Le Journal de Quebec - Weekend
DRAMATIQUE EXIL
Après s’être intéressée à Catherine de Médicis dans une série précédente, la romancière Christiane Duquette, passionnée d’histoire, s’est penchée sur le destin des Irlandais ayant séjourné à la Grosse-Île dans les années 1800 dans sa nouvelle série, Les Irlandais de Grosse-Île.
Le premier tome, Deuils et espoirs, traite de la famine en Irlande, des conflits qui sévissaient et de l’arrivée de milliers de gens à la Grosse-Île. Située dans le Saint-Laurent, au large de Montmagny, cette île servait de station de quarantaine pour les navires arrivant à Québec. Des milliers de personnes y ont transité, et des milliers y sont mortes aussi, entre autres lors de graves épidémies.
À travers la famille McDoughan, un clan fictif parti de Waterford, en Irlande, Christiane Duquette fait découvrir l’arrivée difficile de milliers de gens d’abord éprouvés par un pays en loques, puis affaiblis par une difficile traversée vers le Nouveau-Monde.
Son histoire débute en 1847 avec l’assassinat du patriarche des McDoughan, député catholique au Parlement britannique. Pour protéger les siens et fuir la famine, Sean, l’aîné de la fratrie et médecin de profession, décide de s’exiler au Bas-Canada avec sa femme, leurs trois enfants et un domestique. Matthew, le fils cadet, choisit plutôt de s’enrôler dans le parti révolutionnaire de la Jeune Irlande. Lors du voyage en mer, Sean constate que le typhus fait des ravages. Le séjour à la Grosse-Île sera un défi de plus pour les McDoughan, en quête d’une meilleure vie.
LOURD PASSÉ DE L’ÎLE
Une première visite à la Grosse-Île a beaucoup inspiré Christiane Duquette, qui s’est laissée porter par l’atmosphère mystérieuse de l’île et son lourd passé. Elle y est retournée à plusieurs reprises. « J’ai été impressionnée par l’histoire de ce lieu, par la misère, par l’histoire des Irlandais et leur exode », commente la romancière, qui habite à Québec depuis trois ans.
« L’année 1847 a été marquante parce que c’est à ce moment qu’il y a eu 5000 morts, à cause du typhus. Il y a des artefacts de l’été 1847 dans les lazarets de la Grosse-Île. On peut voir les messages gravés au couteau sur les murs de bois », note-t-elle.
Christiane Duquette n’a pas d’ancêtre irlandais – ce qui est le cas pour des milliers de Québécois –, mais l’histoire de ces gens l’a profondément émue. À la différence de ses romans précédents, où les personnages historiques avaient réellement existé, il lui a fallu inventer
EN IRLANDE
Christiane Duquette s’est documentée sur l’histoire de l’Irlande, le contexte sociopolitique, les tensions qui existaient, pour bien asseoir son roman. « Avec la recherche, j’ai compris que c’était une espèce d’Holocauste, que l’Angleterre voulait éliminer les Irlandais et s’était servie de la famine. Un million d’Irlandais sont morts à cause de la famine, et un million ont pris le chemin de l’exode. »
Faire revivre l’histoire l’a fascinée. « J’ai utilisé mes souvenirs, mes impressions, mon imagination en lisant des livres, où on ne parle pas beaucoup de la Grosse-Île. J’ai imaginé un quotidien pauvre, avec des morts, avec le typhus, grâce à toutes les images que j’ai vues au musée de la Grosse-Île. »
En écrivant, elle a été très touchée par l’injustice subie par ces immigrants. « Je suis très sensible à l’injustice. Ça vient me chercher, la misère humaine. J’essaie de comprendre comment c’est arrivé. J’ai été émue aussi de la générosité de certaines personnes qui ont adopté des orphelins irlandais et leur ont donné une vie décente, à Québec et à Montréal. »
Christiane Duquette a publié plusieurs autres romans historiques, notamment sur Catherine de Médicis.
Le deuxième tome sortira en février 2020 et le troisième, en août 2020.
La Grosse-Île est aujourd’hui sous la supervision de Parcs Canada. Pour renseignements : pc.gc.ca