Le Journal de Quebec - Weekend
DES SÉRIES QUI VONT LOIN
Trois amies qui font l’amour. Des hommes dans la cinquantaine discutant de leur pénis. Une jeune de 16 ans forcée de danser nue... Ces scènes qui pourraient s’apparenter à des films classés XXX se retrouvent dans des séries à heure de grande écoute sur no
Depuis cinq ans, les radiodiffuseurs québécois, Radio-Canada en tête, n’hésitent pas à proposer des émissions au contenu sexuel plus explicite.
Le Journal a relevé une dizaine de séries québécoises qui présentent des dialogues et des scènes à caractère sexuel.
La tendance est à la hausse. « Les radiodiffuseurs n’ont pas le choix. Ils se retrouvent en compétition directe avec Netflix ou HBO qui proposent des séries avec de nouvelles représentations de la sexualité. Si on veut maintenir de bonnes cotes d’écoute, on doit capter l’attention du public », explique Stéfany Boisvert, professeure à l’École des médias de l’UQAM.
SCÈNES ET DIALOGUES PIMENTÉS
Notre télévision publique remporte la palme en la matière. Sur ICI TELE, les soirées se font plus épicées depuis la mise en ondes des séries Sans rendez-vous et Les mecs.
La première, écrite par MarieAndrée Labbé, présente les aléas de professionnels oeuvrant dans une clinique de santé sexuelle et de leurs patients aux prises avec des défis d’ordre sexuel.
Quant à la série Les mecs, écrite par Jacques Davidts, elle donne la parole (souvent crue) à quatre amis cinquantenaires aux idées bien arrêtées, notamment en matière de sexe.
En fait, depuis cinq ans, RadioCanada multiplie les séries qui abordent de front la sexualité. On pense notamment aux séries ChevalSerpent, C’est pour ça que je t’aime, Les Simone et Doute raisonnable.
MOINS PUDIQUE
Radio-Canada va-t-elle trop loin avec sa programmation plus épicée à heure de grande écoute ? Le radiodiffuseur public croit plutôt répondre aux goûts des téléspectateurs.
« Les dramatiques diffusées en heure de grande écoute évoluent au diapason de la société, a expliqué par écrit au Journal la direction de RadioCanada. Cela fait au moins 40 ans qu’elles peuvent comporter à l’occasion des scènes de sexe ou de nudité en conformité avec leur scénario. C’est notamment le cas de la majorité des séries en mode cinéma inaugurées par Lance et compte I en 1986. Lorsque des émissions présentent des scènes ou un langage susceptibles de déranger certains téléspectateurs, elles sont précédées et parsemées des messages d’avertissement appropriés. »
En effet, les radiodiffuseurs sont soumis à des normes de programmation et de diffusion. Les séries plus osées doivent respecter des règles élémentaires : elles sont précédées d’un avertissement parental et doivent être diffusées après 21 h. Et les téléspectateurs suivent. De 800 000 à 860 000 d’entre eux regardent Sans rendez-vous et Les
mecs cet hiver.
Pour Marie-Andrée Labbé, l’autrice de Sans rendez-vous, parler de sexualité répond à une volonté « de voir des séries qui en parle d’une manière moins pudique, moins moralisatrice et plus décomplexée qu’auparavant ».
L’autrice semble avoir vu juste. Selon Radio-Canada, une seule plainte a été déposée concernant le contenu sexuel de la série Sans rendez-vous.
FUGUEUSE
Le réseau TVA n’est pas en reste. En 2018, la série Fugueuse racontait la descente de Fanny, adolescente de 16 ans, dans l’enfer de la prostitution. Les nombreuses scènes de nudité venaient illustrer cette dure réalité. Une scène en particulier, celle du viol de Fanny, fut particulièrement brutale. Si la scène a pu choquer – TVA a dû présenter des excuses publiques à la suite de la diffusion de ce 4e épisode –, elle n’a pas empêché de 1,3 à 1,5 million de téléspectateurs de suivre les épisodes de la première saison de la série.
Outre Fugueuse, la programmation de TVA compte peu d’exemples de séries abordant de front la sexualité.
On préfère y traiter la question par le biais de l’humour. Par exemple,
Les beaux malaises présentent plusieurs scènes cocasses qui mettent notamment en scène la mère septuagénaire de Martin. Dans Les beaux
malaises 2.0, une scène amusante regroupe plusieurs humoristes invités à participer à… une orgie !
Selon TVA, chacune des scènes explicites qu’il présente « respecte à la lettre » les normes du Conseil canadien des normes de la radiotélévision (CCNR). C’est cet organisme indépendant pour les radiodiffuseurs privés canadiens qui établit les normes de programmation que doivent respecter ses membres.
Dernière chaîne de télévision généraliste, Noovo présente cet hiver la série L’homme qui aimait trop, qui relate l’histoire d’un homme ayant non pas deux, mais bien trois femmes dans sa vie. Ses aventures donnent lieu à quelques scènes de sexe plutôt douces, puisqu’elles sont présentées à 20 h.
Noovo n’a pas voulu répondre à nos questions.
Toutes les séries mentionnées sont aussi diffusées sur les plateformes, notamment sur TouTV et Club illico.