Le Journal de Quebec - Weekend
JOYEUSE LEÇON D’INSPIRATION !
Quoi de mieux pour un romancier en panne d’inspiration que de séjourner dans un endroit fait pour lui en redonner ? Et quelle jubilation que de l’y suivre !
Dans Le sanatorium des écrivains, l’intrigue est invraisemblable, les personnages sont folichons, la plume est légère et les références littéraires se glissent partout. Autant dire « que du plaisir » !
Plus on tourne les pages, plus on sourit devant tant d’intelligente espièglerie. Comment ne pas imaginer Suzanne Myre, elle-même auteure prolifique, s’esclaffer en élaborant son intrigue !
L’histoire se déroule de A à Z – oui, au sens littéral puisque chaque lettre de l’alphabet constitue le titre d’un chapitre. Elle met en scène Christian Granger, auteur d’un roman qui a connu un minuscule succès (il a au moins eu droit à une critique !). Depuis, il aimerait bien en pondre un deuxième.
Mais il tourne en rond, au point où sa copine, exaspérée, le quitte. Il lui faut se secouer.
Justement, il tombe sur une petite annonce qui invite les « auteurs désespérés » à s’inscrire à une retraite fermée, dans un sanatorium d’un coin isolé des Laurentides. L’engagement est clair : « ne pas vous laisser sortir de chez nous tant que vous n’aurez pas amorcé votre prochain chef-d’oeuvre ».
Attention danger ? Christian Granger y voit plutôt l’occasion d’enfin arriver à ses fins. Il accepte donc de payer les importants frais exigés et de se rendre à un lieu de rendez-vous d’où, yeux bandés, il sera mené au convoité refuge.
Sur place, il lui faut abandonner son cellulaire et changer de nom en empruntant celui d’un écrivain décédé. Il se donne celui d’Edgar Allan Poe, qui va côtoyer Daphné du Maurier, Sylvie Plath, Gabrielle Roy, Arthur Rimbaud…
Il y a aussi Agatha, mais qui n’ajoute pas Christie parce qu’Agatha est son vrai prénom : elle a le droit de le garder puisqu’elle n’est pas écrivaine, elle ne fait que diriger les ateliers d’écriture !
FAUSSES PISTES ET VRAIES SURPRISES
Les « véritables » écrivains ne sont pourtant pas très crédibles. Sylvia fume du pot à longueur de journée, Daphné est une enquêteuse en mission secrète, Arthur passe ses journées dans les bras amoureux de Katherine Mansfield…
Et Granger est toujours en panne. Mais il se passe assez d’activités au sanatorium pour n’avoir guère le temps de se poser.
À quoi s’ajoutent de curieux événements auxquels Daphné l’oblige à s’intéresser.
Qui sont au juste les employés du sanatorium ? À quoi sert le donjon où s’affichent les portraits d’écrivains-vedettes tels que Dany Laferrière, Patrick Senécal ou Kim Thuy ? Pourquoi l’ombre du célèbre romancier français David Foenkinos plane-t-elle partout ?
Suzanne Myre nous entraîne sur de fausses pistes et de vraies surprises, le tout saupoudré de clins d’oeil tant aux classiques de la littérature qu’aux récits populaires. Pas de snobisme ici, ce n’est pas le genre de l’auteure !
Myre a toujours eu l’écriture ironique et le regard amusé. Cette fois, elle y va à fond et prend bellement en otage nos coeurs de lecteur !