Le Journal de Quebec - Weekend

INSPIRÉ PAR LES HAÏKUS JAPONAIS

- MARIE-FRANCE BORNAIS Le Journal de Québec

Inspiré par les haïkus du poète japonais Basho, par ses voyages, par ses souvenirs, par ses questionne­ments et ses constats, Dany Laferrière propose un grand voyage entre les mots et les illustrati­ons dans son nouveau roman, Sur la route avec Basho. Au fil des pages, le lecteur retrouvera avec bonheur ses réflexions profondes et justes, ses traits d’humour, ses illustrati­ons au feutre et à l’encre de toutes les couleurs.

En entrevue par courriel, Dany Laferrière explique que ce qu’il aime le plus dans les haïkus de Bashō, un auteur qu’il a découvert il y a plus de 40 ans, c’est le fait que la brièveté n’exclut pas l’élégance, ni la poésie, ni une certaine lenteur.

« J’aime qu’on ait trouvé une forme qui va avec mon goût de l’observatio­n de choses si minuscules qu’elles semblent invisibles, et ce sens du silence proche de la méditation », précise-t-il.

L’écrivain raconte être tombé sur un livre de Bashō il y a une quarantain­e d’années, chez une amie.

« J’ai eu un choc en le lisant, car c’était la première fois que je lisais quelque chose de ce genre. Il n’y a que Borges qui avait provoqué en moi un pareil bouleverse­ment. Je me suis demandé comment le poète avait fait pour tout mettre dans trois vers brefs. Étant quelqu’un qui aime travailler à son rythme, qui croit que tout est toujours trop surchargé, j’avais la certitude de trouver un maître qui répondait enfin à mes interrogat­ions esthétique­s et poétiques. »

SE FONDRE DANS LE PAYSAGE

En lisant le roman, on a le sentiment de retrouver un écho à l’oeuvre de Bashō, qui créait en s’inspirant des paysages et des scènes de la vie quotidienn­e pour les transposer en poésie. Dany Laferrière dit qu’il avait, cette fois, le goût de partager son goût de la route et du voyage, mais aussi le sentiment de se fondre dans le paysage.

« Mais je ne suis pas Bashō, qui a atteint un sommet dans cette forme. Et contrairem­ent à beaucoup de poètes occidentau­x intéressés par le haïku, je ne cherche ni à imiter Bashō ni à faire des haïkus. Je veux exprimer des sentiments dans une musique personnell­e en utilisant une rythmique particuliè­re. »

Il précise. « Bashō parle d’un paysage naturel, verdoyant, je décris des zones urbaines surpeuplée­s, oppressant­es, et poétiques à leur manière. C’est précisémen­t en prenant un chemin si différent que je me sens proche de Bashō. »

Les textes et les dessins de Dany Laferrière donnent le sentiment au lecteur de l’accompagne­r dans un voyage autour du monde, entre un cocktail à Manhattan et un souvenir de jeunesse dans son pays natal. Les événements, ses impression­s, ses réminiscen­ces, ses lectures, la musique qu’il écoute : tout fait partie de cette odyssée complexe et magnifique.

« Le livre s’est construit au fil de mes émotions et surtout de mes intuitions. C’est ce qui permet aux fulgurance­s de fuser. Des dessins pour accompagne­r les observatio­ns et les réflexions. La forme et le fond se marient très bien, du moins dans ma tête. Après un rapide premier jet, j’ai pu passer un temps plus long au montage. Et là, on désherbe. Il faut enlever jusqu’à atteindre l’os. Il faut faire attention, car le maigre n’est pas toujours une vertu. On doit trouver le moyen de glisser le temps avec tout son poids tragique dans une petite capsule. »

FEUTRE ET ENCRE

Pour ses livres précédents, Dany Laferrière avait mené son exploratio­n avec le feutre. Cette fois, il y a ajouté l’encre, de toutes les couleurs.

« Il faut d’autres ingrédient­s, pas toujours matériels, pour faire un livre. On navigue à vue la plupart du temps, comme un bateau pris dans une tempête. Une vie de poète comme celle de Bashō est une succession de malheurs avec le bonheur de faire plaisir à un lecteur qui n’est pas encore né au moment de l’écriture du poème. »

■ Dany Laferrière est né à Port-auPrince.

■ Il est l’auteur de nombreux livres, dont Je suis un écrivain japonais (2008), L’énigme du retour (2009), Autoportra­it de Paris avec chat (2018) et L’exil vaut le voyage (2020).

■ Son roman L’énigme du retour aété récompensé par le prix Médicis, le Prix des libraires du Québec, le grand prix du livre de Montréal.

■ Il a été élu à l’Académie française en 2013.

■ Il sera au Salon internatio­nal du livre de Québec.

SALON INTERNATIO­NAL DU LIVRE DE QUÉBEC Dany Laferrière en signature

■ le samedi 9 avril de 13 h 30 à 15 h etde16hà18­h

■ le dimanche 10 avril de 11 h à 13 h etde15hà17­h

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PHOTO MARTIN ALARIE
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SUR LA ROUTE AVEC BASHO Dany Laferrière Éditions du Boréal 384 pages

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