Les aînés sont des enfants pauvres
Sans une aussi forte présence du privé qu’actuellement dans le secteur de l’hébergement des aînés, le gouvernement aurait un très gros problème sur les bras. Cette réalité sera au centre des préoccupations dans les suites que donnera le gouvernement Couillard au rapport du coroner Cyrille Delâge sur les causes de la tragédie de L’Isle-Verte qui a fait 32 morts dans un fulgurant incendie.
Le même dilemme s’était posé lors de la fixation des normes pour obtenir une certification: lorsque les normes de sécurité des immeubles et d’encadrement des résidents par un plus grand nombre d’employés sont trop élevées et qu’elles engendrent des coûts jugés inacceptables par les propriétaires de résidences plus vieillottes, plusieurs sont tentés de se retirer du marché. Les places se font plus rares et le temps d’attente plus long pour les personnes qui espèrent un lit, et pour leurs familles.
Il y a aussi un impact sur les tarifs exigés des pensionnaires qui peuvent devenir hors de portée pour les aînés à faibles revenus. Dans ce contexte, les foyers clandestins se multiplient.
Un étalement judicieux dans l’application des recommandations du coroner sera donc nécessaire, et sans doute aussi une aide financière.
Même les propriétaires de résidences haut de gamme en milieu urbain ont par ailleurs rogné ces dernières années dans le personnel de surveillance nocturne des pensionnaires. Il n’y a pas qu’à L’Isle-Verte que la surveillance de dizaines d’aînés la nuit est laissée à une seule personne, non ou mal formée en plus! Cela se voit partout, dans le secteur public comme dans le privé.
LES SERVICES MUNICIPAUX
Certaines des recommandations qui touchent les municipalités (équipements des services d’incendie, formation des pompiers, exercices d’évacuation, etc.) entraînent aussi des coûts pour celles-ci alors même que le gouvernement coupe dans son soutien financier aux petites municipalités. Elles ne pourront toutefois pas passer à côté.
Une meilleure coordination des services d’urgence, par exemple par un appel unique qui mobilise l’ensemble de ceux-ci, devrait simplement découler d’un plan d’intervention précis, préétabli et bien connu de tous. Il n’y a pas de raison de retarder la mise en place de telles recommandations. Chacun doit savoir exactement ce qu’il a à faire personnellement dans une situation d’urgence dans une résidence pour aînés.
Le coroner Delâge relève aussi l’importance de bien séparer les clientèles des personnes non autonomes et autonomes puisque celles-ci ne nécessitent pas les mêmes types de secours. Il demande que le respect de cette norme fasse l’objet de vérifications de la part des autorités. Un suivi peut également être donné très rapidement à ces suggestions préventives.
L’ARGENT, TOUJOURS L’ARGENT
Le coroner Cyrille Delâge a distribué très largement les blâmes. La correction de plusieurs nécessite des injections de plusieurs millions de la part des centres d’hébergement privés et des petites municipalités. Or, le gouvernement québécois fait une large place au privé dans ce créneau de la santé parce qu’il ne peut répondre à la demande et lorsqu’il le fait, les services ne sont pas nécessairement meilleurs ni l’encadrement de la clientèle. Les départements de soins prolongés dans les centres hospitaliers et les résidences pour personnes âgées sont toujours des enfants pauvres dans le réseau de la santé et des services sociaux.
LE CORONER CYRILLE DELÂGE A DISTRIBUÉ TRÈS LARGEMENT LES BLÂMES