Le Journal de Quebec - Weekend

LES COULISSES DU SCANDALE

- MAXIME DEMERS Le Journal de Montréal maxime.demers @quebecorme­dia.com

Tout le monde se souvient de l’affaire Norbourg, l’incroyable scandale financier qui a secoué le Québec au milieu des années 2000. Dans Norbourg, thriller financier inspiré de cette saga, le réalisateu­r Maxime Giroux et le scénariste Simon Lavoie relatent l’ascension et la chute de Vincent Lacroix et d’Éric Asselin, les deux têtes dirigeante­s de cette entreprise qui a soutiré frauduleus­ement 130 millions $ à des milliers de petits épargnants.

En entrevue au Journal, Maxime Giroux et Simon Lavoie s’étonnent encore que personne avant eux n’ait eu l’idée de porter à l’écran ce scandale financier. « Si ça s’était passé aux Étatsdéjà Unis, c’est sûr qu’il y aurait un film ou une série là-dessus, note Maxime Giroux (Félix et Meira). C’est une histoire qui a marqué le Québec. »

Rappelons les faits : en août 2005, près de 9200 épargnants-investisse­urs apprennent avec stupeur qu’ils ont été floués par le bandit à cravate Vincent Lacroix, qui a détourné 130 millions $ de leurs poches alors qu’il était à la tête de Norbourg, son entreprise de gestion de fonds de placement. Plusieurs vies sont brisées. La plupart de ces petits épargnants qui ont investi leurs économies dans Norbourg ne reverront jamais la couleur de leur argent, alors que Vincent Lacroix, lui, purgera moins de trois années des 18 ans auxquels il avait été condamné.

« Avant le scandale Norbourg, on avait l’impression que ces fraudes-là, ça arrivait juste à Wall Street, rappelle Simon Lavoie. Ç’a été comme un coup de poing en plein visage de voir que de jeunes financiers québécois, qui étaient estimés et qu’on voyait à la télé, avaient commis une fraude d’une telle ampleur. Ç’a été une prise de conscience collective de découvrir que ça pouvait se passer chez nous aussi. »

À l’époque, le scandale Norbourg était l’affaire d’un seul homme : Vincent Lacroix, le PDG et fondateur de l’entreprise. Or, ce n’est pas lui le personnage principal du film Norbourg. Le long métrage s’attarde plutôt sur le parcours étonnant d’Éric Asselin (joué par Vincent-Guillaume Otis), le bras droit de Lacroix et grand stratège du détourneme­nt de fonds orchestré par Norbourg. Avec son expérience comme ancien enquêteur à la Commission des valeurs mobilières du Québec (l’ancêtre de l’Autorité des marchés financiers), Asselin a développé un système qui lui permettait de déjouer les enquêtes et vérificati­ons des autorités. Asselin s’est finalement retourné contre Lacroix avant que le scandale éclate, en collaboran­t à l’enquête de la GRC.

« On a décidé de faire d’Éric Asselin le personnage principal de notre film parce qu’il nous fascinait, explique Simon Lavoie. Il avait toujours un coup d’avance sur tout le monde. Il savait exactement comment les enquêteurs allaient penser et comment lui et Lacroix devaient s’y prendre pour déjouer les enquêtes. »

LE VISAGE DES VICTIMES

Si le film se penche surtout sur les agissement­s de Lacroix et Asselin, Simon Lavoie et Maxime Giroux tenaient aussi à inclure dans le récit le triste destin des victimes de cette vaste fraude. Ces victimes sont notamment incarnées par un personnage d’homme à la retraite (joué par Guy Thauvette) qui a investi toutes ses économies dans Norbourg.

« C’était important que le film fasse un contrepoin­t constant avec le sort de ces gens qui vont tout perdre à cause des frasques et du mode de vie de Vincent Lacroix et de ses acolytes », insiste Simon Lavoie.

Vincent Lacroix et Éric Asselin – qui ont refait leur vie – n’ont évidemment pas été consultés pour le film. Pour écrire le scénario, Simon Lavoie s’est basé sur plusieurs livres (dont Autopsie du scandale Norbourg, du journalist­e Yvon Laprade) et articles de journaux, ainsi que sur les verbatim des procès et des interrogat­oires. Comme leur film est avant tout une fiction, ils ont pris quelques libertés dans la façon de raconter cette histoire.

« Il fallait vulgariser le sujet et rendre le film cinématogr­aphique, explique Maxime Giroux. Faire un film qui se déroule entièremen­t dans des bureaux avec des murs beiges, ça n’aurait pas été très intéressan­t. On a pris quelques libertés comme le font souvent les Américains quand ils produisent ce genre de film. Je voulais que Norbourg s’adresse au plus grand public possible. »

Giroux et Lavoie ne s’attendent pas à ce que Vincent Lacroix et Éric Asselin aillent voir le film. « Je pense qu’ils ont plutôt intérêt à garder profil bas, glisse Simon Lavoie. Et on peut dire qu’ils ont été dépeints avec nuance dans le film. On aurait pu y aller de façon plus raide. »

Quant aux petits épargnants qui ont été floués dans cette fraude et qui pourraient être heurtés par le film, le scénariste espère qu’ils attendront d’avoir vu le film avant se faire une opinion : « Je pense que les victimes qui vont aller voir Norbourg vont découvrir le mécanisme de la fraude et comment les autorités financière­s ont échoué à protéger leurs investisse­ments. Le film démontre qu’il faut rester vigilant pour éviter que ce genre de fraude se produise à nouveau. »

Norbourg, à l’affiche le 22 avril.

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NORBOURG
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Le réalisateu­r de Norbourg, Maxime Giroux
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