Le Journal de Quebec - Weekend
L’HEURE DU TEE
Christine Beaulieu, Benoît Gouin, Steve Laplante et Alexandre Goyette sont les héros involontaires de cette fable/huis clos/ mystère/comédie noire, écrite et réalisée par Louis Godbout.
Florence (Christine Beaulieu, royale) est droite, cambrée, vêtue d’une très mini jupette et d’un t-shirt assorti dont le blanc met en valeur son hâle uniforme. Florence est sportive, concentrée, zen. Elle pratique le yoga et se livre à des poses plus ou moins suggestives entre deux trous. C’est elle qui manoeuvre la voiturette, dessine un « om » sur une balle et se livre à différentes observations sur la nature humaine… pardon, masculine.
Son… chum, amant, conjoint – on ne le sait pas trop, la profondeur de leur relation restant en suspens – est, lui, d’orange vêtu. Hubert (Benoît Gouin, merveilleux dans un mélange de condescendance et de certitudes erronées) suinte la misogynie et le paternalisme au point que son « ma chérie » sonne comme une insulte.
Le troisième larron s’appelle André (Steve Laplante, qui ressemble un peu, par ses postures et son visage triste, au personnage de Cameron dans La folle journée de Ferris Bueller). André va mal, il se remet d’on ne sait quoi, fume sur le vert malgré les interdictions et a toutes les peines du monde à manoeuvrer son caddie téléguidé.
Puis Michel (Alexandre Goyette, fantastique en brute inquiétante) se retrouve catapulté au milieu de ce trio dysfonctionnel avec des conséquences inattendues (pour les personnages) et imprévisibles (pour le spectateur).
UN PROPOS FÉROCE ET INTELLIGENT
En ayant choisi de faire des Tricheurs une fable absurde (dans laquelle les marmottes parlent, il faut le préciser), Louis Godbout opte pour un format qui lui permet de faire passer les pires atrocités (la fameuse profession de foi d’Hubert notamment) avec une légèreté estivale. Car, malgré la dureté des dialogues, et de la conclusion – la morale pourrait-on dire avec précaution si l’on osait une comparaison avec les écrits de Jean de La Fontaine –, Les tricheurs possède une légèreté rafraîchissante et un humour presque bon enfant (les leitmotivs visuels y contribuant, comme Florence conduisant la voiturette d’une scène à l’autre) qui nous font réaliser la férocité et l’intelligence du propos une fois sorti de la salle.
Un film de Louis Godbout.
Avec Christine Beaulieu, Benoît Gouin, Steve Laplante et Alexandre Goyette.