Le Journal de Quebec - Weekend

MARIO JEAN NE PANIQUE PLUS

- RAPHAËL GENDRON-MARTIN Le Journal de Montréal raphael.gendron-martin @quebecorme­dia.com

Mario Jean est un homme heureux. À l’aube de la soixantain­e – il a fêté ses 59 ans le 10 février –, l’humoriste lance cet hiver son septième spectacle solo, Les imparfaits bonheurs… et autres tutti quanti de la vie ! Mais il n’y a pas si longtemps, ce père de famille, en couple depuis 38 ans, a vécu de sérieuses remises en question profession­nelles et personnell­es, accompagné­es de crises de panique. « Je suis allé chercher de l’aide extérieure et je me suis appuyé sur ce que j’avais de solide », dit-il.

C’est lors de la préparatio­n du cinquième spectacle solo de sa carrière, Moi, Mario, en 2014, que Mario Jean a vécu sa première grosse crise de panique. À l’époque, son producteur et gérant lui avait dit qu’il fallait vraiment « que les critiques soient bonnes ». Un grand stress s’était emparé de lui.

« Avant ça, il y avait comme une innocence de la vie, dit-il. Tout allait bien. Mais à un moment donné, tu pognes un plateau avec ta carrière. Moi, ça avait toujours monté. Ça ne veut pas dire que tu redescends, mais le plateau est là. Il faut l’assumer et c’est dur à faire au début. La gang avec qui je travaillai­s ne s’en rendait pas compte nécessaire­ment et elle poussait. Mais je ne pouvais pas fournir plus que ça ! Et là, ç’a été un peu la débandade. C’est insidieux. Ça rentrait tranquille­ment. Crise de panique par-ci, crise de panique par-là. C’est long avant que tu mettes les pièces du casse-tête [ensemble]. Qu’est-ce qui se passe ? Qu’est-ce qui ne va pas ? Il y avait aussi des remises en question personnell­es. Une trentaine d’années de mariage, les enfants, le ci, le ça. Est-ce que je suis à la bonne place dans la vie ? Avant de remettre tout ça en place, le cerveau spinne en tabarouett­e. »

Quand Mario Jean a demandé de l’aide, une personne lui a fait du bien en lui disant qu’il n’y avait rien de mal à mettre un genou par terre.

« Avant, j’avais cette vision-là de me dire : ben voyons donc, je suis heureux, tout va bien, je m’en vais sur scène pour faire rire, je ne peux pas être malheureux. Je me comparais à d’autres qui sont malheureux dans la vie et qui ne sont pas choyés comme j’ai pu l’être et je ne me voyais pas aller me plaindre. Mais ce n’était pas de me plaindre, c’était juste de dire : ça ne va pas. »

NE PAS AVOIR HONTE

Cette vulnérabil­ité, Mario Jean a accepté d’en parler publiqueme­nt pour la première fois dans un récent documentai­re. Comme d’autres humoristes, il y aborde les enjeux de santé mentale dans son métier.

« Avec ce qu’on fait, un clown ne peut pas être triste, dit Mario. Les gens ne comprennen­t pas. Ils se disent qu’ils sont devant moi, qu’ils rient et qu’ils m’aiment. C’est impossible que je sois malheureux. »

« Quand on m’a proposé [de participer au documentai­re], j’ai senti ma responsabi­lité de le dire, poursuit-il. Et depuis que ç’a été diffusé, j’ai plein de gens qui me disent qu’ils vivent telle ou telle affaire et qu’ils sont contents de voir qu’ils ne sont pas tout seuls. Ils vont aller chercher de l’aide. Il ne faut pas avoir honte de ça. »

LE STRESS DES PREMIÈRES

Au fait, comment Mario Jean a-t-il réglé la question de la panique pour sa cinquième tournée, il y a dix ans ?

« J’ai annulé la première [médiatique]. J’avais peur de vous autres [dit-il en pointant le journalist­e] ! C’est une soirée très stressante, se faire critiquer sur telle ou telle affaire. Avec ce que je vivais mentalemen­t à cette époque-là, je n’étais pas capable d’affronter ça. S’il avait fallu que le lendemain, je lise dans le journal que ce n’était pas terrible, je n’aurais pas passé au travers, c’est sûr. »

Une décennie plus tard, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts. Tellement que Mario Jean a accepté de faire une première médiatique pour son nouveau spectacle, à la Place des Arts. Comment envisage-t-il cette soirée du 5 mars ?

« Je la prends comme une belle fête. Advienne que pourra ! »

Dans ce spectacle, Mario Jean parle de la quête du bonheur. Est-ce qu’on peut dire aujourd’hui qu’il est heureux ?

« Oui, absolument. Je vais bien, je dors bien. Surtout, je m’amuse beaucoup, beaucoup. J’ai un spectacle ce soir. La salle va être pleine. Je ne peux pas demander plus que ça. Je vais arriver là-bas, il va y avoir du café et des petites affaires à grignoter. Je vais pouvoir faire un petit roupillon avant dans la loge. C’est le pur bonheur. »

Mario Jean présentera son spectacle Les imparfaits bonheurs… et autres tutti quanti de la vie ! le 5 mars, au Théâtre Maisonneuv­e à Montréal, et les 19 mars et 1er mai, à la Salle Albert-Rousseau à Québec. Plus d’info au : mariojean.com.

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