Le Journal de Quebec - Weekend
TÉLÉTRAVAIL
AU COEUR… DE LA CRISE
Avec les grands bouleversements liés à la pandémie, les couturières québécoises se sont retrouvées au front à fabriquer des centaines de milliers de masques. La couturière Camille Goyette-Gingras et son équipe ont pu répondre à cette demande grâce à leurs machines à coudre et aux outils du télétravail.
La cofondatrice de la Coop Couturières Pop et ses trois alliées ont dû se montrer très résistantes au stress et revoir de fond en comble leurs façons de faire.
« Avant que ça commence, on était quatre couturières. Là, on est devenues une équipe de gestion de production, explique-t-elle. On faisait des robes d’été et des sacoches avant que tout ça tombe, et on se retrouve à gérer des dizaines et des dizaines de milliers d’unités, si ce ne sont pas des centaines de milliers.
Le quatuor est maintenant à la tête d’une vaste équipe comprenant maintenant 150 couturières à temps plein. Ensemble, elles ont dû retrousser leurs manches.
« Ç’a beaucoup changé notre quotidien, reconnaît-elle. On était des couturières qui pensions rouler nos petites affaires tranquillement et on s’est retrouvées à avoir une belle “gang” de centaines de couturières mobilisées.
CONTRER L’ISOLEMENT
Souvent confinée seule à la maison, chaque couturière a pu briser son isolement en utilisant les réseaux sociaux et les logiciels de communication liés au télétravail.
« Même si on n’est pas sur le même lieu de travail, je pense que c’est ce qu’on a réussi à faire. Ce ne sont plus des couturières seules à la maison, dans leur atelier ; maintenant, elles font partie d’une “gang”. J’ai l’impression qu’on est moins isolées que jamais. Je ne me suis jamais sentie aussi proche de mes collègues couturières qu’en ce moment. »
Certes, la force du nombre a permis la création d’un groupe important et l’élaboration de nouvelles approches.
« On a produit des quantités énormes, explique Camille Goyette-Gingras. Je pense que pour plusieurs secteurs, ç’a résulté en un changement d’attitude. On s’est retrouvé à collaborer avec plein d’entreprises qui, avant, auraient été des compétiteurs. On a ri ensemble, on a tourné ça vers le positif. »
UN HORAIRE STABLE
Malgré la forte demande et les nombreuses commandes qui proviennent des établissements de santé, il n’est pas question d’encourager les heures supplémentaires.
Beaucoup de choses qu’il était possible de faire d’avance, comme des masques déjà pliés, ont été réalisées.
« On prend toutes nos fins de semaine. On aime bien mieux une couturière qui fait son horaire qu’une couturière qui en fait trop, est fatiguée et commet des erreurs. Ce n’est pas aux couturières d’assumer individuellement la responsabilité de ce qui se passe. Quand elles ont des problèmes, on essaie d’engager plus ou de trouver des solutions pour être plus efficaces. »
Dans un contexte exigeant et des responsabilités très importantes, Camille Goyette-Gingras se permet tout de même de rêver.
Comme les choses vont rondement, elle se plaît à espérer la création d’une fédération des coops de couturières.
« On s’amuse à imaginer les choses autrement et jusqu’à maintenant, d’être rêveurs et de voir les choses positivement, ç’a inspiré beaucoup de gens à nous suivre dans nos projets, même s’ils sont bien ambitieux. »