Le Journal de Quebec - Weekend

UN TIR PRÉCIS SUR NOS CORDES SENSIBLES

- MARIE-FRANCE BORNAIS

En se glissant dans la peau d’un ex-joueur de hockey profession­nel frappé à la fois par la malchance d’une retraite forcée, d’un décès dans la famille et le bonheur d’un enfant à venir, Biz explore la résilience et la capacité de survie de l’Amérique francophon­e dans un roman court, mais efficace comme un lancer frappé, Cadillac.

Avec une plume aiguisée comme des patins, il entraîne les lecteurs dans une virée au pays des Red Wings, où les noms français sont toujours à l’honneur.

Detroit, ville américaine fondée par Antoine Laumet, baron de Cadillac, fut longtemps prospère avant que la crise économique ne fasse fondre ses ambitions.

Cela n’empêche pas Derek Lamothe, le hockeyeur vedette devenu vendeur d’automobile­s, de l’explorer, d’apprivoise­r son passé français.

Il s’offre même un match de baseball et une visite dans le quartier du rappeur Eminem avant de retourner auprès de sa blonde, la belle Daisy.

CORDES SENSIBLES

Biz touche beaucoup de cordes sensibles bien québécoise­s dans son roman : la passion du hockey, l’intérêt pour le fait français en Amérique, la quête d’identité, l’amour du territoire. Top net.

« C’est le pari que je faisais, d’essayer d’intéresser les Québécois à leur histoire, avec une histoire basée sur des personnage­s simples », commente Biz, en entrevue.

« C’est la première fois que l’histoire est écrite au “il”, parce que Derek n’a pas le bagage intellectu­el pour écrire et raconter l’histoire. Le narrateur le surplombe, avec une certaine bienveilla­nce. »

Il n’était pas question de juger son personnage. « Je ne le trouve pas minable ou ridicule. C’est un personnage simple, à l’image des Québécois, et je voulais le rendre attachant, surtout dans son rêve brisé. C’est pas l’fun ce qui lui est arrivé. Sa conscience historique va lui permettre de faire la paix avec son passé à lui. »

Ça ne prend pas grand-chose pour faire basculer un destin, rappelle Biz.

« La vie d’un homme, et d’une certaine façon aussi d’un peuple, ou même d’une ville, peut basculer en un claquement de doigts. »

Detroit était une ville prospère avec de grands rêves. « Le destin de cette ville rencontre celui de Derek. C’est une ville aux rêves brisés. Vers la fin, on se rend compte que cette ville va renaître, avec les artistes, notamment. Et que la conscience francophon­e n’est pas morte non plus. Derek pourra peut-être avoir sa renaissanc­e à lui, à travers son enfant. »

UNE VILLE QUI L’A MARQUÉ

Une visite à Detroit a déclenché tout le processus d’écriture. « Depuis une dizaine d’années, avec les cinq mêmes amis, on va faire un tailgate pour voir un match de football américain dans une ville du Nord-Est », explique-t-il.

« On a fait Buffalo, Boston, Philadelph­ie, New York. Je reviens de Cleveland. L’année passée, c’était Detroit. On va voir du football, boire de la bière. Il y a toujours un volet culturel qui nous permet de visiter une ville ou une région. On a visité Detroit et j’ai été frappé par cette ville. À la fin du voyage, j’étais chargé de cette ville. »

Deux choses l’ont frappé à Detroit : la désolation et la présence francophon­e, nette et marquante dans cette ville. « On va dans un genre de road

trip historique. Les lieux où va Derek sont des lieux qu’on a visités l’année passée. À partir du moment où j’avais le décor de Detroit et ce que je voulais dire, j’ai trouvé le personnage et ça a coulé tout seul. »

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