Éteignez vos maudits écrans !
Parlez-en à ceux qui enseignent, du secondaire à l’université, un fléau s’est diffusé dans les classes depuis quelques années: les damnés écrans! Je ne parle pas seulement de l’ordinateur sur lequel l’étudiant alterne entre la prise de notes et la consultation frénétique de Facebook.
Je pense aussi aux cellulaires qui se sont glissés dans les classes et grâce auxquels les étudiants multiplient les textos à leurs amis en plein cours, comme si la chose était impérieuse et urgente.
MANQUE D’ATTENTION
Le résultat? Alors que le professeur parle à l’avant, il voit devant lui des es- prits hypnotisés par leurs écrans, guettant leur cellulaire où ils espèrent recevoir un message insignifiant, qui les détournera de la matière. Au secondaire, c’est l’enfer. Déjà que les élèves ne sont pas disciplinés à cet âge, internet en classe a contribué à disperser ce qui leur restait d’attention. Au cégep et à l’université aussi, les professeurs doivent de plus en plus faire de discipline.
On connaît la réplique aussi bête que cinglante: que les professeurs soient intéressants et les élèves les écouteront. D’accord, certains sont ennuyeux à mourir. Mais c’est une esquive. Car on laisse alors de côté un problème majeur: la chute brutale, en quelques années, de la capacité de concentration des élèves. Ils sont tellement conditionnés par la ci- vilisation de l’écran qu’ils doivent sans cesse s’y connecter et qu’ils souffrent lorsqu’on les empêche.
Un professeur aurait beau être le meilleur homme de théâtre, il peut difficilement concurrencer cette accoutumance nouvelle. Il se bat contre la névrose technologique de notre temps. Elle modifie notre cerveau. D’ailleurs, elle frappe toutes les strates de la population. Qui est encore capable, aujourd’hui, de lire un livre pendant une heure sans consulter 15 fois ses courriels sur son portable? Ou de souper au restaurant sans jouer avec son écran? L’écran nous tient en esclavage.
AVEUGLEMENT TECHNOLOGIQUE
Évidemment, les technolâtres n’y voient rien. Ils sont obnubilés par chaque avancée technologique et rêvent d’y soumettre l’école. Et avec leur air supérieur de rusés fiers d’aimer inconditionnellement leur époque, car il fait bon être moderne, ils nous expliquent qu’on doit combattre la technologie par la technologie. Certains proposent d’intégrer le cellulaire à la pédagogie, d’autres s’imaginent plutôt enseigner à partir du ipad.
Il faudrait pourtant comprendre une chose: l’école devrait être un havre. C’est justement parce que la société est soumise à la tyrannie de la technologie et de l’écran qu’elle devrait apprendre aux élèves que la vie ne s’y résume pas. Elle devrait leur apprendre le plaisir et les vertus de la lecture silencieuse, de l’approfondissement réfléchi du texte. Elle devrait leur apprendre à se concentrer devant un maître qui enseigne sa matière.
La solution pourrait être relativement simple. Avant d’entrer en classe, on laisse de côté son portable. Et pour la prise de note, on utilise un stylo et du papier. Et si un étudiant devient turbulent, on a le droit de le virer de la classe. Propositions de bon sens? Oui. Mais aujourd’hui, le simple bon sens est devenu révolutionnaire.
Évidemment, les technolâtres n’y voient rien. Ils sont obnubilés par chaque avancée technologique et rêvent d’y soumettre l’école.