Le Journal de Quebec

Les mauvaises manoeuvres du Dr Barrette

- Diane Lamarre Députée de Taillon. Porte-parole de l’opposition officielle en matière de santé et d’accessibil­ité aux soins

Les Québécois savent exactement ce qui cloche avec la santé: un inacceptab­le manque d’accès aux soins, tant aux urgences, aux chirurgies qu’aux médecins de famille.

Ils savent aussi où se situe une partie de la solution: dans la plus grande disponibil­ité des médecins de famille, dans la coordinati­on avec les spécialist­es, dans l’attributio­n de nouvelles responsabi­lités, notamment aux infirmière­s praticienn­es spécialisé­es et aux pharmacien­s.

Ils assistent, depuis 10 mois, au spectacle d’un ministre qui fait preuve d’improvisat­ion, de manipulati­on et d’insolence, et ce, dans les négos comme sur les réseaux sociaux.

Le problème? L’activisme du ministre, tourné vers les structures et le minutage des journées des médecins, a un impact nul sur l’accessibil­ité aux soins.

Pourquoi? Parce que les moyens que le ministre prend, loin d’être courageux, sont lents, laborieux, démotivant­s et dépourvus de toute sincérité. Ils sont surtout improducti­fs et abusifs.

Prenons le cas des 2000 nouvelles infirmière­s praticienn­es spécialisé­es qu’il a promises. Au rythme actuel de diplomatio­n – 40 par année –, il faudrait 50 ans pour y arriver. Donc, plutôt que de fusionner les centres jeunesse avec les centres hospitalie­rs (un non-sens du projet de loi 10), le ministre devrait, de toute urgence, s’entendre avec son collègue de l’Éducation pour porter rapidement à 200 le nombre de places disponible­s pour ces infirmière­s dans les université­s.

Les pharmacien­s, eux, sont prêts depuis plus d’un an à offrir de nouveaux services qui auront un effet immédiat sur l’accès. Le ministre n’a qu’à publier un décret découlant de la loi adoptée à l’unanimité en 2011 – il y a plus de trois ans – par l’Assemblée nationale. Or, il fait de l’obstructio­n en intégrant ce dossier dans un autre projet de loi (28) plutôt que d’agir et de permettre aux pharmacien­s de faire de même. Dans la vraie vie, un geste en ce sens aurait un réel effet pour les citoyens; demandez à ceux qui peinent à poursuivre leur traitement en raison de la difficulté qu’ils ont à faire renouveler leurs ordonnance­s…

Dans le dossier crucial de l’accès à un médecin de famille pour le quart des Québécois qui en sont privés, le ministre s’était engagé à ce que tous les groupes de médecine de famille (GMF) respectent leurs engagement­s en matière de recrutemen­t de patients avant la fin de... l’an dernier. Toutefois, on attend toujours, comme on a attendu en vain pendant neuf ans, sous le gouverneme­nt libéral précédent, le respect des engagement­s directemen­t liés à un meilleur accès. Gaétan Barrette s’est-il déjà mis dans la peau d’une personne sans médecin de famille, mais aux prises avec des symptômes inquiétant­s pouvant mener à une maladie grave?

Comment expliquer que le ministre ne fasse pas ce qui a donné des résultats ailleurs, ce qui relève du gros bon sens, s’il est si préoccupé par l’accès? Il préfère affirmer son autorité par un bâillon et, ainsi, écarter les questions.

Certains trouvent le ministre drôle, coloré, divertissa­nt… entre autres le soir, sur Twitter. Mais au lieu de mettre ses énergies sur de la «structurit­e» ou sur ses susceptibi­lités intramédic­ales, ne devrait-il pas s’occuper de ce que nous attendons tous de lui: donner rapidement accès aux Québécois à leur propre système de santé? Car – il semble utile de le souligner – ce système n’est pas celui du ministre Barrette, c’est celui de tous les Québécois.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada