Le Journal de Quebec - Weekend

Éric-Emmanuel Schmitt raconte Maria Callas

- MARIE-FRANCE BORNAIS

Écrivain mondialeme­nt reconnu, musicien et mélomane, amateur d’opéra, Éric-Emmanuel Schmitt publie cet automne La rivale ,un roman absolument savoureux consacré à Maria Callas. L’auteur brosse le portrait d’une chanteuse géniale, mais fragile, une véritable icône au destin tourmenté. Et il le fait du point de vue de Carlotta Berlumi, une chanteuse sortie tout droit de son imaginatio­n, qui la déteste.

Voici donc l’histoire de Maria Callas, racontée par sa rivale la plus acharnée, Carlotta Berlumi, qui revient en Italie après des décennies d’exil en Argentine. Plus personne ne se souvient d’elle, sauf Enzo, qui devient son confident.

Carlotta, après toutes ces années, a toujours une dent contre la Callas : elle est convaincue que Maria Callas lui a volé la vedette. Elle ne manque pas son coup pour faire de la médisance.

« Tout est vrai dans les moindres détails... sauf Carlotta ! » révèle l’écrivain en entrevue.

« Il y a quelques années, le journal Le Monde m’avait demandé d’écrire un texte sur Callas. Je m’étais dit : “Tout a déjà été écrit sur Callas.” Et j’ai eu l’idée de l’ironie, de la décrire à travers un personnage qui la déteste. Finalement, de faire un portrait en creux, de faire sentir le génie de Callas à travers quelqu’un qui ne le saisit pas. »

« Je me suis dit que ce serait très amusant, littéraire­ment. Un petit peu un tour de force à faire. J’avais écrit une première mouture de ce texte et je l’ai totalement repris au printemps dernier pour lui donner sa forme définitive. C’était célébrer Callas à travers quelqu’un qui ne la célèbre pas, mais qui la hait. »

OPPOSITION­S

C’était aussi une manière d’opposer quelqu’un qui ne doute jamais – Carlotta Berlumi – à quelqu’un qui est dévoré par le doute – Maria Callas.

« Callas travaille comme une folle. Elle essaie de plier sa voix à ses intentions, plier son corps aussi à ses intentions, perdre 50 kg. Quelqu’un qui est dans un effort et une exigence continue. »

Carlotta, au contraire, est une hédoniste, fait-il remarquer.

« Elle se laisse vivre. Elle aime manger ; elle mange un peu trop. Elle aime les hommes ; elle en consomme un peu trop. Elle aime chanter, mais ça suffit : elle ne va pas se mettre à jouer en plus ! C’est quelqu’un qui fait tout agréableme­nt, sans passion, sans exigence, sans aucun sens de l’art. C’est ça, la différence : Callas était une artiste et Carlotta, pas du tout. »

De Maria Callas, ce qu’ÉricEmmanu­el Schmitt admire le plus, c’est sa présence.

« Je me souviens de la première fois où je l’ai entendue. C’était en 1977. On annonçait sa mort à la radio. J’étais adolescent et j’entends parler de cette Maria Callas qui vient de mourir, à Paris, seule. »

« J’entends sa voix, parce qu’ils passent un extrait. Et tout de suite, j’ai l’impression qu’elle est sortie du haut-parleur, et qu’elle est là, présente devant moi. Et qu’elle me raconte la vie avec ses douleurs, ses fulgurance­s, ses extases, ses joies, ses peines. Qu’elle est là, chargée, pleine. »

Ensuite, comme il est musicien, qu’il a fait le Conservato­ire, qu’il joue du piano, il a pu mesurer la grande musicienne qu’il y avait derrière cette présence.

« Callas, c’est quelqu’un qui a une intelligen­ce des partitions, à la fois de la musique et des mots, absolument hors du commun. Et elle est autant comédienne que musicienne, et les deux jusqu’à l’incandesce­nce. »

UN PLAISIR D’ÉCRITURE

La rivale est un véritable plaisir de lecture. Ce fut aussi un plaisir d’écriture ?

« Oui, oui ! » assure-t-il. « Ce personnage de Carlotta Berlumi, qui est péremptoir­e, qui a un avis sur tout et qui fait toujours des déclaratio­ns fracassant­es m’amusait beaucoup ! C’est très agréable pour un écrivain de décrire les méchants. Et c’est très libérateur ! »

■ Éric-Emmanuel Schmitt est un écrivain à la reconnaiss­ance internatio­nale.

■ Il est membre de l’Académie Goncourt.

■ On lui doit de nombreux best-sellers, dont la série

La traversée des temps ,sur laquelle il travaille en ce moment (on ira dans la Grèce antique pour le prochain tome !).

■ Il a également écrit Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran, Oscar et la dame rose et bien d’autres ouvrages exceptionn­els.

■ Il sera présent au Salon du livre de Montréal.

■ Il jouera sa pièce Madame Pylinska et le secret de Chopin, avec le pianiste Nicolas Stavy, au Théâtre Maisonneuv­e de Montréal et à la Salle Albert-Rousseau de Québec, en juin 2024.

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FEUILLES DE MARCHAND ÉDITIONS LES PAR FOURNIES PHOTOS
NOS FLEURS Anaïs Barbeau-Lavalette Illustrati­ons de Mathilde Cinq-Mars Éditions Marchand de feuilles Environ 100 pages FEUILLES DE MARCHAND ÉDITIONS LES PAR FOURNIES PHOTOS
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