Le Journal de Quebec

Cri du coeur d’une ex- junkie

Une femme appelle la population à appuyer le centre d’injection supervisé à Québec

- Kathryne Lamontagne lKLamontag­neJDQ

En deuil de deux conjoints morts tour à tour d’une surdose de drogue, Émilie Lambert-Dubé lance un véritable cri du coeur en faveur du projet de centre d’injection supervisé.

Ayant cessé de boire depuis un an et demi, la jeune étudiante de 22 ans tenait à partager son histoire, «pour que la mort de Kevin et Frédéric n’ait pas servi à rien».

Déjà alcoolique et toxicomane, Émilie rencontre à 15 ans un garçon «fin» et «travaillan­t», qui consomme cocaïne et morphine. Ils se séparent après trois ans de vie commune, mais reprennent contact au printemps 2013, alors que le jeune homme de 25 ans sort de thérapie. Les fréquentat­ions vont bon train jusqu’à ce que Kevin rechute. À peine quelques jours plus

tard, il est retrouvé mort: surdose.

FRÉDÉRIC

Dévastée, Émilie s’est mise à consommer, du matin au soir, avant d’entrer à son tour en thérapie. C’est là, en juillet 2013, qu’elle fait la rencontre de Frédéric, 22 ans, dépendant à l’héroïne. «Je ne voulais pas tomber en amour avec un toxicomane. Mais quand le coeur te cogne...» Les nouveaux amoureux passent à travers leur thérapie et s’installent à Québec. «On ne consommait pas, on s’aimait, on était motivés, on avait des projets plein la tête, on commençait l’école.»

À l’hiver 2014, toutefois, Frédéric fait un premier aller-retour à Montréal, pour aider sa mère à déménager. À son retour, il est «mêlé» et «agressif».

RECHUTE MORTELLE

Il retourne à Montréal quelques jours plus tard. Le 5 février, il est retrouvé seul, sans vie, dans une toilette publique, une seringue plantée dans un bras. «Ça faisait un an qu’il ne consommait plus. Il s’en était sorti. Il a rechuté trois jours et il est mort.»

Comme si ce n’était pas assez, Émilie apprend qu’elle est enceinte. Elle perd toutefois le bébé dans les semaines suivantes. «Je pense que Frédéric est venu le chercher. Parce que je m’apprêtais à avoir une vie vraiment difficile.»

Aujourd’hui, Émilie n’a pas la pensée magique de croire qu’un centre d’injection supervisé aurait sauvé Kevin ou Frédéric. Mais elle est convaincue que de tels sites, avec encadremen­t, soutien et soins médicaux, peuvent éviter des décès.

«Des centres comme ça, ça ne rejoindra pas tous les toxicomane­s, c’est clair, mais ça en rejoint quelques-uns. Et c’est pour eux que ça vaut la peine. On a un moyen de prévenir des décès.»

 ??  ?? Émilie demande aux citoyens de faire preuve d’ouverture d’esprit dans le projet de centre d’injection supervisé, qui vient d’être jugé pertinent et nécessaire par un groupe d’experts. En mortaise, Frédéric, mort d’overdose il y a un an.
Émilie demande aux citoyens de faire preuve d’ouverture d’esprit dans le projet de centre d’injection supervisé, qui vient d’être jugé pertinent et nécessaire par un groupe d’experts. En mortaise, Frédéric, mort d’overdose il y a un an.

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