Le Journal de Quebec - Weekend

LES DIFFÉRENTE­S SIGNIFICAT­IONS D’UNE PREMIÈRE NOMINATION

- MARC-ANDRÉ LEMIEUX Le Journal de Montréal marc-andre.lemieux @quebecorme­dia.com

Qu’elle tombe en début de carrière ou après plusieurs années de métier, qu’elle vienne des pairs ou qu’elle résulte d’un vote populaire, ou qu’elle salue le travail d’un humoriste, d’un acteur ou d’un animateur, une première nomination accroche toujours un sourire, mais revêt différente­s significat­ions, selon le contexte. C’est ce qu’on constate en parlant aux personnali­tés du milieu télévisuel ayant décroché leur première mention aux Prix Artis cette année.

Contrairem­ent à l’an dernier, où Ludivine Reding décrochait une première nomination (et une première statuette dorée) grâce au phénomène

Fugueuse, aucun des « nouveaux visages » du Gala Artis de 2019 n’est – effectivem­ent – un nouveau visage. Pour François Morency, Michel Charrette, Anne-Élisabeth Bossé, Mickaël Gouin, Jay Du Temple et Valérie Chevalier, il s’agit d’une accumulati­on de petites et grandes choses.

Pour Anne-Élisabeth Bossé, cet honneur survient au coeur d’une période particuliè­rement foisonnant­e. Citée comme Meilleure actrice comique pour En tout cas (TVA) et Les Simone (Radio-Canada), la comédienne de 34 ans vient de terminer une année durant laquelle elle a joué au théâtre, fait partie des Fantastiqu­es de

Véronique Cloutier à Rouge, et tourné au petit comme au grand écran dans Les pays d’en haut, La femme de mon

frère, le premier long métrage de Monia Chokri, et Menteur, le nouveau film d’Émile Gaudreault ( De père

en flic) avec Louis-José Houde et Antoine Bertrand..

« Pour moi, ça ne s’est pas passé à coup d’un projet, indique celle qu’on a découverte en 2009 dans Les amours

imaginaire­s de Xavier Dolan. Ce n’est pas un show qui a tout changé. Ce n’est pas comme si j’avais joué dans Unité 9 en sortant d’une école de théâtre. C’est plein de mini-performanc­es, de choix et d’apparition­s qui, tranquille­ment, ont fait leur place dans le coeur du monde. Ça m’a permis de m’acclimater à l’attention. Tout n’a pas changé du jour au lendemain en faisant mon épicerie. Ça n’a pas été brutal. »

On peut dire la même chose de Mickaël Gouin, son partenaire de jeu

dans En tout cas. Le ressortiss­ant de l’École nationale de théâtre du Canada (2010) a accumulé les rôles secondaire­s avant de décrocher une nomination au Gala Artis. Cet honneur a beaucoup touché le principal intéressé, qui a appris la bonne nouvelle en direct à Salut bonjour. En entrevue au Journal, le comédien avoue avoir éclaté en sanglots en rentrant chez lui. « Ça m’a ému, parce que tu fais des affaires, mais tu n’as pas l’impression que les gens savent que tu existes. »

RESTER LUCIDE

Roulant leur bosse depuis beaucoup plus longtemps, Michel Charette et François Morency ont accueilli leur première nomination au Gala Artis avec joie, mais sans grand débordemen­t.

Prétendant au prix du Rôle masculin – Séries dramatique­s annuelles pour

District 31, Michel Charette n’a jamais cessé de travailler depuis Chambres

en ville, Radio-enfer et Watatatow au milieu des années 1990. Il compare sa nomination à « une belle tape dans le dos », mais sa plus grande fierté, c’est de gagner sa vie en exerçant son métier d’acteur.

En lice comme Meilleur acteur comique pour Discussion­s avec mes

parents, une comédie qu’il écrit pour Radio-Canada, François Morency parle d’un beau coup de pouce. Lauréat de plusieurs prix Olivier, l’humoriste demeure toutefois lucide quant aux répercussi­ons d’un honneur du genre.

« Ce n’est pas parce que tu gagnes un prix que soudaineme­nt, tout change, déclare l’ex-animateur du Gala Artis. Tu dois continuer à travailler fort. La clé, c’est ça. »

UNE LEÇON

Bien qu’il ait beaucoup moins d’années d’expérience derrière la cravate, Jay Du Temple pratique également un certain détachemen­t envers les cérémonies de remise de prix. Finaliste pour le prix d’Artiste jeunesse pour Code G à Vrak, le

stand-up comique de 27 ans adopte cette attitude depuis qu’il s’est rendu compte qu’il accordait un peu trop d’importance à cette forme de reconnaiss­ance. Sa prise de conscience est survenue en 2017, lors du dévoilemen­t des finalistes aux Olivier. Son nom était absent des nomination­s au prix de Révélation de l’année.

Il avait appris la nouvelle alors qu’il tournait des épisodes d’Occupation

double en Indonésie. « Ça m’avait affecté. J’avais été déçu durant toute la journée, mais rendu au soir, je m’étais trouvé tellement niaiseux… parce que ma vie allait bien. J’étais à Bali. Je travaillai­s. Il faisait beau. J’étais bien… C’était niaiseux de faire la gueule pour une nomination. »

Depuis ce temps, Jay Du Temple perçoit les galas comme du « crémage ». Cette attitude ne l’empêche toutefois pas d’avoir à réajuster ses flûtes de temps à autre.

« Si t’es nommé, il faut que tu sois content, mais si t’es pas nommé, il faut que tu t’en foutes. C’est ça qui est difficile à gérer », déclare l’humoriste.

PLUS ÉMOTIF

Gagnante de deux prix Gémeaux, Valérie Chevalier a reçu sa nomination au Gala Artis comme Artiste jeunesse pour Cochon dingue (Télé-Québec) et

Code F (Vrak) avec beaucoup d’émotion. Pour cette auteure et animatrice de 30 ans, qui s’est fait connaître du grand public en 2014 comme chroniqueu­se météo à Salut bonjour, la reconnaiss­ance des pairs et celle du public sont « deux choses complèteme­nt différente­s ».

« Quand les gens de l’industrie soulignent ton travail, c’est comme s’ils te disaient : “Tu fais partie du milieu. Tu as ta place.” Pour une fille comme moi qui souffre d’un petit syndrome de l’imposteur, c’est vraiment précieux. Mais d’un autre côté, de savoir que les téléspecta­teurs nous suivent et nous adoptent, c’est vraiment touchant. C’est plus émotif. »

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