, ajout d’une piscine et de restaurants ne sont quelques-unes des améliorations apportées.
L’un des plus gros atouts de l’hôtel était toutefois déjà là: l’omniprésence de la mer. En effet, le Royal Decameron longe la plage sur une distance 1,5 km et tout est construit parallèlement aux eaux claires du golfe de la Gonâve. Son autre atout a toujours été là, lui aussi: les beautés méconnues d’Haïti.
UNE IMAGE À CHANGER
Depuis cinq ans, le gouvernement haïtien multiplie les efforts pour remettre «la perle des Antilles» sur l’itinéraire des voyageurs et changer l’image du pays, dont on ne connaît souvent que les problèmes, nombreux et fortement médiatisés.
«On a tant à offrir, on a tant à montrer», assure la ministre du Tourisme Stéphanie Balmir Villedrouin, rencontrée au cours de ce voyage à la mi-février. «Je dis toujours: Haïti a les mêmes plages que la République dominicaine, les mêmes cascades que Cuba et la Jamaïque, mais notre valeur ajoutée, c’est sans aucun doute notre culture.»
Le mystérieux culte vaudou, qui fait partie de la vie de millions d’habitants; les couleurs éclatantes de l’art haïtien, dont on orne aussi les bus et les tap-tap (taxis collectifs); la gastronomie, que l’on déguste sous forme de cabri, de griot, de langoustes, de «bananes pesées» ou de «pain patate»; l’histoire tumultueuse d’«Ayiti», première colonie des Caraïbes à s’être libérée de l’esclavage à la fin du 18e siècle… Autant de pôles d’intérêt pour les touristes.
PAR MORNES ET PAR VAUX
Ceux qui logent sur la côte des Arcadins ont accès à plusieurs excursions d’une demi-journée pour découvrir les villages et les mornes (ou monts) de la région.
Parmi celles-ci: une randonnée de huit kilomètres jusqu’à Kay Piat. Accompagnés de guides locaux, on grimpe au milieu des bananiers, des arbres à pain (dits «arbres véritables») et des manguiers, croisant quelques villages et rencontrant beaucoup d’enfants. Au sommet, une halte au coeur d’une plantation de cresson permet de se rafraîchir dans des bassins d’eau de source.
Une seconde excursion propose plutôt une promenade sur les chemins de Montrouis, avec arrêt dans un marché de la ville, une promenade guidée dans la campagne et une petite incursion dans l’univers du vaudou haïtien. Celle-ci consiste à visiter une résidence privée où l’on peut voir des autels consacrés à cette religion venue d’Afrique. La sortie se conclut par la visite du musée OgierFombrun, installé dans une ancienne sucrerie, qui retrace l’histoire d’Haïti, de l’esclavage et de son abolition. Les quelques instruments de torture qui y sont exposés donnent froid dans le dos…
On peut aussi voguer sur les eaux translucides de l’Anse-à-Galets, aux abords de l’île de la Gonâve, au large du complexe hôtelier. Le jour de notre visite, l’eau était si claire et le sable si blanc que l’on pouvait voir les étoiles de mer depuis le bateau.
LE RETOUR DES TOURISTES
Située entre la mer et les montagnes, la côte des Arcadins est parfois décrite comme le secret le mieux gardé des Caraïbes. Elle ne compte pour le moment qu’une poignée d’hôtels et le Royal Decameron est le seul à offrir (avec Transat) la formule tout-inclus si chère aux voyageurs de la Belle Province
Au cours de notre séjour, l’hôtel accueillait environ 80 vacanciers québécois, et davantage de touristes français, les uns sirotant des bières Prestige au bar, les autres profitant de la plage, des piscines ou de l’animation. L’arrivée d’une marque établie comme Decameron annoncet-elle le retour des vacanciers en Haïti? C’est ce que souhaite en tout cas la ministre du Tourisme. «Il n’y a rien comme un touriste qui est là, qui est content, pour convaincre un autre touriste.»