Du plomb dans les échanges internationaux
On n’en parle pas beaucoup, mais sur le plan des échanges internationaux, le Québec vit un gros changement depuis plus d’une décennie. Le poids du déficit extérieur s’alourdit. Ce qui nuit à la croissance du PIB réel, selon l’économiste Hélène Bégin dans une étude de Desjardins.
«En tenant compte de la taille de l’économie, le déficit commercial s’avère deux fois plus important que dans les années 1980», liton dans l’étude, publiée il y a quelques jours. Pendant que les exportations déclinaient de 2007 à 2012, passant de 95 G$ à 90 G$, les importations ont beaucoup augmenté.
À l’inverse, le solde des échanges avec les autres provinces canadiennes demeure sensiblement le même. Les exportations vers les autres provinces sont passées de 60 milliards $ à près de 75 milliards $ depuis cinq ans. Fait à noter, plus de la moitié de nos exportations et importations interprovinciales se font avec l’Ontario.
PLUSIEURS FACTEURS
Comment expliquer l’alourdissement du déficit extérieur? Plusieurs facteurs sont en cause, selon Desjardins.
- La Chine s’est hissée au premier rang des fournisseurs de produits de consommation aux États-Unis, coupant l’herbe sous le pied de plusieurs entreprises québécoises. L’excédent commercial avec nos voisins du Sud a d’ailleurs rapetissé de moitié depuis 2002. «Le Québec exporte maintenant moins de 70 % de ses produits aux États-Unis comparativement à plus de 85 % il y a dix ans.»
- Les industries exportatrices telles que le textile, le bois ou les pâtes et papiers, entre autres, sont en déclin. L’effondrement de l’immobilier américain n’a certes pas aidé leur cause, tout comme l’appréciation rapide du dollar canadien. Mais même en cas de reprise économique mondiale, écrit Desjardins, ce sera difficile pour ces industries de remonter la pente.
- L’éclatement de la bulle technologique aux États-Unis, et la descente aux enfers de Nortel, ont fait mal. «À la fin des années 1990, l’industrie du matériel de télécommunications était florissante au Québec. La valeur des livraisons à l’étranger atteignait 12 G$, ce qui en faisait notre principal produit d’exportation. La faillite du principal pilier de l’époque, Nortel, a rapidement fait dégringoler la production de ce secteur d’activité.»
DU POSITIF QUAND MÊME
Le Québec devra traîner ce boulet encore plusieurs années, ce qui limitera le potentiel de croissance économique, souligne l’étude. Toutefois, il n’y a pas que des nuages dans le ciel. D’autres industries prennent la place de celles en déclin, notamment l’aéronautique, les composantes électroniques et les produits pharmaceutiques, qui trônent aujourd’hui dans le top 10 des exportations québécoises.
L’économiste de Desjardins suggère entre autres que le Québec se lance à la conquête des marchés émergents. Leur potentiel de croissance étant plus élevé que celui des pays industrialisés, dont la «reprise» tarde à convaincre, ou apparaît lointaine dans le cas de l’Europe.
Aussi, il ne faudrait pas négliger le potentiel de création de richesse qui existe à l’intérieur même du pays, où de nombreux irritants et obstacles au commerce demeurent entre les provinces. Qu’on pense seulement à la gestion de l’offre dans le domaine agricole, ou les monopoles dans le commerce de l’alcool. Ou encore le marché d’exportation potentiel que représente l’Ontario pour Hydro-Québec, pour l’instant ignoré.