Folies canadiennes
MAIS VOUS N’ENTENDREZ PAS DE LEADER POLITIQUE VOUS DIRE QU’IL EST IMPOSSIBLE D’INTÉGRER LES INTÉGRISTES
Le gouvernement Harper a raison de porter en appel la délirante décision de la Cour fédérale qui autorisait une femme arrivée du Pakistan en 2008 à prêter son serment de citoyenneté canadienne le visage recouvert par un niqab.
On peut être très critique, comme c’est mon cas, du régime politique canadien. Mais la cérémonie par laquelle vous devenez citoyen canadien, à laquelle j’ai participé en 1975, est un geste public et solennel d’adhésion non à une option constitutionnelle, mais aux valeurs de la vie civique canadienne.
Si la cérémonie est publique, c’est justement pour signifier que votre adhésion est ouverte, transparente et libre.
La symbolique n’est pas un détail. Vouloir s’y présenter le visage voilé, c’est nier radicalement un des piliers de ce pacte entre la personne et sa nouvelle famille d’accueil.
Cette citoyenneté donne aussi droit à un passeport dans lequel on ne concevrait pas que la photo soit celle d’un visage caché.
DÉRAPAGE
Le juge Keith Boswell voit cependant dans l’obligation de se découvrir le visage une atteinte inacceptable à la liberté religieuse.
S’estimant sans doute subtil, il ajoute que s’il fallait voir les lèvres bouger lors du serment, que feront les muets ou les moines ayant fait voeu de silence?
Voilà où en est rendue une part de l’élite juridique canadienne. Riez si vous voulez, mais il est cruellement vrai qu’un poisson pourrit d’abord par la tête.
Au moment du débat québécois sur la charte des valeurs, des juristes nous avaient mis en garde contre le danger de hiérarchiser les droits.
Ils étaient en retard sur la réalité. Les droits sont déjà hiérarchisés au Canada et, au-dessus de tous les autres, celui de rejeter radicalement nos valeurs si la religion sert de justification.
Dans une belle combinaison de calcul politique et de lâcheté intellectuelle, Justin Trudeau a refusé de se prononcer.
On ne cesse de nous bercer de belles paroles sur l’intégration des immigrants. Mais l’intégration repose sur un compromis réciproque.
Pour qu’il y ait intégration, la société d’accueil doit accepter qu’elle soit progressivement modifiée par les nouveaux arrivants.
L’immigrant, lui, invité dans une famille qui choisit ensuite si, oui ou non, elle l’adopte définitivement, doit laisser à l’entrée ses moeurs les moins compatibles avec celles de la maison qui lui ouvre sa porte.
IMPOSSIBLE
Bref, chacun fait son bout de chemin. C’est comme une épice qui parfume un mets sans le dénaturer.
Mais l’intégriste religieux, lui, considère que sa foi est inaltérable, inébranlable, intouchable et ne souffre pas le moindre compromis. Il exige qu’on l’accepte tel quel.
Il refuse radicalement ce compromis fondamental qu’exige l’intégration authentique. L’intégration est donc impossible.
Mais vous n’entendrez pas de leader politique vous dire qu’il est impossible d’intégrer les intégristes.