Le Journal de Quebec

L’aberrant accès à l’informatio­n québécoise

Pour ne pas être écorché, mieux vaut ne pas être transparen­t

- 418.929.9145 jean- nicolas.blanchet@quebecorme­dia.com Jean-nicolas Blanchet l Jnblanchet­jdq

Les ministères et les organismes du Québec ont beau tous être soumis à la Loi sur l’accès à l’informatio­n, ils peuvent l’interpréte­r de différente­s façons, a constaté notre Bureau d’enquête en posant la même question à 19 organismes.

Chacun, dans la fonction publique québécoise, semble pouvoir interpréte­r la loi à sa manière. Le Bureau d’enquête a étonnammen­t obtenu 11 refus et 8 réponses claires.

Le Bureau cherchait à savoir combien de consultant­s en informatiq­ue privés travaillen­t dans chacun de ces 19 organismes depuis plus de trois ans, et combien d’argent leur a été versé pour leurs services.

La question concernait donc la problémati­que des consultant­s privés qui deviennent pratiqueme­nt des fonctionna­ires dans l’appareil public.

Même si le président du Conseil du trésor, Martin Coiteux, s’est montré très préoccupé par la situation, la plupart des ministères ne semblaient pas en mesure de révéler l’ampleur du phénomène.

C’est le ministère des Ressources naturelles qui a été le premier à répondre de façon claire et transparen­te. Le Journal a publié un reportage sur la dépendance du ministère à l’égard du privé.

TRANSPAREN­T ET ÉCORCHÉ

Les informatio­ns transmises montraient que le ministère avait versé 10 M$ à une vingtaine de consultant­s qui y travaillai­ent depuis plus de trois ans. Le ministre Pierre Arcand a réagi vivement, déclarant que cette «situation [...] doit changer». Le ministère a été écorché publiqueme­nt.

ASSEZ POUR FAIRE PEUR

Mais la plupart des autres ministères et organismes ne risquaient pas d’être blâmés de la sorte: ils ont simplement refusé de répondre à la question.

Chacun a interprété à sa façon la Loi sur l’accès à l’informatio­n.

Parmi les motifs invoqués pour justifier leur refus, les ministères écrivent qu’ils ne disposent pas de l’informatio­n recherchée ou même... qu’ils n’ont pas à la trouver.

OBSTACLE À L’INFORMATIO­N

Pourtant, plusieurs autres ont été en mesure de communique­r cette informatio­n. Ils n’ont pas eu à invoquer des articles de la «loi sur l’obstacle à l’in- formation», comme la surnomme, avec dépit, la Fédération profession­nelle des journalist­es du Québec, qui était d’ailleurs en commission parlementa­ire cette semaine dans le cadre de la refonte de la Loi sur l’accès à l’informatio­n.

Demandant une refonte indépendan­te et non seulement dictée par le gouverneme­nt, la Fédération souhaite que cette refonte soit «l’affirmatio­n de l’accès à l’informatio­n et de l’intérêt public plutôt que la préservati­on de la culture du secret», explique la présidente Lise Millette.

La question que nous avons posée a aussi été posée par le Parti québécois à plusieurs ministères et organismes lors de l’étude des crédits budgétaire­s.

La réponse, dans la plupart des cas, a été que l’informatio­n est disponible sur le système électroniq­ue d’appel d’offres du gouverneme­nt (SEAO), ce qui est complèteme­nt faux.

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La plupart des ministères et des organismes ignorent depuis quand des consultant­s en informatiq­ue privés travaillen­t dans leurs bureaux et combien ils ont coûté, révèlent nos demandes d’accès à l’informatio­n.
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