Le Journal de Quebec - Weekend
SI JEUNE, DÉJÀ RADICALISÉ
∫ Le jeune Ahmed Un film de Jean-Pierre et Luc Dardenne Avec Idir Ben Addi, Olivier Bonnaud et Myriem Akheddiou. À l’affiche à Montréal et à Québec. Même s’il a été presque évacué de l’actualité, le fanatisme religieux et ses dérives demeurent un sujet délicat que les frères Jean-Pierre et Luc Dardenne, porte-étendard du cinéma social belge, ramènent à l’avant-plan avec leur habituel et toujours admirable souci d’authenticité, dans Le jeune Ahmed.
Toute la recherche documentaire qui précède le tournage de chacun des films des frères Dardenne rend d’ailleurs ce portrait d’un jeune Arabo-Belge de 13 ans qui sombre dans l’islamisme radical, récompensé par un prix de la mise en scène à Cannes, en 2019, encore plus choquant.
Difficile, en effet, de demeurer impassible face aux gestes et aux paroles de ce gamin, à peine sorti de l’enfance, qui épouse les interprétations rigoristes et misogynes du Coran que lui transmet un imam intégriste.
Élevé dans une famille musulmane pourtant moderne et tolérante, Ahmed critique leurs comportements et refuse de serrer la main de son éducatrice, cette impure partisane d’un islam d’ouverture et qu’il tentera de tuer sans succès.
Ce geste le conduira dans un centre pour jeunes radicalisés où, au moyen notamment de travaux dans une ferme, des intervenants tenteront avec bienveillance de le sortir du fanatisme dans lequel il s’est enfermé.
QUESTIONS SANS RÉPONSES
À cet égard, le scénario des Dardenne pose davantage de questions qu’il n’ose de réponses. Quand on retrouve Ahmed, il est déjà sous l’emprise de l’imam Youssef et repousse toutes les mains tendues dans sa direction, même si l’amour inconditionnel de sa mère et les yeux doux d’une jeune adolescente rencontrée au centre testent rudement son intransigeance.
Comment en est-il arrivé là? À chaque spectateur, son interprétation.
Sorti de nulle part comme plusieurs acteurs de la filmographie des cinéastes belges, le jeune Idir Ben Addi se glisse avec justesse dans la peau d’un adolescent inflexible, presque froid par moments, au centre de toutes les scènes.
À ses côtés, Myriem Akheddiou (éducatrice) et Claire Bodson (maman) rendent avec brio et émotion la détresse de leurs personnages.
Sans être le plus percutant de la filmographie des cinéastes qui comptent deux Palmes d’or à leur actif, Le jeune Ahmed devait néanmoins satisfaire leurs admirateurs après l’accueil mitigé inédit reçu par leur film précédent, La fille inconnue.