Le Journal de Quebec - Weekend
LOUISE MARLEAU DE RETOUR AU THÉÂTRE
Le temps de la webdiffusion de la pièce L’avalée des avalés, au TNM, Louise Marleau renoue avec le personnage de cette mère imaginée par l’auteur québécois Réjean Ducharme, un rôle qu’elle a maintes fois défendu en France.
Madame Marleau, pourquoi avezvous accepté de rejouer la pièce ?
« Car on ne l’avait pas jouée au Québec. »
« Le personnage central est, comme dans le roman, Bérénice. Je joue sa mère et on a un rapport un peu difficile, comme l’est souvent la relation mère-fille. Et j’ai une relation amoureuse avec mon fils ; on ne passe pas à l’acte, mais la mère est amoureuse de son fils et elle néglige certainement sa fille. C’est Bérénice qui nous raconte l’histoire. »
Diriez-vous de la mère qu’elle est compliquée ou complexe ?
« C’est très complexe parce que c’est une femme qui a été abusée à l’âge de 13 ans par l’homme qui l’a épousée, en lui offrant du chocolat et une cigarette. Il l’a épousée un mois après l’avoir rencontrée dans un égout en Tchécoslovaquie, d’où elle vient. Il était juif. C’est une femme qui était consciente du fait que ses frères avaient collaboré avec les nazis – donc elle a rompu avec eux –, et cet hommelà est entré dans sa vie et l’a emmenée vivre au Québec. Ça n’a pas fait un couple heureux. »
Comme on peut le voir sur une vidéo web, ce texte vous colle à la peau. Prenez-vous toujours autant de plaisir à le réciter ?
« Oui, et c’est encore plus vivant. Pour le web, on a enregistré sur la scène du TNM, avec des éclairages incroyables et des prises de caméra. Il y a une caméra fixe qui tourne toute la scène et chaque acteur a une caméra fixe [braquée sur lui]. Si vous avez aimé mon petit enregistrement dans mon salon, c’est de la magie à côté de ça. »
Ça permet au théâtre d’entrer dans les chaumières…
Oui, exactement. Quand j’étais enfant et que je regardais les télé-théâtres, c’est là que j’ai entendu parler des grands auteurs pour la première fois, comme Dostoïevski. Enfant, on a été initiés aux grands auteurs de théâtre par cette télévision qui rentrait chez nous et qui nous amenait la poésie, la littérature, tout. Je trouve que ça manque. Ça fait partie d’une formation culturelle. »
Grâce à la webdiffusion, une nouvelle génération pourra découvrir l’oeuvre. Qu’aimeriez-vous qu’elle retienne de l’histoire ?
« Sa poésie. Et qu’elle découvre Réjean Ducharme, qui est l’un des éternels. Ça ne se démodera pas, ça va toujours rester là. Il est l’un de nos grands poètes et écrivains. »