Désintoxication
Pour survivre à nos malheurs collectifs qui provoquent un écoeurement moral, l’été qui se pointe doit être vécu à la manière d’une cure de désintoxication. Car personne ne sort indemne de cette année de toutes les indécences, de toutes les fourberies, men
THÉRAPIES
Pour s’en échapper, quoi de plus accessible pour les Québécois qu’un retour à la nature dans la vastitude du pays que l’on oublie trop souvent d’honorer? D’abord, un conseil de journaliste: faire une consommation plus que modérée de l’information. Suffisamment pour rester informé, mais en évitant les réactions vives. Prendre de la hauteur afin d’échapper aux sentiments de dégoût et de découragement qui nous ont envahis et ne nous ont laissé aucun répit tous ces longs mois.
Retrouver le sens de l’humour, une «valeur québécoise» dirait sans doute Bernard Drainville. Nous l’avons peu pratiqué récemment, assommés que nous sommes par les révélations adnauseam de la commission Charbonneau. Il vaut mieux en rire qu’en pleurer, dit le proverbe, mais cette fois le rire devrait être nourri des bonheurs routiniers entourés de nos proches.
Les amateurs de pêche (dont je suis) pourront s’aérer l’esprit sur un lac isolé dans un décor de sauvagerie qui oblige à déposer les armes. Une canne à la main, attentif au moindre frémissement, le regard fixé au fil de l’eau, le pêcheur passionné voit la ville et ses turpitudes s’estomper rapidement. Sentir une touche et sortir, non sans résistance, une belle prise tout en chuchotant avec le compagnon de ce sport pratiqué dans la contemplation, il n’y a rien de plus sublime et émouvant. Ce serait désacraliser le silence des lieux que d’orienter la conversation vers la corruption politique et nos petits malheurs circonstanciels.
AMITIÉS
Cet été, l’amitié doit dominer nos vies en imposant ses lois. La première étant de réduire les tensions qui découlent des divergences de vues. Non pas pour fuir la réalité en adoptant l’attitude de l’ex-maire de Montréal, «Je ne veux pas savoir», mais afin d’apaiser la colère et les sentiments qui s’y rattachent.
Quelle jubilation que ces repas partagés dans la douceur de la nuit estivale, au bord d’un lac ou sur une terrasse en ville qui tient lieu de maison de campagne. Cet été, pour que la désintoxication réussisse, nous devons nous mettre en vacances de la corruption municipale, mais également de tous ces faits divers horribles, répugnants, qui nous arrivent du bout du monde à l’instant où ils se déroulent, entrant par effraction dans nos vies perturbées. D’ailleurs, il faudrait bien s’interroger sur la nécessité de savoir qu’un monstre pratique le cannibalisme à Montréal, qu’un fou de Dieu, les mains ensanglantées, a décapité un soldat en Angleterre, qu’un dément à Cleveland s’est offert des esclaves sexuelles emmurées chez lui au coeur d’un quartier populeux.
Nous deviendrons fous de ce que nous découvrons de la nature humaine si nous n’arrivons pas à échapper à l’époque qui a tendance à nous déposséder de ce que l’on appelait jadis notre âme.