Vendre ou brûler ?
Des centaines de toiles laissées en héritage
Qu’advient-il des oeuvres d’un artiste lorsqu’il décède et qu’elles ne trouvent pas leur place dans un musée ou chez des collectionneurs? C’est la question que se pose Pierre Bernier, grand ami du peintre Denys Morisset, qui a hérité de centaines de toiles.
Avant son décès, Denys Morisset a dit à son ami: «Pierre, si tu es pris avec ça, brûle tout.» Vingtcinq ans plus tard, Pierre Bernier ne s’est toujours pas résolu à le faire. Mais l’idée le tracasse. «Jerem ets en question cette dé - marche que, finalement, je n’ai jamais accepté de faire», expliquet-il.
Mais l’entreposage coûte cher et le temps manque. Avant de se résoudre à tout brûler, il aimerait, évidemment, vendre.
«Denys disait toujours qu’il aimait mieux savoir ses oeuvres chez des gens que de sombrer dans un musée. Il s’auto diffusait. Et je poursuis sa mentalité», explique-t-il.
UN PEINTRE QUI DÉRANGE
Denys Morisset a surtout été connu localement, à Québec, où il vivait. Il était le fils de Gérard Morisset, un célèbre historien de l’art à qui l’on doit notamment l’inventaire des oeuvres d’art du Québec.
«C’est un homme qui était très respect é dans l e domaine des arts et qui avait un fils un peu particulier, nommé Denys», explique le fondateur du Club des collectionneurs en arts visuels du Québec et ancien ministre de la Justice, Marc Bellemare.
«Denys a fait une carrière un peu marginale, poursuit-il. C’était un exalté, un grand crieur, un dénonciateur. Il n’a pas eu un gros succès de musées, mais il a des oeuvres intéressantes», dit-il, mentionnant avoir lui-même fait l’acquisition de deux de ses oeuvres.
Un peintre talentueux qui laisse des centaines d’oeuvres en héritage à des amis ou à une famille qui ne savent pas qu’en faire: c’est une situation fâcheuse qui se produit malheureusement assez fréquemment, sel on l ’ expert en valeur marchande et spécialiste du marché de la revente, Pierre Garant.
«La cote, on l’établit en fonction de l’offre et de la demande. Si le peintre n’a pas été diffusé [en galerie], il n’y a pas de références. Il n’y a pas de prix à fixer», explique-t-il, précisant que la cote n’a rien à voir avec la valeur artistique de l’oeuvre.
Avant de se départir des oeuvres de son ami, Pierre Bernier a mis sur pied une exposition: Les oubliés inoubliables, présentée au Centre de commerce mondial jusqu’au 30 avril.