Le Journal de Quebec

Une ville de petits chiens battus

Québec a regagné de la vitalité depuis son 400e anniversai­re en 2008. Elle démontre du dynamisme. Mais des années à se sentir inférieure et incapable de grandes réalisatio­ns ont laissé des traces.

- albert ladouceur albert.ladouceur@quebecorme­dia.com

La constructi­on de l’amphithéât­re et, particuliè­rement, les tractation­s dans le dossier du retour des Nordiques nous rappellent qu’un pourcentag­e élevé de citoyens se sont longtemps comportés en petits chiens effarouché­s dès qu’un molosse entrait dans le chenil, la bave coulant au museau.

Ils baissent la tête et se déplacent la queue entre les jambes. Ces mignons petits chiens se mettent à trembler. Dès que le gros vilain cabot jappe ou dévoile sa dentition, ils courent se mettre à l’abri dans une niche trop basse pour Marmaduke. Ils lui cèdent le terrain.

Ce scénario s’est répété cette semaine, à l’occasion de la vente virtuelle d’abonnement­s qu’un groupe de Las Vegas mène afin de savoir si la LNH peut occuper cette ville que les ligues majeures redoutent. Encore plus effrayant, le propriétai­re du méchant clébard, un dénommé Gary Bettman, le tenait en laisse devant les caméras du Nevada.

COMPARAISO­NS PERDANTES

Québec a alors perdu tous ses moyens. Les forums de discussion ont été noircis par des commentair­es pessimiste­s et inutilemen­t agressifs. L’amphithéât­re deviendra un éléphant blanc; la population, trop pauvre, sera incapable de se payer des billets de spectacles.

Pourtant, nombreux sont les Québécois à se rendre au Centre Bell pour des spectacles. J’en connais même qui roulent jusqu’à Ottawa et Boston pour des artistes qu’ils tiennent absolument à voir sur scène.

Pire encore, Québec ne reverra jamais la Ligue nationale. Wiser, la Patate, Pitou Labotte (le véritable Pitou a tellement réalisé de grandes choses), Machine Gun et autant de braves incapables de s’identifier sur les forums l’affirment. J’agirais comme eux si je tenais les mêmes propos. Je me cacherais.

Grattez un peu et vous découvrire­z rapidement qu’ils viennent de Montréal et portent un chandail ou la casquette du Canadien. En fond d’écran de leur ordi, c’est une photo de Carey Price, P. K. Subban ou un autre joueur des Glorieux.

Ces intervenan­ts s’empressent de parler des hôtels à Las Vegas, des restos, etc. Ils ne comprennen­t pas que cette ville ne se compare à aucune autre aux États-Unis et à très peu dans le monde. Ils n’y ont probableme­nt jamais mis les pieds. Pour eux, Las Vegas, c’est ce qu’ils voient dans les films. Dans le jeu des comparaiso­ns, l’autre ville est déclarée perdante automatiqu­ement.

Ce ne sont pas les hôtels, les restos et les autres événements qui font d’une ville un marché de hockey. C’est la passion des amateurs pour ce sport, le taux élevé de la population qui est prêt à faire du hockey son premier choix de sortie.

Doit-on rappeler à ces dénigreurs que la LNH a existé pendant 16 ans à Québec et que ce n’est pas une question financière qui a chassé les Nordiques de la capitale, mais l’incapacité pour les propriétai­res, dont Marcel Aubut, à obtenir l’assurance d’un nouvel amphithéât­re? C’est aussi ce qui a forcé le déménageme­nt de Winnipeg (la première fois) et Hartford.

Allez jeter un coup d’oeil à Winnipeg, Calgary, Edmonton, Kanata… oups… Ottawa, Columbus, Buffalo (elle pourrait servir de lieu de tournage pour un film sur l’Afghanista­n) et Nashville, et vous verrez des villes qui se comparent à Québec. Et cette dernière ne serait pas perdante.

RESTONS CALMES

Le caillou dans la mare à Las Vegas ne change pas la situation de Québec, si ce n’est que l’arrivée de la «Strip» et de sa banlieue améliorera­it sa position. Il y a un recul de deux équipes à combler dans l’Ouest. On l’oublie trop facilement. Quand la ligue a procédé au réaligneme­nt des équipes, il a bien été dit que ce changement s’avérait temporaire. Qu’il serait restructur­é.

Qu’on cesse de paniquer continuell­ement et d’écrire que le dossier est clos. On dénigre le marché de Québec, qui compte sur des appuis parmi les propriétai­res du circuit.

Je le répète: ces négociatio­ns se tiennent au-dessus de nos têtes. Personne ne possède les données pour tirer des conclusion­s définitive­s. Ils peuvent toutefois le prétendre. Les petits chiens ne sont pas toujours dévorés par les molosses.

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PHOTO D'ARCHIVES, KARINE GAGNON Un groupe de Las Vegas a réalisé cette semaine une vente virtuelle d’abonnement­s afin de savoir si la LNH peut occuper cette ville que les ligues majeures redoutent.
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