Le Journal de Quebec - Weekend
EN SOLO, MAIS PAS SI LOIN D’ARCADE FIRE
Si on faisait un test à l’aveugle comme dans les publicités télé d’antan et qu’on demandait à un auditeur de dire de quel groupe populaire fait partie le musicien derrière l’album Generations, le nom d’Arcade Fire sortirait sûrement à plusieurs reprises.
Encore plus que son premier album solo (Policy, en 2015), la nouvelle collection de chansons hors-Arcade Fire de Will Butler, le gars qui saute partout durant les concerts du collectif montréalais, ne dévie pas tellement de son ADN musical.
La voix, qui rappelle indéniablement celle de son frère Win, une montée dramatique ici, une guitare nerveuse là : si Will Butler a tenté de se distancier d’Arcade Fire sur Generations, il a échoué lamentablement. Il éclate de rire dans son téléphone portable quand on lui en fait la remarque, avant de détailler sa vision de la création.
« Mon but, que ce soit en solo ou avec Arcade Fire, est de prendre une chanson et d’en faire la meilleure version possible. Parfois, on entend un peu Arcade Fire, parfois beaucoup plus. L’important est de savoir ce [dont] la chanson et l’album ont besoin et de traiter le tout avec respect. Tu sais, c’est mystérieux d’où vient la musique. »
ÇA RESTE DANS LA FAMILLE
La musique reste une affaire de famille chez les Butler. Sauf qu’au lieu de son frère Win, c’est son épouse Jenny Shore et sa belle-soeur Julie qui lui prêtent main-forte sur Generations. Julie est responsable des claviers, Jenny joue quelques notes de synthétiseur, les deux fournissent des choeurs.
Pourquoi aller chercher ailleurs quand des gens talentueux sont à portée de main ? se dit le cadet des Butler. « Mon voisin est un bon joueur de violon, alors je lui ai dit : viens jouer du violon. »
Les liens étroits qui les unissent créent une intimité qui s’entend sur le produit final, croit Will Butler.
« On peut sentir la connexion, notamment au niveau du chant. Ce serait plus difficile à accomplir si ce n’était que des gens que j’ai engagés. »
PESSIMISME
Sans que ce soit voulu, puisque l’album est le fruit d’un travail de longue haleine, les chansons de
Generations sont bâties sur un questionnement, un doute, voire un pessimisme qui colle parfaitement à la période trouble que nous traversons.
La frénétique Bethlehem est d’ailleurs née, dit-il, de ses désillusions après l’élection de Donald Trump.
Les premières lignes de Close My Eyes ne sont guère plus jojo. « Je suis fatigué d’attendre des jours meilleurs. Je suis las, je suis paresseux et rien ne va changer. »
Plus loin, Not Gonna Die a éclos dans l’écho des balles qui ont sifflé lors de l’attentat du Bataclan, à Paris, en 2015.
« C’était effrayant. Pendant un long moment par la suite, on avait ça derrière la tête quand on montait sur scène. »
Ce qui nous amène à lui demander : Coudonc, Will, es-tu un gars optimiste ou pessimiste dans la vie ?
Il laisse passer quelques secondes avant de répondre. « Je ne sais pas », dit-il d’abord en espaçant chaque mot. « Je suis optimiste et je travaille pour quelque chose de mieux. Et je ne suis pas convaincu que ça se produira. »
Generations a été lancé le 25 septembre.
Avec les autres membres du groupe, Will Butler travaille à la création des chansons du sixième album d’Arcade Fire. Aucune date de sortie n’a été annoncée.