Le Journal de Quebec - Weekend
« LES ÉTATS-UNIS SONT DEVENUS FOUS ET NOUS NE SAVONS PAS POURQUOI » – ADAM MCKAY
Créateur du personnage de Ron Burgundy, incarné par Will Ferrell, Adam McKay a fait carrière dans la comédie. Mais depuis Le casse du siècle, sorti en 2015, le réalisateur et scénariste a changé son fusil d’épaule, abordant désormais des thématiques politiques et sociales. Avec Vice mettant en vedette Christian Bale en Dick Cheney, Adam McKay s’attaque à la politique américaine…
Si Vice est un film biographique – on y suit l’évolution de Dick Cheney (Christian Bale) depuis les années 1950 –, la construction scénaristique a de quoi étonner. Retours dans le temps, images d’archives, passage du quatrième mur ou scène de délire shakespearien ne sont que quelques-unes des surprises qui attendent le spectateur.
« Pour moi, Vice n’est pas une comédie à proprement parler, nous avons eu de longues discussions à ce sujet », indique Adam McKay lors d’une entrevue à bâtons rompus avec l’Agence QMI. Mêmeme si son long métrage – grand favori des Golden Globes avec six citations – a été nommé dans la catégorie comédie ou comédie musicale, il souligne « préfére[r] le mot tragédie. Car la tragédie peut être à la fois comique et dramatique. Oui, Vice contient des moments très drôles, mais aussi des moments sombres. »
TOUT SAVOIR DE L’HOMME
« Les meilleurs films sont généralement faits quand, au départ, on n’a pas l’intention de les faire », dit-il de son processus créatif. Adam McKay a commencé, bien innocemment, à lire des ouvrages sur Dick Cheney par intérêt personnel. « J’ai eu l’idée d’écrire le scénario au quatrième ouvrage. C’est à ce moment que j’ai réalisé que son histoire était énorme. C’est en lisant l’autobiographie de Lynne Cheney que j’ai su. C’est là que j’ai appelé mes producteurs pour leur dire que je tenais un film. »
Après de très nombreuses lectures et des recherches importantes – le scénario a d’ailleurs été vérifié par des journalistes et des avocats afin d’éviter toute poursuite judiciaire –, Adam McKay s’est demandé jusqu’où il irait.
« C’était complexe. Je voulais que le public soit réceptif au film et, dans le même temps, je trouvais important de montrer à quel point la torture était horrifiante. Je ne voulais pas du tout qu’elle ait l’air assainie, et je tenais aussi à respecter les personnes qui en avaient souffert. Cela a vraiment été un exercice d’ équilibriste. »
DONN NER VIE À CHENEY
Enn écrivant le scénario, Adam McKay n’a pensé qu’à un seul acteur : Christian Bale, qui a d’ailleurs pris 20 kilos pour ce rôle. « Oui, il a eu un peu besoin que je le convainque d’accepter. Sa préoccupation principale était la transformation physique. Il savait que si cet aspect ne fonctionnait pas, le film ne marcherait pas. » « Un jour, pendant l’un des tests de maquillage avec le grand Greg Cannom, il est sorti et j’ai été abasourdi de constater que Dick Cheney était devant moi. » Quand on lui demande les raisons pour lesquelles il a souhaité faire ce long métrage, il répond : « Je voulais comprendre comment il est devenu ce qu’il est. En lisant à son sujet, je me suis aperçu qu’il n’avait pas toujours été méchant. C’était un enfant comme les autres. Je me suis donc demandé comment il avait fait pour devenir Dick Cheney! Et d’une manière plus générale, je voulais également comprendre comment l’Amérique s’était fourvoyée dans cette voie. »