Le Journal de Quebec - Weekend
Un livre pour la seule Québécoise au sommet du K2
Depuis plusieurs années, Marie-Pier Desharnais tutoie les sommets du monde entier, notamment celui du K2, la deuxième plus haute montagne (8611 m) et l’une des plus exigeantes. L’alpiniste québécoise et conférencière ajoute une corde à son baudrier en devenant autrice avec un livre, Nous sommes des montagnes, publié le 21 février, aux Éditions de l’Homme.
Dans cette autobiographie, elle raconte son parcours, qui ressemble à une suite de hauts et de bas, et les leçons apprises, parfois à la dure.
À 19 ans, elle survit par miracle au tragique tsunami qui a frappé l’Asie du Sud-Est en 2004. Après ce traumatisme, elle décide de s’expatrier et d’étudier en gestion des catastrophes et en résilience organisationnelle.
Elle prend alors goût à la randonnée, puis à l’alpinisme. La montagne sera alors son salut et une grande histoire d’amour avec plus d’une soixantaine de sommets conquis, dont l’Everest (8848 m d’altitude), le Kilimanjaro en Tanzanie (5200 m), l’Aconcagua en Argentine (5636 m), ou encore l’Elbrus en Russie (5642 m).
« Au début, c’était un truc d’ego, explique-t-elle. Je me faisais ramasser, on me comparait à une Barbie sur la montagne. Je voulais prouver que j’étais capable d’y arriver. Mais plus je grimpais, plus le sommet devenait accessoire. Désormais, je me sens tellement vivante en montagne. C’est ce qui me fait avancer et me motive. »
Aujourd’hui, on la compare davantage à « une sorte de Lara Croft réincarnée » avec des « allures d’une badass de film d’action », comme l’écrit l’animateur de télévision et de radio Dominic Arpin dans la préface de l’ouvrage.
Elle accepte ce compliment avec plaisir, mais aussi avec une bonne dose d’humilité et de recul sur soi : « Je suis à la base une simple fille de Victoriaville. Le but du livre était de montrer que si moi, je suis capable, d’autres le sont aussi et qu’il n’est jamais trop tard pour se réinventer. J’avais 30 ans la première fois que je suis allé au Népal. Je me suis bien entourée pour évoluer et gravir les étapes. »
LE K2, LE SOMMET DE SA VIE
Le point culminant de sa carrière d’alpiniste, c’est (pour l’instant) le K2. Atteint le 22 juillet 2022, elle est devenue la première Québécoise (hommes et femmes confondus) à atteindre son sommet et la première Canadienne à y faire flotter l’Unifolié.
« Ce fut l’expérience la plus intense et la plus gratifiante de ma vie, assure Marie-Pier Desharnais. C’est la montagne qui fait frémir tous les alpinistes, on n’ose à peine prononcer son nom. C’est l’une des plus belles, elle nous fait vivre. Atteindre son sommet et en redescendre m’a poussé à partager cette expérience transcendante, pas seulement la vivre. Je voulais, en quelque sorte, répandre la bonne nouvelle. C’est ce que j’ai fait avec une conférence TED et un livre. »
En partageant son histoire faite de succès, d’épreuves et de résilience, Marie-Pier Deshanais veut montrer comment, comme le titre du livre, « nous sommes tous, chacun à notre façon, des montagnes, capables, nous aussi, de traverser le temps, d’être forts et résilients. Comme sur les pentes d’un sommet, il faut savoir faire preuve d’humilité et reconnaître ses limites, bien s’entourer et collaborer pour réussir. »
D’AUTRES DÉFIS EN VUE ?
C’est souvent la question que l’on pose aux alpinistes. Quelles seront ses prochaines aventures ? Marie-Pier Desharnais indique que rien n’est encore prévu pour le moment, même si elle a forcément l’envie de retourner sur les montagnes, notamment l’Himalaya, au Népal, au Tibet ou au Pakistan.
Elle n’a pas atteint le sommet du Denali, le plus haut sommet de l’Alaska et de l’Amérique du Nord, qui devait faire d’elle la toute première femme au monde à atteindre les sept plus hauts sommets montagneux et les sept plus hauts sommets volcaniques des sept continents.
« Je n’ai pas un goût d’inachevé face au Denali. Au contraire ! Je suis repartie de cette montagne en paix, car ce fut tout même un succès avec une belle expérience et de nouvelles leçons apprises. »
À l’image de son livre, elle veut continuer à partager son savoir et son expérience de la haute montagne en accompagnant des groupes dans leur voyage, notamment au Pérou et en Tanzanie.
En attendant, elle sera en dédicaces aujourd’hui au Renaud-Bray de Victoriaville, de 13 h à 15 h.
Une trentaine d’années après la prise de contrôle britannique de nos institutions, les habitants de la vallée du Saint-Laurent apprennent qu’ils seront bientôt invités à élire des députés pour les représenter dans la toute nouvelle Assemblée législative du parlement du Bas-Canada. Une première dans notre histoire à nous au Québec.
Le lendemain de Noël en 1791, le lieutenant-gouverneur de la province de Québec, Alured Clarke, jette les bases de ce nouveau système parlementaire. L’Acte constitutionnel accorde la qualité d’électeur aux citoyens britanniques de naissance ou d’adoption de 21 ans ou plus, mais seulement s’ils sont propriétaires d’une habitation.
Dans son libellé, le législateur n’établit pas de différence de genre, ainsi le droit de vote est accordé aux personnes qui répondent aux exigences, ce qui permet à plusieurs femmes propriétaires, souvent des veuves, de s’en prévaloir. En fait, elles sont possiblement les seules dans l’Empire britannique à avoir le droit de vote en cette fin de siècle. Droit qui leur sera retiré en 1849, sous le gouvernement LaFontaine-Baldwin.
Ce scrutin est accueilli avec enthousiasme, même si les Canadiens français, qui forment l’immense majorité de la population, ne connaissent pas grand-chose du parlementarisme britannique.
LA CAMPAGNE ÉLECTORALE
La campagne électorale est lancée au printemps de 1792. L’organisation du vote dans chaque comté (circonscription) est placée sous l’autorité d’un officier-rapporteur.
Chaque candidat tente de gagner les faveurs des électeurs comme il peut. Certains visitent les tavernes pour faire entendre leurs idées, d’autres confectionnent des affiches, distribuent des tracts ou font parler d’eux dans les journaux.
On constate aussi toutes sortes de méthodes pour gagner des votes, comme l’intimidation, des offres d’emploi ou des cadeaux comme un bon repas de jambon ou une pinte de bière.
LE SCRUTIN
En ce temps-là, le bureau de vote était bien rudimentaire, la plupart du temps c’était une plateforme en bois. Il n’y avait qu’un seul bureau de vote par comté, ce qui obligeait parfois des citoyens à parcourir des distances déraisonnables. Ni liste électorale ni bulletins de vote n’étaient prévus. L’officier rapporteur recevait alors les électeurs l’un après l’autre. Ces derniers, après avoir déclaré leur nom, leur profession et le lieu où se trouvaient leurs biens, devaient tout simplement dire pour qui il votait. Un vote exprimé à haute voix, souvent en présence des candidats et de ses partisans. En fait, il faut attendre 1875 pour que le vote secret soit instauré au Québec.
Lors de cette première campagne électorale de notre histoire, 50 députés
devaient être élus dans 21 comtés. Dans certains comtés, deux ou plusieurs sièges de député étaient en jeu. L’électeur pouvait donc, dans certains cas, faire plusieurs choix. À cette époque, l’élection dans une circonscription pouvait s’échelonner sur plusieurs journées, mais si personne ne se présentait pendant 60 minutes au bureau de scrutin et que trois électeurs demandaient sa fermeture, l’officier avait le pouvoir d’arrêter le vote et de proclamer à haute voix le ou les gagnants.
On sait que certains partisans ratoureux, voyant que leur candidat avait de l’avance dans les votes, envoyaient des fiers à bras pour bloquer l’accès au lieu de vote pendant au moins une heure pour faire gagner leur favori. Il arrivait aussi qu’un officier laissât voter des gens qui n’avaient pas le droit de voter, pour appuyer un candidat en particulier. Ce système permettait à un candidat défait dans une circonscription de retenter sa chance dans une autre.
Règle générale, la première élection dans la Province de Québec s’est bien déroulée, à l’exception peut-être de Charlesbourg, où le vote a dégénéré en foire d’empoigne.
UN DÉBUT DE DÉMOCRATIE
Le 10 juillet 1792, le long processus de vote est finalement complété et les noms des gagnants sont publiés. Les députés élus sont convoqués au Parlement pour la première fois le 17 décembre 1792. Ils prêtent serment et se réunissent pour poser les premiers jalons de notre démocratie, dans la chapelle du palais épiscopal à Québec.
Pouvez-vous croire qu’à cette époque-là, nos élus ne reçoivent ni salaire ni allocation ? Ils doivent payer eux-mêmes les frais de leur logement et leur transport. À ce moment, le déplacement Montréal-Québec prenait deux jours, les députés devaient obligatoirement prévoir une nuit à l’hôtel à Trois-Rivières. Certains viennent de très loin pour siéger plusieurs mois par année à Québec. Imaginez le député de la Gaspésie qui doit voyager plus d’une semaine en bateau pour rejoindre Québec. Nos représentants du peuple devront attendre 1833 pour obtenir une petite allocation.
Cette première élection est importante dans l’histoire, mais elle n’a pas vraiment installé une vraie vie démocratique au Québec. Jusqu’en 1848, le véritable pouvoir restera entre les mains des ministres qui, eux, n’étaient presque jamais des députés élus.
Au fil du temps, les frustrations liées à ce système parlementaire et à son processus électoral vont conduire à la révolte patriote de 1837-38.