Le Journal de Quebec - Weekend

CETTE HONTE QU’ONT LES FEMMES DE LEUR CORPS

Emily Hampshire se transforme en mère de Maddie Ziegler, ancienne muse de la chanteuse SIA, dans la comédie dramatique pétillante Ma vie, mes règles, de Molly McGlynn, film portant sur les tribulatio­ns sexuelles et médicales d’une adolescent­e.

- ISABELLE HONTEBEYRI­E

Sexuelles et médicales ? Oui, car Lyndi (Maddie Ziegler) est atteinte du syndrome MRKH (Mayer-Rokitansky-Küster-Hauser).

Elle découvre sa condition par hasard, en allant consulter un gynécologu­e — masculin, ce qui donne lieu à une scène à la fois humoristiq­ue et révoltante.

Elle apprend ainsi qu’elle n’a pas d’utérus, pas de col de l’utérus et que son vagin est atrophié.

Résultat, si elle veut un vagin de taille « normale » afin qu’une pénétratio­n soit possible, elle doit utiliser des dilatateur­s vaginaux… tout un programme pas forcément réjouissan­t lorsqu’on est une adolescent­e à la découverte de son corps et que son seul souhait est de perdre sa virginité.

Emily Hampshire incarne Rita, la mère de Lyndi et comme Molly McGlynn a écrit ce film, car elle est elle-même atteinte du syndrome MRKH, l’actrice née à Montréal n’a pas hésité une minute avant d’accepter le rôle.

« Lorsque j’ai lu le scénario, une scène m’a frappée. Lorsque Lyndi cherche d’autres femmes atteintes du syndrome MRKH, la seule femme qu’elle trouve est… l’épouse d’Hitler ! Dès ce moment, j’ai su que ce ton me rejoignait », explique Emily Hampshire lors d’une entrevue avec l’Agence QMI.

LA HONTE DE SON CORPS

« Je me suis aussi concentrée sur la relation qu’entretenai­t Rita avec sa mère et je me suis accrochée à la honte que nous avons de nos corps et qui est transmise de génération en génération. Rita ne veut en aucun cas transmettr­e cela à Lyndi… et pourtant, elle s’aperçoit qu’elle est comme sa mère. »

Car Lyndi tente de s’adapter à ce syndrome qui lui fait honte et qu’elle veut cacher à tout prix. Trahie par son corps, l’adolescent­e essaye néanmoins d’avoir une vie sexuelle « normale » et réalisera qu’elle doit cesser de taire ce qu’elle vit.

« Nous sommes habitués, depuis très longtemps, à voir des films écrits, en majeure partie, par des hommes blancs. Cela a commencé à changer il y a peu de temps. Lorsqu’une femme ou un membre d’une communauté présente son histoire de manière franche, on obtient un autre point de vue. C’est ce qui m’a séduite dans Ma vie, mes règles. Lorsqu’on raconte une histoire aussi précise et aussi intime, ça devient universel. La meilleure manière de toucher les gens est d’être totalement honnête et authentiqu­e », souligne Emily Hampshire.

Inspiré de la mère de Molly McGlynn, le personnage de Rita combat aussi ses propres démons et tente d’aider sa fille.

« C’est la conséquenc­e du mouvement #MoiAussi d’une manière élargie. Lorsque les femmes montrent quelque chose dont on leur a appris à avoir honte, cela permet à d’autres personnes de faire la même chose, de dire “moi aussi”, afin que la honte se dissipe. En montrant à sa fille la cicatrice de sa mastectomi­e, Rita lui dit “moi aussi”, et cela contribue à calmer sa détresse et sa douleur. »

« Je crois que ce que dit Lyndi, c’est-à-dire : “Je suis une femme sans vagin”, c’est qu’elle reprend possession de son corps. La honte se nourrit du silence. Dès qu’on met ce qui nous fait honte en pleine lumière, ce monstre qu’est la honte disparaît », dit-elle.

Ma vie, mes règles est à l’affiche depuis vendredi.

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Emily Hampshire et Maddie Ziegler dans le film Ma vie, mes règles.

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