Le docteur Julien au pilori
Il y a quelques semaines, les médias ont été alertés par la mère d’un garçon de 10 ans, brûlé au deuxième degré par le soleil lors d’une sortie scolaire à la plage.
La mère était fâchée parce que les accompagnateurs n’avaient pas appliqué de crème solaire à son fils, tout en reconnaissant qu’elle ne l’avait pas fait non plus avant son départ de la maison.
Qu’on en soit rendus à alerter les journaux pour exposer sa propre déresponsabilisation parentale impose un rappel de l’ordre naturel des choses.
Les parents sont responsables de leurs enfants. Pas le CPE, pas l’école, pas la DPJ et surtout, pas le gouvernement.
Dans un monde idéal, la communauté, la famille, les amis et des organismes communautaires de proximité prendraient le relais des parents essoufflés ou inaptes. «Ça prend tout un village pour élever un enfant», disent les Africains.
QU’EN PENSEZ-VOUS DOCTEUR JULIEN ?
C’est en mettant ce dicton en pratique que Gilles Julien, l’inventeur de la pédiatrie sociale, a révolutionné l’aide aux enfants en milieux défavorisés.
Pas un saint, mais pas loin pour tous ses patients et leurs familles depuis 1997. Mais sa renommée ne l’a pas protégé d’une controverse la semaine dernière lancée par l’article «Dr Gilles Julien: l’état n’a pas à nourrir nos enfants» dans La Presse.
«Ce n’est pas à l’état de financer l’aide aux devoirs non plus.»
Mais le couvercle de la maxi-marmite des défenseurs de l’état mur à mur a sauté quand le docteur Julien a osé questionner le modèle des CPE – pas les CPE comme tels – rappelant qu’ils avaient été créés pour accueillir en priorité les enfants de milieux défavorisés, mais que ces derniers ont difficilement accès à des places.
Cerise sur le sundae, la journaliste lui a demandé s’il ne valait pas mieux que le gouvernement mette son argent dans les réseaux santé et éducation de l’état, que dans une fondation comme la sienne, pour ne pas perdre «le contrôle des subventions»?
Santé et éducation, deux secteurs si performants au Québec...
Ça prend un brave pour dire au Québec que l’état ne peut et ne doit pas tout faire. Le lendemain, il a dû publier un communiqué pour préciser sa pensée, mais le mal était fait.
Étiqueté drettiste, il était passé de canonisable à carbonisable.
UN ENTREPRENEUR SOCIAL
Le docteur Julien dérange. Il ose faire les choses à sa manière et ça marche. Il a l’oreille du premier ministre. Ça crée des jalousies. En plus des subventions gouvernementales – 22 M$ sur cinq ans pour créer des dizaines de cliniques, c’est peu –, il va chercher de l’argent dans le secteur privé, en plus de sa Guignolée annuelle.
Tout cela menace le consensus dû «hors de l’état et de ses syndicats, point de salut».
Il croit que le Québec s’est démobilisé face à ses enfants, que nous ne les avons pas bien servis dans les dernières décennies. Pas facile à entendre, mais quand on prend en compte les ratés en éducation, de l’augmentation du nombre d’enfants qui souffrent de troubles du comportement, les suicides d’adolescents, comment être en désaccord avec lui?
Sommes-nous, comme société, prêts à nous faire brasser la cage pour le bien de nos enfants? Et surtout à faire ce que doit?