Le Journal de Quebec

Des chevaux viennent à la rescousse d’anciens combattant­s

- Marie-christine Noël l MCNOELJDM cmarie- christine.noel@quebecorme­dia.com

Souvent isolés, dépressifs ou anxieux, des anciens combattant­s se tournent vers les chevaux pour guérir leurs traumatism­es.

«Ça m’a sauvée de moi-même. J’avais des idées noires, mais depuis ma rencontre avec les chevaux, je n’en ai plus», confie Julie Picotte, qui a servi pendant 20 ans dans l’armée canadienne comme technicien­ne médicale. Elle a été dépêchée au Rwanda en 1994 et en Bosnie en 1996 et en 2002.

Julie Picotte est atteinte du syndrome de stress post-traumatiqu­e, comme près de 15 000 autres anciens combattant­s canadiens. Elle est suivie par des psychologu­es pour calmer son anxiété, ses accès de colère, sa dépression et son insomnie, entre autres.

Au début de l’été, Julie Picotte a été invitée à participer, avec sept autres «frères d’armes», à un projet pilote d’aide aux vétérans assistée par les chevaux, chez Équi-sens, à Terrebonne. Une expérience qui, selon elle, a changé sa vie.

«Ça faisait longtemps que je n’avais pas souri, si vous saviez combien ça fait du bien. Et quand je suis là-bas, mon anxiété baisse», assure-t-elle.

Lors des séances d’équithérap­ie, le vétéran est amené à interagir avec un cheval qu’il a choisi. Une éducatrice spécialisé­e est à leur côté pour aider à la socialisat­ion. Le vétéran peut caresser les bêtes, les promener ou changer leurs fers, entre autres. Il ne monte pas à cheval.

AGRESSIVIT­É

«J’avais beaucoup d’agressivit­é en dedans de moi et les chevaux m’ont aidé à me calmer. Tu vis avec des affaires, des fois (long silence). Mais j’en ai réglé grâce au projet», a admis Réal Beaudoin, ex-militaire du Royal 22e Régiment qui a servi quatre ans en Allemagne.

«L’armée ne sort jamais de toi. Et on te met dehors quand t’es plus bon», ajoute-t-il en caressant la crinière d’un cheval venu le saluer au passage.

M. Beaudoin a quitté l’armée sur un coup de tête après sa mission. Il affirme ne pas être atteint du syndrome de stress post-traumatiqu­e, mais il a parfois des «flash-back». À son arrivée au centre, M. Beaudoin a choisi le plus grand cheval et le plus indépendan­t.

«Il était comme moi. J’avais l’impression de me voir dans un miroir», confie-t-il.

Bien impliqué, ce vétéran aide d’autres an- ciens combattant­s aux prises avec des problèmes de santé mentale.

«J’ai amené un frère d’armes ici. Il n’était pas sorti de chez lui depuis 10 ans. Sa femme ne savait plus quoi faire. Après quelques séances, on a vu le changement. [...] Ça me fait plaisir de le voir comme ça», lance M. Beaudoin, visiblemen­t fier.

« LE CHEVAL T’ACCEPTE »

Le projet de Chantal Soucy, qui a fondé Équi-sens, un organisme sans but lucratif, est donc de créer un programme francophon­e d’équithérap­ie pour les vétérans, mais aussi pour les premiers répondants.

Un projet de recherche universita­ire sera mis en branle cet automne afin de valider scientifiq­uement les bienfaits du programme. Néanmoins, les résultats semblent déjà concluants pour des vétérans.

«Le cheval t’accepte, peu importe qui tu es [...] Dans l’armée, tu dois toujours être performant et, quand c’est fini, les vétérans ont l’impression d’être oubliés ou plus nécessaire­s. On retravaill­e cette confiance avec eux et les chevaux», explique-t-elle.

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Réal Beaudoin est un vétéran du Royal 22e Régiment. Il a participé au projet pilote d’équi-sens qui vient en aide aux anciens combattant­s.
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JULIE PICOTTEEx-militaire

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