Le Journal de Quebec

« Noël, je trouve ça dur »

Le difficile parcours d’une itinérante qui cherche sa place avec la YWCA

- Nicolas Lachance Nicolas Lachance

Des dizaines de femmes violentées, vivant l’itinérance, la solitude, la toxicomani­e et qui ont trouvé refuge dans des centres d’hébergemen­t angoissent à l’approche des Fêtes. Sylvie, une femme en pension à la YWCA, a toujours «détesté Noël».

Elle aura 54 ans au mois de janvier. Depuis sa jeunesse, Sylvie vit de la violence. La première à l’avoir battue est sa mère. Après, elle a subi de la violence avec trois conjoints différents. Elle se «gelait» pour oublier.

Détester Noël est profondéme­nt ancré dans ses gènes. «Ça part de loin. Mon père était soûl. Les cadeaux, je n’en avais jamais. Ma mère me les donnait pis après ça, elle les donnait à ma soeur. Alors, c’était bien ordinaire», relate la mère de deux enfants. Aujourd’hui, elle est allée chercher de l’aide à la YWCA. Toutefois, durant la période des Fêtes, les activités et les thérapies prennent une pause.

«Il faut trouver une manière de s’occuper. Les Fêtes s’en viennent et j’ai de la misère avec ça, on va être pratiqueme­nt trois semaines en congé. Je me demande ce que je vais faire», avoue Sylvie qui a peur de faire une rechute. «Lorsque je suis encadrée, ça va bien. Ça ne sera pas facile. Noël, je trouve ça dur. Je n’ai jamais aimé Noël, non.»

Malgré ses craintes, la peur de déranger ceux qu’elle aime encombre son coeur.

«Je ne veux pas m’imposer chez mes enfants», soulignet-elle.

UNE VIE LABORIEUSE

D’ailleurs, lorsqu’elle parle de ses enfants, Sylvie pleure. Ils sont sa fierté. La relation n’a pas toujours été facile. Drogue, tentatives de suicide et violence: le chemin parcouru par Sylvie est parsemé d’embûches.

«Depuis l’âge de 15 ans que je consommais. Je me sens jugée. Mais c’est moi qui me juge la première. J’aimerais tellement ça être heureuse. Des fois, j’ai l’impression de me battre contre des moulins à vent et je veux que ça arrête», explique-t-elle, les larmes aux yeux.

DE L’AIDE

Sylvie fait partie d’un programme qui se nomme La Marelle. «Je suis allée chercher de l’aide pour briser le cycle».

Elle apprend à vivre en société et à faire des introspect­ions.

«Ça inclut la violence conjugale aussi. On travaille en atelier la confiance en soi, parce que moi, je n’en ai vraiment pas. Il ne faut pas se fier à ce que je dégage. Il faut que tu retournes dans le passé. Ça vient nous chercher, ça fait mal. Mais en fin de compte, il y a des choses qui sont réglées», mentionnet-elle.

Toutefois, le chemin est long avant de s’en sortir. Pendant 25 ans, elle n’a pas parlé à sa mère, jusqu’à l’an dernier. «Je lui ai pardonné, mais je ne sais plus ce que je ressens. Est-ce que j’aime ou pas? Je ne le sais pas. Je ne sais plus faire la différence.»

Mais elle garde espoir. «Des fois, j’ai l’impression que c’est marqué, dans ma face: “femme victime de violence”, mais en dedans, je suis encore la petite fille qui cherche à se faire aimer, qui cherche le prince charmant», mentionne-t-elle.

 ??  ?? Sylvie est à la YWCA pour recevoir de l’aide afin de réintégrer la société.
Sylvie est à la YWCA pour recevoir de l’aide afin de réintégrer la société.

Newspapers in French

Newspapers from Canada