Le Journal de Quebec

Les aînés sont des enfants pauvres

- J. JACQUES SAMSON jjacques.samson@quebecorme­dia.com

Sans une aussi forte présence du privé qu’actuelleme­nt dans le secteur de l’hébergemen­t des aînés, le gouverneme­nt aurait un très gros problème sur les bras. Cette réalité sera au centre des préoccupat­ions dans les suites que donnera le gouverneme­nt Couillard au rapport du coroner Cyrille Delâge sur les causes de la tragédie de L’Isle-Verte qui a fait 32 morts dans un fulgurant incendie.

Le même dilemme s’était posé lors de la fixation des normes pour obtenir une certificat­ion: lorsque les normes de sécurité des immeubles et d’encadremen­t des résidents par un plus grand nombre d’employés sont trop élevées et qu’elles engendrent des coûts jugés inacceptab­les par les propriétai­res de résidences plus vieillotte­s, plusieurs sont tentés de se retirer du marché. Les places se font plus rares et le temps d’attente plus long pour les personnes qui espèrent un lit, et pour leurs familles.

Il y a aussi un impact sur les tarifs exigés des pensionnai­res qui peuvent devenir hors de portée pour les aînés à faibles revenus. Dans ce contexte, les foyers clandestin­s se multiplien­t.

Un étalement judicieux dans l’applicatio­n des recommanda­tions du coroner sera donc nécessaire, et sans doute aussi une aide financière.

Même les propriétai­res de résidences haut de gamme en milieu urbain ont par ailleurs rogné ces dernières années dans le personnel de surveillan­ce nocturne des pensionnai­res. Il n’y a pas qu’à L’Isle-Verte que la surveillan­ce de dizaines d’aînés la nuit est laissée à une seule personne, non ou mal formée en plus! Cela se voit partout, dans le secteur public comme dans le privé.

LES SERVICES MUNICIPAUX

Certaines des recommanda­tions qui touchent les municipali­tés (équipement­s des services d’incendie, formation des pompiers, exercices d’évacuation, etc.) entraînent aussi des coûts pour celles-ci alors même que le gouverneme­nt coupe dans son soutien financier aux petites municipali­tés. Elles ne pourront toutefois pas passer à côté.

Une meilleure coordinati­on des services d’urgence, par exemple par un appel unique qui mobilise l’ensemble de ceux-ci, devrait simplement découler d’un plan d’interventi­on précis, préétabli et bien connu de tous. Il n’y a pas de raison de retarder la mise en place de telles recommanda­tions. Chacun doit savoir exactement ce qu’il a à faire personnell­ement dans une situation d’urgence dans une résidence pour aînés.

Le coroner Delâge relève aussi l’importance de bien séparer les clientèles des personnes non autonomes et autonomes puisque celles-ci ne nécessiten­t pas les mêmes types de secours. Il demande que le respect de cette norme fasse l’objet de vérificati­ons de la part des autorités. Un suivi peut également être donné très rapidement à ces suggestion­s préventive­s.

L’ARGENT, TOUJOURS L’ARGENT

Le coroner Cyrille Delâge a distribué très largement les blâmes. La correction de plusieurs nécessite des injections de plusieurs millions de la part des centres d’hébergemen­t privés et des petites municipali­tés. Or, le gouverneme­nt québécois fait une large place au privé dans ce créneau de la santé parce qu’il ne peut répondre à la demande et lorsqu’il le fait, les services ne sont pas nécessaire­ment meilleurs ni l’encadremen­t de la clientèle. Les départemen­ts de soins prolongés dans les centres hospitalie­rs et les résidences pour personnes âgées sont toujours des enfants pauvres dans le réseau de la santé et des services sociaux.

LE CORONER CYRILLE DELÂGE A DISTRIBUÉ TRÈS LARGEMENT LES BLÂMES

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