Le Journal de Quebec - Weekend

Jérôme 50 réaffirme son esprit libre

Cinq questions à Éli Laliberté, concepteur, scénariste et coréalisat­eur de Cascadeurs

- ALEXANDRE CAPUTO

« Il y a toute une science derrière le ramassage de canettes, quand tu prends le temps d’observer et de t’informer », note avec un comique intérêt Jérôme 50, auteur de la populaire chanson Tokébakici­tte , en faisant référence à un morceau qui se retrouve sur son nouveau projet.

Si ce sujet semble aussi farfelu qu’intéressan­t à développer, c’est tou tà l’image du chanteur de Québec, intellectu­el et friand des diverses dynamiques sociales de notre province.

Des observatio­ns de la sorte, l’ al bu mAnti géographiq­uement en est rempli.

Que ce soit au sujet de la mort, de notre relation avec la pornograph­ie, ou bien à propos de la dualité entre les mentalités des régions et celles des grandes villes, Jérôme 50 touche à tout avec la précision que seul un étudiant en linguistiq­ue peut avoir.

« Comment veux-tu faire un Québec qui se tient si le monde de région se sent méprisé par les gens de la ville », raisonne-t-il, lors de son entrevue avec Le Journal, en prenant en exemple ses amis qui sont revenus du Festival La Noce, au Saguenay, en critiquant le mode de vie « redneck » des habitants locaux.

Pour son deuxième album en carrière, Jérôme 50 nous ouvre les pages du cahier de notes dans lequel il appose avec humour et intellectu­alité ses observatio­ns quotidienn­es de la vie.

UN ALBUM AU STYLE ÉCLATÉ

Parfois disco, d’autres fois plus acoustique, en se permettant même quelque pas du côté du ska, le premier projet en quatre ans de Jérôme 50 reflète bien son refus d ese faire mettre dans une case.

« Je veux que chaque chanson ait son propre univers », soutient l’artiste de 29 ans, qui spécialise ses études en linguistiq­ue dans la morphologi­e des mots.

« Selon moi, il n’y a rien de plus beau qu’un esprit libre et sans balise de réflexion », ajoute-t-il, en déplorant le fait que les idéologies soient de plus en plus scindées et polarisées dans notre société.

Parlant d’esprit libre, c’est un certain Hubert Lenoir qui a convaincu Jérôme 50 d’ajouter le succès commercial Tokébakici­tte, paru en 2021, à la liste des 18 chansons qui composent cet élan.

« J’hésitais à l’inclure, j’ai demandé à Hubert et il m’a dit pourquoi pas ? Ce serait cool qu’elle soit endisquée », raconte simplement le principal intéressé, encore surpris de la popularité de ce morceau.

« C’est un succès improbable, mais ça m’a prouvé qu’en tant que société, on est capable d’avoir un regard critique sur nousmêmes et d’en rire. »

Le nouvel album de Jérôme 50 est disponible depuis hier et des spectacles de lancement auront lieu à Montréal et à Québec les 16 et 24 novembre.

Lynda Lemay a officielle­ment remporté le pari « le plus fou de [sa] carrière ». À quelques jours de son échéance, elle lance Entre le rêve et le souvenir et Le baiser de l’horizon, les derniers tomes de son projet de lancer 11 albums de 11 chansons chacun en 1111 jours.

Le projet était ambitieux. Casse-cou, même. Car si le commun des mortels se contente de faire un voeu lorsque sa montre affiche 11 h 11, Lynda Lemay a choisi de pousser ce concept à l’extrême.

En novembre 2020, elle se donnait 1111 jours – soit un peu plus de trois ans – pour écrire, composer, enregistre­r et lancer 11 albums comprenant chacun 11 titres. Au total, ce sont donc 121 chansons qu’elle devait livrer en ce laps de temps. L’équivalent, en d’autres mots, d’un répertoire entier.

« Je savais que c’était un projet de fou. Je ne savais juste pas à quel point ! » s’exclame Lynda Lemay en riant.

« J’ai écrit des mots, j’ai composé des mélodies, j’ai joué de la guitare et du piano comme jamais dans les trois dernières années. Mais j’avais la conviction d’avoir tout ce qu’il me fallait à l’intérieur de moi et dans mes cahiers », poursuit-elle.

LIBERTÉ ABSOLUE

Pour y arriver, Lynda Lemay a vite réalisé qu’elle devait s’octroyer une liberté absolue. Délestée des contrainte­s de formats ou structures imposés par les radios commercial­es, la chanteuse n’a suivi que son coeur, sa plume et sa guitare pour façonner chacun des 11 opus lancés depuis 2020. Elle a ainsi pu ratisser aussi large qu’elle le souhaitait, autant dans les genres musicaux préconisés que les sujets abordés.

Il y a les plus légers, racontés dans des chansons qui ont fait sourire ses fans – on pense notamment à Moi les prénoms ou encore Pauvre Mme Potvin – en permettant à Lynda Lemay de montrer le côté givré de sa personnali­té. Mais il y a aussi les plus sombres ou sensibles, où Lynda Lemay aborde de front des thèmes tels que la mort, le deuil, la maladie et la violence.

Ayant elle-même accompagné son père jusqu’à son décès, en 2017, l’écriture a été thérapeuti­que, permettant à la chanteuse de mettre des mots sur ses propres maux.

« J’écris pour comprendre la vie et les émotions. Et si j’écris autant, c’est que j’aimerais tellement tout comprendre, même si je sais qu’il y a des questions qui resteront sans réponses », explique-t-elle.

« Il y a un grand tabou qui entoure la maladie et la mort. Je voulais donc utiliser mes mots pour briser les silences, pour que le laid devienne beau. Le décès de mon père, c’est une épreuve difficile ; je vais continuer à faire mon deuil toute ma vie. Mais l’amour traverse la mort et je sens beaucoup plus sa présence maintenant qu’il est parti », confie-t-elle. C’est d’ailleurs pour cette raison que Lynda Lemay a choisi de dédier le dernier tome de ce projet à l’amour qui unissait ses parents. Celui-ci se reflète dans les titres inédits, mais aussi ceux que la chanteuse a choisi d’offrir en bonus : elle revisite en effet les succès Une mère et Le plus fort c’est mon père, cette fois-ci en version symphoniqu­e, avec l’Orchestre métropolit­ain.

EN TOURNÉE JUSQU’EN 2025

Après avoir lancé autant de nouveaux matériels en si peu de temps, Lynda Lemay veut attendre avant de reprendre le chemin du studio, préférant alimenter et renouveler sa tournée La vie est un conte de fous. Elle est d’ailleurs attendue en France dès ce week-end pour une série de concerts qui la mènera jusqu’à l’île de la Réunion, la Suisse et la Belgique.

Les Québécois pourront quant à eux applaudir la chanteuse à compter de février dans différente­s salles de la province.

« J’ai besoin de prendre une pause de studio : ces chansons sont au tout début de leur vie, je veux leur donner la chance d’aller rejoindre les gens, de les toucher, de les faire rire ou encore réfléchir. Je pense qu’elles le méritent », avance Lynda Lemay.

Les albums Entre le rêve et le souvenir et Le baiser de l’horizon sont maintenant disponible­s partout.

De sa Gaspésie où il vit, Éli Laliberté planche depuis 30 ans sur des documentai­res qui trouvent une résonnance dans les valeurs qui nous définissen­t. En 2017, il remportait un Gémeaux pour 100 jours pour la planète. Dans Le coureur des bois et le Nutshimiu-innu (disponible sur tv5unis.ca), il suit le parcours d’un coureur des bois moderne de Sept-Îles et d’un Innu de retour sur son territoire familial ancestral.

Le 18 novembre, son film le plus personnel, Lucas, une espèce humaine en voie de disparitio­n, sera présenté dans le cadre de Doc humanité (22 h 30 sur ICI Télé). Car Éli est papa d’un garçon atteint de trisomie 21, condition qui fait l’objet d’un dépistage menant à des interrupti­ons de grossesse. Des Lucas mettent du bonheur dans la vie, mais sont menacés de ne plus avoir le droit d’exister. Une question sensible et éthique.

En attendant, Éli a mené une série intrigante et spectacula­ire, Cascadeurs, qui nous amène dans les coulisses du métier pas banal de coordonnat­eur de cascades dont il parle avec admiration et respect.

Quel est le point de départ de cette série ?

Ma cousine, Héléna Laliberté est coordonnat­rice de cascades. Elle pratique un métier extraordin­aire qui frappe l’imaginaire. Notre famille est très fière d’elle. Elle travaille sur des gros films américains. Si la première idée qu’on se fait d’un cascadeur est un casse-cou, c’est complèteme­nt le contraire. Ce sont des profession­nels. On s’est dit pourquoi ne pas proposer une série. Jean Frenette et Jean-François Lachapelle se sont joints au projet. Ce sont des gens humbles qui ont du guts .J’aipasséuna­netdemià les suivre.

Qu’est-ce qui t’a surpris en documentan­t leur milieu ?

S’ils travaillen­t sur des grosses production­s américaine­s, les coordonnat­eurs de cascades sont aussi appelés à intervenir dès qu’il y a un peu de bousculade dans une scène. C’est nécessaire pour que personne ne se blesse et que le rendu soit crédible. Héléna fait aussi beaucoup de pubs. Une de ses expertises est la conduite, donc elle fait des pubs d’autos. C’est un métier qui demande constammen­t des mises à jour. Héléna revient d’une formation de car crash.

Il y a vraiment une transmissi­on qui se fait dans ce milieu-là. Le fait de mettre sa vie en danger rapproche les gens.

Il y a beaucoup d’archives dans la série. En quoi le métier a-t-il évolué ?

Tous les moyens techniques et technologi­ques ont fait évoluer le métier et permettent d’assurer plus de sécurité aux cascadeurs. On peut voir dans la série la famille Fournier utiliser de vieux bancs de bébé pour les protéger alors qu’à l’époque on débattait sur la pertinence du port de la ceinture de sécurité en auto. Pour la torche humaine, on n’utilise plus les mêmes combustibl­es. C’est hallucinan­t de voir le cascadeur avec son masque de silicone jouer une scène sans voir ni entendre. On a augmenté la sécurité, mais on a augmenté le réalisme aussi. Je remarque qu’ils ont tous beaucoup de reconnaiss­ance envers leurs prédécesse­urs. Jean me racontait être encore influencé par Buster Keaton.

On voit dans la série à quel point ils sont polyvalent­s.

Les coordonnat­eurs de cascades sont des gens très complets. Ce sont des experts de l’action. Ils savent où placer les caméras. Sur Dark Match, le réalisateu­r a cédé son plateau à Jean pour la scène de lutte. Ils font souvent partie du concept, peuvent même monter une cascade de 2-3 niveaux, proposer un découpage. Ils doivent aussi être capables de toujours lire leurs cascadeurs pour que l’adrénaline ne surpasse pas leurs capacités. Ce sont aussi des magiciens de l’adaptation.

As-tu eu les accès souhaités pour mener la série ?

Nous étions post-COVID, il fallait que des équipes acceptent de nous ajouter à la leur. Je suis reconnaiss­ant d’avoir eu accès à une si grande variété d’actions. Le défi était d’aller sur des production­s américaine­s. Ils étaient tous sur la nouvelle série de Schwarzene­gger (sur Netflix). Mais on a eu de beaux projets, des films, des séries, de la motion capture pour des jeux vidéo. On a pu raconter les histoires des histoires. Un simple coup de poing dans un bar raconte une histoire. Et je peux dire que dans tous les cas, le secret est dans la préparatio­n.

Cascadeurs

Mercredi 22 h sur Historia

 ?? ??
 ?? ??
 ?? ?? Album de Lynda Lemay
Le baiser de l’horizon
Album de Lynda Lemay Le baiser de l’horizon
 ?? ??
 ?? ??
 ?? ??
 ?? ??
 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada