Le Journal de Quebec

Un monde inquiétant

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Ce monde, cette époque sont troublants. Inquiétant­s, même. La chute du Mur de Berlin et l’effondreme­nt du communisme d’état dans la dislocatio­n de L’URSS au début des années 1990 semblaient ouvrir la porte à une ère nouvelle et pacifique. Il n’en fut rien.

À la menace soviétique succéda la menace terroriste, qui perdure. Des États, en apparence stables, se sont fractionné­s, comme la Tchécoslov­aquie et la Yougoslavi­e. De l’écosse au Québec en passant par la Catalogne, les tentations sécessionn­istes demeurent présentes.

Les États-unis, présumés «vainqueurs» de la Guerre froide, n’ont pas réalisé qu’ils étaient devenus un colosse aux pieds d’argile. Ses dirigeants, aveugles face aux nouvelles donnes mondiales, ont continué à se comporter en policiers du globe, alors qu’ils n’en avaient plus ni la force ni les moyens.

Objets d’attaques graves du terrorisme en 1993 et en 2001, les États-unis ont démontré une réaction primaire, démagogiqu­e même. Après l’attentat du 11 septembre 2001 à New York, les Américains ont renforcé leur contrôle autoritair­e en politique intérieure (le «Homeland Department») et agressé l’irak pour déposer Sadam Hussein. Ils se sont aussi embourbés, sous couvert d’un mandat de L’ONU, en Afghanista­n, eux qui ne semblent pas se rappeler de l’histoire de la guerre du Vietnam. Le résultat, c’est que l’irak est déstabilis­é, et que le Moyen-orient est plus dangereux que jamais.

Lorsque le «printemps arabe» a commencé, l’europe et les États-unis ont applaudi chaleureus­ement les soulèvemen­ts populaires dans les pays arabes, les ont même encouragés sans réaliser à quel point une large partie de ces soulèvemen­ts était animée par des islamistes radicaux et financée par une Arabie saoudite avec laquelle les Occidentau­x continuent à avoir de bonnes relations.

Dans la foulée de ce fameux printemps arabe, les Américains ont aussi laissé L’OTAN et la France décapiter la Libye en participan­t à l’hallali aérien contre le gouverneme­nt de Kadhafi. La Libye n’a toujours pas, à ce jour, de gouverneme­nt digne de ce nom.

L’autre résultat, c’est que la Syrie est devenue un champ de bataille humainemen­t atroce entre le gouverneme­nt El-assad et l’opposition, un champ de bataille où l’état islamique occupe une bonne partie du territoire en continuant à perpétrer ses atrocités contre les personnes et son vandalisme destructeu­r contre le patrimoine de l’humanité.

Plus au Nord, la Russie de Poutine, le nouveau Tsar, rêve de reconstitu­er son empire perdu en 1990. Réoccupati­on de la Crimée, aucun respect pour la frontière orientale de l’ukraine, démonstrat­ions militaires, rien n’est trop beau ou coûteux pour que la Russie démontre à la face du monde qu’elle est redevenue une puissance sur l’échiquier mondial. Pendant ce temps, les dirigeants occidentau­x de l’europe et des Amériques se tordent les mains de désespoir et donnent littéralem­ent des coups de mouchoirs sur le poignet de Poutine. Un peu comme Daladier et Chamberlai­n face à Hitler en 1937 ou 1938.

En Asie, le colosse économique chinois connaît des difficulté­s alors que sa croissance échevelée ralentit. Combien de temps les Chinois vont-ils accepter le gouverneme­nt d’un parti unique? On ne le sait évidemment pas. Mais qui, à part quelques spécialist­es, aurait pu prédire en 1988 l’effondreme­nt du soviétisme et la fin de la division de l’allemagne?

Le monde est inquiétant? Certes. Il le serait à moins. Il n’est pas nécessaire d’être un spécialist­e des questions internatio­nales pour comprendre cela. Nous vivons une époque instable, donc dangereuse.

Michel Héroux, Montréal

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